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Le Gerfaut

Le Gerfaut

Titel: Le Gerfaut Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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répugne fort à le vendre. Puisque vous êtes de ce pays, ne voyez-vous personne qui accepterait de le garder et de le soigner comme il le mérite pendant que nous serons à la guerre ?
    Les yeux de Gilles se mirent à briller comme des étoiles.
    — Vous me feriez confiance ?
    Fersen n’hésita même pas.
    — Mon Dieu oui ! Vous ne l’avez pas volé par goût du lucre mais parce que vous en aviez besoin. Et puis… vous l’aimez, je l’ai vu tout de suite. Ce sont de ces choses qu’un homme de cheval sent chez un autre. Alors, votre idée ?… Mais poursuivons notre chemin car je crois que vous oubliez votre mission.
    Alors, en gagnant l’Arsenal, Gilles parla de Guillaume Briant, de sa passion des armes et de la cavalerie, de sa maison basse et des prairies du Leslé. Il en parla même avec tant de conviction qu’avant même d’avoir atteint l’hôtel de l’Amiral Blanc, le Suédois avait pris sa décision : l’un de ses serviteurs, nanti d’une lettre de Gilles, d’une autre de lui-même et d’un peu d’argent partirait le soir même pour le domaine des Talhouët.
    — Ce soir même ? fit Gilles, étonné d’une telle hâte. Craignez-vous que M. de Lauzun ne veuille l’acheter tout de même et l’embarquer en secret ?
    Pour la première fois, Fersen se mit à rire, chose qui lui arrivait rarement.
    — Il n’oserait tout de même pas. Mais je désire régler cette question au plus vite pour une raison que le secrétaire du Général ne peut pas ignorer : mon régiment, le Royal-Deux-Ponts, embarque demain matin, partie sur le transport Comtesse de Noailles , partie sur le vaisseau de ligne Jason où je dois prendre place avec les autres officiers. Ordre du Général en chef, ajouta-t-il avec un soupir qui trahissait son peu d’enthousiasme. J’espère seulement que le départ ne se fera pas trop attendre et que nous n’allons pas tourner indéfiniment au bout des chaînes d’ancre…
    Il allait, au grand désespoir du Suédois, se faire attendre encore quelque temps. Le 17 avril, Rochambeau, par la plume de son secrétaire, avait beau confier à son Ministre : « Si le temps se nettoie, j’irai coucher à bord du Duc de Bourgogne au plus tard demain pour profiter, sous les ordres de M. le Chevalier de Ternay, du premier vent du nord… » Ledit vent du nord ne se montra ni le 18 ni les jours suivants bien qu’à la date prévue, le Général eût effectivement mis son sac sur le vaisseau amiral dont le chargement était complet et qui comprenait, outre une partie du régiment de Saintonge avec M. de la Valette, son colonel, et M. de Charlus, colonel en second, deux Américains assez mystérieux qui intriguaient énormément Gilles mais dont il ne parvenait pas à s’approcher.
    L’un après l’autre, d’ailleurs, les navires quittaient le port et gagnaient la rade pour s’y affourcher 2 et attendre dans la plus stricte discipline (aucune permission de quitter le bord n’était accordée) et le plus profond ennui que l’ordre d’appareiller fût enfin donné.
    Aussi impatient que les autres, Gilles trouva néanmoins un peu de répit. Depuis son engagement, il avait travaillé comme un esclave mais dès que le Duc de Bourgogne fut en rade, il se vit, au contraire, dans une situation privilégiée car, seul de tout le navire, il allait à terre chaque jour pour exécuter les ordres de ses chefs et, entre autres, pour chercher le courrier, officiel chez le comte d’Hector ou personnel à l’hôtel de l’amiral. Un courrier qui, bien sûr, ne le concernait jamais.
    Une seule fois, en réponse à la lettre enthousiaste qu’il lui avait écrite au soir de son engagement, il avait reçu de son parrain une longue épître amicale, pleine d’encouragements et de bons conseils, qu’il avait gardée précieusement comme le seul lien le rattachant encore à la terre. Mais il ne souffrait plus de la solitude qui avait été sienne durant les premiers jours : les deux grands chefs qui, en dehors des réunions d’état-major tuaient le temps en jouant aux échecs, lui montraient beaucoup de bonté et, depuis l’affaire du cheval, il avait noué avec Axel de Fersen une espèce de complicité qui se traduisait, du côté de Gilles, par quelques commissions faites à terre, pour le reclus du Jason qui, en dehors des conférences d’état-major à bord du vaisseau amiral, s’ennuyait ferme. Enfin l’agressif duc de Lauzun s’était embarqué, lui aussi, et avait pris

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