Le grand voyage
pas
grand-chose à lui donner. Il eut soudain une idée lumineuse.
Il détacha une bourse de sa ceinture et en versa le contenu dans
sa main. Guban parut surpris. Il y avait plusieurs griffes et canines d’ours
des cavernes, celui qu’il avait tué l’été précédent, au début de leur long
Voyage.
— Accepte ceci en gage de mon amitié, fit-il en tendant une
dent d’ours à Guban.
Guban réfréna sa joie. Une dent d’ours des cavernes était un
gage puissant et conférait un statut élevé. Jondalar lui faisait un grand
honneur. Guban était enchanté que cet homme des Autres eût compris l’importance
de sa position, et qu’il eût souhaité s’acquitter de sa dette envers le Clan
tout entier avec autant de discernement. Il accepta le gage qu’il serra dans
son poing.
— Bon ! fit Guban avec fermeté, comme s’il mettait un
terme à une transaction. Maintenant que nous sommes parents, il serait bon de
connaître le territoire de chacun.
Jondalar décrivit brièvement la région qu’occupaient les Zelandonii,
et ensuite celle où vivait la Neuvième Caverne. Guban fit de même pour son
territoire. A les entendre, Ayla se disait qu’ils n’étaient pas aussi
différents qu’elle l’avait imaginé.
Le nom de Charoli arriva dans la conversation. Jondalar expliqua
les problèmes que la bande avait causés à tout le monde, et précisa les détails
de l’expédition punitive décidée par les Losadunaï. Guban jugea la nouvelle
assez importante pour être annoncée aux autres clans. Il commençait à
considérer son accident comme un heureux présage.
Il aurait beaucoup de choses à raconter à son clan. Non
seulement les Autres se plaignaient des agissements de ces jeunes et comptaient
y mettre un terme, mais certains des Autres acceptaient de combattre les leurs
pour défendre le Peuple du Clan. Il y en avait même qui parlaient
correctement ! Une femme connaissait parfaitement le langage du Clan, et un
homme, avec des capacités plus limitées, mais certainement plus utiles puisque
c’était un mâle, et un parent de surcroît. Nul doute qu’il pourrait tirer
profit de son contact avec les Autres, et de ce qu’il avait appris d’eux. Son
statut en sortirait renforcé, surtout s’il récupérait l’usage de sa jambe.
Le soir, Ayla lui appliqua le moulage d’écorce. Guban alla se
coucher le cœur léger. Sa jambe ne le faisait presque plus souffrir.
Le lendemain, Ayla se réveilla mal à l’aise. Elle avait encore
fait un de ses rêves étranges où il était question de cavernes et de Creb. Elle
le raconta à Jondalar. Ils envisagèrent ensuite les différents moyens de
ramener Guban dans son clan. Jondalar suggéra d’utiliser les chevaux, mais il
craignait que cela ne les retardât trop. Ayla devinait que Guban n’accepterait
jamais. Les chevaux apprivoisés l’angoissaient bien trop.
Ils aidèrent Guban à sortir de la tente, et pendant qu’Ayla et
Yorga préparaient le repas matinal, Jondalar montra à l’homme le maniement des
béquilles. Malgré les protestations d’Ayla, Guban voulut les essayer à tout
prix, et après quelques essais, il s’étonna de leur efficacité. En fait, il
pouvait marcher sans peser sur sa jambe cassée.
— Yorga ! appela-t-il après avoir reposé les
béquilles. Prépare-toi. Nous partirons après le repas. Il est temps de rentrer
au clan.
— C’est trop tôt, protesta Ayla, parlant en Zelandonii pour
Jondalar en même temps qu’elle faisait les signes du Clan. Il faut ménager ta
jambe, sinon elle ne se remettra pas convenablement.
— Avec ceci, ma jambe se reposera pendant la marche, fit
Guban en montrant les béquilles.
— Si tu es pressé, tu peux monter sur un des chevaux,
proposa Jondalar.
Guban prit un air effaré.
— Non ! Guban ira sur ses jambes, grâce à ces bâtons
de marche. Nous partagerons encore un repas avec nos nouveaux parents et nous
partirons.
41
Les deux couples se séparèrent. Guban et Yorga se contentèrent
de regarder un instant Ayla et Jondalar, en prenant garde d’éviter le loup et
les chevaux. Alors, appuyé sur ses béquilles, Guban s’éloigna en clopinant,
suivi à quelques pas de Yorga.
Pas d’adieux, pas de merci, le Peuple du Clan ignorait de tels
concepts. On pensait qu’un départ était un acte éloquent qui se passait de
commentaire ; quant à l’aide ou la gentillesse, surtout venant de parents,
cela allait de soi. Ayla savait que Guban aurait les pires difficultés
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