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Le Gerfaut

Le Gerfaut

Titel: Le Gerfaut Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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venu chez moi sans que j’assure son retour. Il y va de mon honneur.
    La fenêtre fut enfin refermée et Gilles n’entendit plus rien. Mais les derniers mots du fermier lui avaient donné à penser. Il avait dit « un parlementaire ennemi ». Se pouvait-il qu’il ne fût pas le complice d’Arnold, le complice conscient tout au moins ? Se pouvait-il qu’il eût été, lui aussi, abusé par ce boiteux diabolique ? On avait dû faire miroiter à ses yeux des préliminaires d’armistice, en vue de la mauvaise saison qui s’annonçait et qui rendrait les opérations beaucoup plus difficiles.
    Le galop d’une troupe à cheval vint interrompre les méditations du Breton qui se tassa le mieux qu’il put contre sa haie : un peloton de cavalerie américaine commandé par un officier dévalait le chemin derrière la maison de Smith, s’y arrêtait en tempête. L’officier seul mit pied à terre, entra dans la maison et, un moment plus tard, reparut escortant le général Arnold auquel on amena un cheval. Le pied à l’étrier, celui-ci se tourna vers Josué Smith.
    — À bientôt, Smith, dit-il peut-être un peu trop haut. Ne faites rien sans en avoir reçu l’ordre. Vous entendez ? Rien !
    — Entendu, Général ! J’attendrai.
    Gilles pensa qu’il était grand temps pour lui de rejoindre Tim et de le mettre au courant. Les dernières paroles du traître étaient claires ; l’Anglais allait rester caché dans la maison de Smith jusqu’à ce qu’on ait pu lui donner les moyens de regagner ses lignes. Au surplus, il lui eût été bien difficile de circuler, en plein jour et en plein milieu des positions américaines, avec un uniforme rouge.
    À l’abri de la haie, Gilles descendit jusqu’au fleuve profitant de l’agitation causée par le départ tumultueux d’Arnold sur le chemin du haut. Là, il prit ses jambes à son cou et parcourut rapidement la distance qui le séparait de l’arbre où les chevaux avaient été laissés. Il y trouva Tim occupé à bouchonner les bêtes qu’il avait déjà nourries et qui semblaient ne rien ressentir de leur nuit pluvieuse. L’Américain semblait d’excellente humeur et sifflotait tout en travaillant. Il adressa un joyeux bonjour à son ami exactement comme si l’un et l’autre venaient de quitter un bon lit après une nuit de parfait repos.
    — Et si tu me racontais l’histoire du canon ? fit le Breton mi-figue mi-raisin. Ça a l’air bigrement intéressant !
    Le sourire de Tim s’élargit au point de lui couper la figure en deux.
    — Un bon tour, hein ? Je savais que le colonel Lamb dont le poste est plus haut sur le fleuve, possédait un joli petit canon, assez facile à transporter. Je l’ai convaincu de le prêter au commandant du petit fortin qui est là au-dessus et qu’on ne voit guère, un certain capitaine Levingston. Ça n’a pas été sans mal ; Lamb tenait à son engin comme à un souvenir de famille. Levingston a dû jurer de le lui rapporter avant midi, à cause d’une inspection toujours possible. Mais tu vois, ça a fait du bon travail : le Vautour qui se croyait bien caché a décampé. À toi, maintenant. Où en sommes-nous ?
    En quelques phrases, Gilles raconta sa nuit et les résultats de la canonnade puis, bouillant d’ardeur combative, enchaîna :
    — Arnold est reparti ! L’Anglais est seul chez Josué Smith. Pourquoi ne pas aller l’y prendre, le faire prisonnier et le conduire au général Washington ?
    — Ce serait peut-être possible si Josué Smith était véritablement un traître mais, d’après ce que tu m’as dit, je pense sincèrement… qu’il croit avoir bien servi la cause de l’Indépendance en permettant l’arrivée d’un parlementaire anglais jusqu’au grand chef de West Point. Il ne comprendrait pas et nous n’aurions aucune aide, de personne, pas plus des gens de West Point que ceux de Levingston. Tu veux que je te dise ce qui se passerait ?
    — Ne te fatigue pas, j’ai compris. On nous prendrait pour des espions, ou pour des fous et on nous pendrait haut et court…
    — … pour l’excellente raison que c’est à Arnold lui-même qu’on nous mènerait tout droit. C’est bien ça. Il faut trouver autre chose. N’oublie pas que nous ressemblons bien davantage à des bandits de grand chemin qu’aux honnêtes et vaillants soldats d’une juste cause. Ce qu’il faut, c’est pouvoir mettre la main sur ce joli petit major anglais mais hors de la zone d’influence

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