Le grand voyage
sont sans doute habitués au froid, avança
Jondalar. Laduni disait qu’ils vivaient au nord d’ici, et il n’y fait jamais
très chaud, pas même en été.
— Tu as peut-être raison. Pourtant, ils pensent comme ceux
que j’ai connus. A propos, qu’est-ce qui t’a incité à dire à Guban que tu avais
une dette envers le Clan ? Tu ne pouvais pas choisir meilleur argument.
— Je ne sais pas. Mais c’est la vérité. C’est au Clan que
je dois la vie. S’il ne t’avait pas recueillie, tu serais morte, et moi aussi.
— Tu ne pouvais pas non plus trouver de meilleur gage que
cette dent d’ours des cavernes. Tu as vite compris leurs coutumes, Jondalar.
— Oh, elles ne sont pas si différentes des nôtres !
Les obligations comptent beaucoup pour les Zelandonii. Les obligations que tu n’as
pas réglées avant de partir pour l’autre monde donnent le contrôle de ton
esprit à celui à qui tu les dois. On prétend que certains de Ceux Qui Servent
la Mère empêchent des gens de s’acquitter de leurs dettes pour exercer un
pouvoir sur leur esprit. Mais s’il fallait écouter tout ce qu’on raconte !
— Guban croit que vos deux esprits sont étroitement mêlés,
dans cette vie, et dans l’autre. Il pense qu’une parcelle de ton esprit l’accompagnera
toujours, et qu’une parcelle du sien te suivra partout. C’est bien ce qui l’inquiétait.
Il a perdu une parcelle de son esprit quand tu lui as sauvé la vie, mais comme
tu lui en as donné une du tien en échange, il n’y a pas de vide, pas de trou.
— Tu lui as aussi sauvé la vie. Tu l’as encore davantage
aidé.
— Oui, mais je suis une femme, et une femme du Clan est
différente d’un homme du Clan. On ne peut même pas parler d’échange parce que l’un
ne peut pas faire ce que fait l’autre. Ils ne possèdent pas la même mémoire.
— Mais tu lui as réparé sa jambe pour qu’il rentre chez
lui.
— Il serait rentré de toute façon, je ne m’inquiétais pas
pour ça. J’avais peur que sa jambe ne se ressoude pas proprement, et qu’il ne
puisse plus chasser.
— Est-ce si grave ? Ne peut-il pas faire autre chose,
comme les garçons des S’Armunaï ?
— Le statut d’un homme du Clan dépend de ses capacités de
chasseur, et son statut lui importe davantage que sa vie. Guban a des
responsabilités. Il a deux femmes. La première a deux filles, et la nouvelle
est enceinte. Il a promis de subvenir aux besoins de toutes.
— Et s’il ne peut pas ? Qu’adviendra-t-il d’elles ?
— Oh, elles ne manqueront de rien. Le clan s’occupera d’elles,
mais leur statut – la façon dont elles vivent, la nourriture les
vêtements, le respect qu’on leur doit – dépend de celui de Guban. En
plus, il perdrait Yorga. Elle est jeune et belle, un autre homme serait ravi de
la prendre pour compagne. Mais si elle met au monde le fils que Guban rêvait d’avoir
dans son foyer, elle l’emportera avec elle.
— Et quand il sera trop vieux pour chasser ? demanda
Jondalar.
— Un vieux abandonne la chasse petit à petit, avec
élégance. Il va habiter avec les fils de sa compagne, ou les filles si elles
vivent toujours dans le clan, et il ne deviendra un fardeau pour personne. Zoug
s’était perfectionné à la fronde pour apporter sa contribution à la chasse, et
les conseils de Dorv étaient très écoutés. Pourtant, il voyait à peine. Mais
Guban est dans la force de l’âge, et c’est un chef. S’il perdait tout cela d’un
coup, il ne s’en remettrait jamais.
— Oui, je comprends, fit Jondalar d’un air entendu. Ça ne
me dérangerait pas de ne plus chasser, mais si je n’étais plus capable de
travailler le silex, je serais très malheureux... Tu as fait beaucoup pour lui,
Ayla, ajouta-t-il après réflexion. Même si les femmes du Clan sont différentes,
ça ne compte-t-il pas ? Il aurait au moins pu te remercier.
— Mais il m’a témoigné sa gratitude, à sa manière, Jondalar.
Avec tact et subtilité, comme il convient.
— Il a dû être drôlement subtil, parce que je n’ai rien
remarqué, s’étonna Jondalar.
— Il a communiqué directement avec moi, sans passer par ton
intermédiaire. Et il a tenu compte de mon avis. Il a accepté que sa femme te
parle, ce qui faisait de moi son égale. Et comme son statut est élevé, celui de
Yorga l’est aussi. Il t’a témoigné beaucoup de considération, tu sais. Il t’a
même fait un compliment.
— Vraiment ?
— Il a
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