Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le Gué du diable

Le Gué du diable

Titel: Le Gué du diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marc Paillet
Vom Netzwerk:
bénéficier une enquête aux conséquences aussi lourdes ?
    L’abbé saxon observa un long silence avant de répondre :
    — Ne m’a-t-on pas affirmé que les abbayes royales ne laissaient pas passer une occasion de réclamer la restitution de biens et que, d’ailleurs, elles avaient déjà obtenu d’importants résultats en la matière ?… Ne m’a-t-on pas également indiqué que les évêques de ce diocèse, à l’instar des comtes, s’estimaient mal aimés et mal pourvus en bénéfices ?… Tous ceux qui revendiquent des terres peuvent-ils être tenus en suspicion ?
    — Certes pas ! répliqua l’évêque Aaron. Mais sans doute me suis-je mal fait comprendre. Je voulais seulement souligner que ni les abbés ni moi-même n’avons la charge de cette enquête. Le comte Ermenold si !
    Le prélat se drapa dans sa dignité. Le Saxon se borna à répondre, ce qui désarma l’évêque :
    — Donc, nous sommes bien d’accord : il en a la charge !
    Erwin réfléchissait encore aux différents enseignements de son entrevue avec Aaron tandis qu’il regagnait la résidence de la mission. Frébald, seigneur des Nibelung, l’y attendait.
    — Tu nous vois tous accablés par ce meurtre atroce, déclara-t-il après les politesses d’usage. Ce meurtre est d’autant plus calamiteux qu’il s’est produit au moment où vous, missi dominici, commenciez votre séjour en ce pays…
    — Voilà qui est intéressant ! nota Erwin.
    — … Alors que tout ne devrait être que festivités et réjouissances, c’est le sang et le deuil qui vous ont accueillis, suivis d’une enquête détestable… A dire vrai, nous ne sommes pas seulement affligés, mais inquiets : l’assassinat de Wadalde risque fort d’envenimer nos rapports déjà très tendus avec les Gérold.
    — Je le crains également… Cependant, aussi déplaisant que ce soit, il me faut revenir sur ces nombreux incidents, méfaits et affrontements qui vous opposent…
    — … des forfaits dont ils portent la responsabilité.
    — … Selon des informations que nous avons recueillies, un émissaire des Gérold aurait été chargé de rencontrer quelqu’un de ton entourage pour frayer la voie à une négociation et empêcher par là que la détérioration des relations entre les deux familles ne génère une catastrophe.
    — Elle est, hélas ! advenue.
    — Il pourrait, non moins hélas ! advenir bien pire… Bien ! Étais-tu au courant d’un projet de ce genre ? Serait-ce toi qui aurais eu la singulière idée de choisir pour une entrevue périlleuse un lieu d’aussi mauvaise réputation que ce Gué du diable ?
    — Je n’ai rien décidé concernant le principe même d’une entrevue, à plus forte raison rien quant à son lieu ! lança Frébald.
    — Difficile à admettre !
    — C’est pourtant ainsi. Les initiatives ont été prises par Malier, mon intendant. Je lui ai laissé toute la responsabilité de cette affaire… bien risquée ! La preuve !…
    — Et tu ne sais pas avec qui et comment il a discuté de tout cela !
    — Non, je n’en ai rien su et n’en ai voulu rien savoir.
    — Même pas, une fois l’entrevue décidée, qu’elle devait avoir lieu à ce gué, à un jour, à une heure fixés ?
    Le Saxon lança au seigneur des Nibelung un regard perçant.
    — Voilà qui est pour le moins singulier, dit-il.
    — Je ne voulais être engagé en aucune façon.
    — Donc, tu n’es même pas en connaissance du choix concernant la personne qui représenterait ta lignée, toi-même en somme, à une rencontre d’une telle importance ?
    — Si tant est que quelqu’un de chez moi y ait participé, il n’a pu se prévaloir de négocier en mon nom.
    Erwin hocha la tête avec un air sceptique.
    — N’espère pas me faire croire cela, dit-il à mi-voix.
    — Pourtant… Peut-être cela te semble-t-il étrange, mais si tu savais ce qu’ont été nos relations avec Isembard et les siens, depuis si longtemps, cela ne te paraîtrait pas si incroyable.
    L’abbé saxon frotta ses longues mains l’une contre l’autre.
    — Admettons… pour l’heure… concéda-t-il, et venons-en à l’enquête. Sans doute sais-tu déjà qu’elle a été confiée au comte d’Auxerre ?
    — Je l’ai appris, en effet, et je ne m’en félicite pas. Je n’ai aucune confiance en lui, ni en sa sagacité, ni en son impartialité, affirma Frébald.
    — Les investigations lui reviennent de droit !… Donc, ce matin,

Weitere Kostenlose Bücher