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Le Glaive Et Les Amours

Le Glaive Et Les Amours

Titel: Le Glaive Et Les Amours Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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duchesse
d’Orbieu ?
    — Sans moi et sans mon épouse, cela vaudra mieux.
    — Et quid de ces confesseurs jésuites ?
    — Ils sont doux, suaves, pleins de tact, dès lors qu’on
les caresse.
    — Qu’on les caresse ! Dieu bon !
    — Madame, ne vous alarmez pas ! Il ne s’agit pas
d’eux-mêmes, mais de leurs boursicots.
    — Dieu bon ! Que je serais heureuse de n’être plus
tyrannisée par ce pied-plat de confesseur. Voilà donc qui est décidé. J’irai ce
soir au bal de la reine ! Irez-vous ?
    — Catherine n’aime ni ces lieux ni ces danses.
    — Est-elle si pieuse ?
    — Point du tout. Elle craint qu’une de ces pimpésouées
de cour qui tournoient dans leur vertugadin au son d’une grisante musique, ne
dérobe d’une œillade mon cœur.
    — Est-ce bien du cœur qu’il s’agit ?
    — Madame ! Parlez-moi plutôt de la reine !
L’aimez-vous ?
    — Dans le détail, non. Dans l’ensemble, oui.
    — De grâce, précisez.
    — Elle est escalabreuse à l’extrême, hurle dans l’aigu
à vous tympaniser quand elle est en colère, mais son cœur est chaleureux. Elle
est sensible au malheur comme au bonheur des autres. Bien que rigoureusement
chaste après son veuvage, elle accueille avec plaisir les hommages de ses
gentilshommes. Par-dessus tout elle adore son fils, et son fils le lui rend bien.
Dès qu’il apprend qu’elle est réveillée, il accourt dans sa chambre, tire les
courtines, se jette sur son lit, et le voilà aussitôt câliné, caressé, ococoulé
à l’infini. Il répond avec ferveur à ces enchériments. Quand Anne se lève pour
se laver des pieds à la tête, il est là, à la contempler, entouré de
chambrières accortes qui pendant ce temps-là lui lavent le visage, lui
testonnent le cheveu et accueillent volontiers sa nuque sur leurs tétins.
Heureux mignot qui, au rebours d’un père élevé par une mère désaimante et
rabaissante, a connu une enfance si caressée par les femmes !

 
CHAPITRE XIII
    Quand il succéda à Richelieu, Mazarin me pria de continuer
mon assiduité auprès du Parlement, ce qui me permettait, dans les occasions,
moins de conseiller ces messieurs, que d’écouter ce qu’ils disaient et de
flairer ce qu’en ma présence ils n’osaient dire.
    Leur hostilité, muette à mon endroit, était telle dans les
débuts que je craignis qu’ils ne me fissent assassiner à l’improviste par
quelques caïmans, raison pour laquelle je ne me rendais au Parlement que
fortement accompagné.
    Pourtant, à la longue, ils me virent d’un meilleur œil, car
je leur avais mis plus d’une fois puce à l’oreille sur des procédures qui
eussent été pour eux fort périlleuses.
    Il va sans dire qu’après la mort de Richelieu je perdis à
leurs yeux beaucoup de mon importance, tant est qu’en ma présence ils ne se
gênaient plus pour dauber la régente et son ministre, sans pourtant oser s’en
prendre encore au petit roi.
    Les ambitions de ces messieurs n’avaient pas changé d’un
iota. Du vivant de Louis XIII, ils avaient sans relâche essayé de
grignoter une parcelle du pouvoir royal, tentatives qui leur avaient valu
d’être à deux reprises fort rudement rebuffés par Louis XIII. Ils reprenaient
meshui le même dessein avec plus d’assurance, devrais-je dire même avec plus de
morgue, tant les succès du Parlement anglais à l’encontre de leur roi
Charles I er leur montaient à la tête, et les rendaient plus
piaffards que des chevaux fougueux. Que de paroles sales et fâcheuses ces
graves messieurs de robe prononcèrent alors sotto voce sur la régence,
sur Mazarin et sur Particelli, le nouveau surintendant des finances.
    La guerre, grande dévoreuse de pécunes, avait mis à sec le
Trésor du roi, et la reine, par mille moyens, essayait de le renflouer, ce qui
ne se pouvait faire qu’en levant de nouveaux impôts. Nos messieurs de robe
n’avaient cure du but poursuivi, ni de la guerre à nos frontières. Ils
trouvaient plus avantageux de critiquer les moyens par lesquels Particelli
tâchait de joindre les deux bouts. Ces sages juges, sachant combien les
nouveaux impôts étaient haïs par le populaire, s’appuyaient sur lui comme sur
une force dont ils pourraient dans les occasions se servir.
    Parmi ces mesures financières désespérées de Particelli, je
n’en citerai qu’une : l’aggravation de la Paulette.
     
    *
    * *
     
    — Monsieur, qui est cette mignote et que vient-elle
faire en ces graves

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