Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le Gerfaut

Le Gerfaut

Titel: Le Gerfaut Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
Vom Netzwerk:
d’Arnold. Alors seulement on pourra le conduire à Washington et, là au moins, on aura quelque chose de mieux en fait de preuve qu’un vague racontar d’Indien.
    — Ça paraît incroyablement simple, ironisa Gilles. Reste à réaliser ! Pour le moment, on fait quoi ?
    — Les chevaux sont prêts. On mange un morceau (ce brave Levingston à qui je dois déjà l’avoine pour les chevaux a eu pitié de ma mine défaite et m’a donné un solide casse-croûte !) et après, on s’en va.
    — On s’en va ? Ne vaudrait-il pas mieux continuer à surveiller la maison de Smith ? Admets que, cette nuit, il fasse traverser le fleuve à l’Anglais avec sa barque ?
    — Impossible ! Le Major devrait alors franchir Peekskill et nos lignes. S’il veut atteindre tout entier les avant-postes anglais des White Plains, il doit descendre de ce côté du fleuve jusqu’à Kings Ferry ; là seulement, il pourra traverser. Vraisemblablement, il sera déguisé mais tu l’as assez regardé cette nuit, tu pourras sans doute le reconnaître ?
    — Sans hésiter ! Même déguisé en coureur des bois ou en clergyman !
    — Eh bien voilà !… Au lieu de risquer de nous faire prendre par ici, nous allons le précéder à Kings Ferry et y aller tranquillement l’attendre de l’autre côté du fleuve…
    L’assurance de Tim était communicative, pourtant Gilles ne parvint pas à la partager entièrement. L’impression de malaise qu’il devait retrouver si souvent par la suite et qu’il apprit à reconnaître comme une sorte de sixième sens, s’y opposait. Qui pouvait affirmer qu’Arnold, dont l’intelligence n’était plus à démontrer, ne trouverait pas un autre moyen de rapatrier son complice, ne fût-ce qu’en lui procurant un uniforme américain lui permettant de traverser tranquillement les lignes américaines tandis que ses poursuivants l’attendraient vainement à Kings Ferry ?
    Bien sûr, Tim Thocker n’aimait pas beaucoup voir son compagnon mettre en doute ses idées mais le risque parut trop grand au Breton qui le déclara sans autre détour. À sa grande surprise, Tim admit sans hésiter le bien-fondé de l’objection.
    — Avec ce diable d’homme tout est possible ! Dans ce cas, il n’y a qu’un endroit où attendre l’Anglais car sa route de retour l’obligera à y passer : le gué de Crotton River. Si on le manque à Kings Ferry, on l’aura là-bas ! Maintenant assez causé et en route !
    Pour toute réponse, Gilles enfourcha son cheval.
    La pluie les rejoignit bien avant qu’ils n’eussent atteint le passage et se mit à les flageller comme si elle avait des raisons particulières de leur en vouloir. Le jour gris, fourré d’épais nuages qui couraient d’un bout à l’autre de la vallée, déversait un déluge glacé qu’aucun vêtement ne pouvait protéger. Les eaux, déjà hautes, du fleuve couleur de mercure se gonflaient encore d’inquiétante façon.
    — Je me demande si je réussirai un jour à sécher tout entier ! marmotta Gilles entre ses dents. Il me semble que je deviens poisson.
    Courbés sous l’averse, les deux cavaliers galopaient le long des croupes boisées de la vallée sans plus sentir la fatigue, le froid ou même l’humidité. Une seule idée, impitoyable, commandait à leurs muscles et à leurs réflexes : arrêter l’émissaire anglais et rapporter à Washington les preuves de la trahison d’Arnold, les preuves écrites que Gilles l’avait vu recevoir sous ses yeux. Et ce but il fallait l’atteindre coûte que coûte, et quels que puissent être les obstacles éventuels…
    Le premier apparut à Kings Ferry sous les aspects de deux miliciens en armes reconnaissables à la branchette de sapin qu’ils portaient à leur tricorne cabossé : le bac, d’ordre supérieur, ne partait pas ! Il s’agissait d’éviter que l’on n’eût à tirer sur lui au cas où d’autres navires anglais tenteraient de remonter vers West Point.
    Déjà furieux, Tim ouvrit la bouche pour protester mais un coup d’œil glacé de Gilles la lui fit refermer tandis que le Breton déclarait avec bonne humeur :
    — Eh bien, attendons ! Si nous ne pouvons passer, nous nous consolerons en pensant que personne ne le pourra davantage ! Et je vois là une auberge…
    — Pas un peu fou ? grogna Tim. On paye dans les auberges et on n’a pas un sou !
    — Exact ! l’a un sou… mais quelques dollars tout de même que nous devons à la compréhension de

Weitere Kostenlose Bücher