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Le guérisseur et la mort

Le guérisseur et la mort

Titel: Le guérisseur et la mort Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Caroline Roe
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deux quand on le peut.
     
    Quand Isaac quitta la maison de Romeu, il ne savait pas plus ce qu’il devait faire qu’à son arrivée. La logique l’avait entraîné assez loin mais, faute de connaissances plus précises, elle refusait de l’accompagner encore. En passant devant la maison de maître Pons, il se souvint que maîtresse Joana n’était toujours pas remise d’un mauvais rhume et il s’arrêta pour demander de ses nouvelles.
    — Je vais bien mieux, maître Isaac, lui dit-elle, mais vous avez l’air préoccupé et cela ne vous ressemble pas. Pouvons-nous faire quelque chose ?
    — Je suis préoccupé, en effet, mais à moins que vous réussissiez à me dire comment retrouver une personne qui n’a ni nom, ni visage, ni voix dont l’on se souvienne – une personne mauvaise, dois-je ajouter –, je ne vois pas comment vous pourriez me venir en aide, maîtresse Joana.
    — Vous voulez dire… comme retrouver les chenapans qui jettent des pierres aux oiseaux de ma cour et ont ainsi blessé ma cuisinière ? Il faut les traquer jusque dans leur repaire, comme un chasseur, et c’est ce que j’ai fait.
    — Cela convient peut-être à des garnements, mais comment retrouver quelqu’un de plus âgé et de plus malin ?
    — Il est difficile de trouver des gens plus intelligents que vous, maître Isaac.
    — Je vais tout de même essayer.
     
    — Où êtes-vous allé ? lui demanda Judith alors qu’il montait l’escalier. Un serviteur est venu dire que vous deviez rendre visite à son maître et qu’il vous attend toujours. J’étais inquiète, j’ai pensé que vous étiez malade.
    — Ne vous tourmentez pas. Si j’avais été malade, dit Isaac, on se serait empressé de venir vous l’annoncer : les mauvaises nouvelles, les gens en sont friands. Mais où est Yusuf ?
    — Ici, seigneur, dit le garçon. Nous nous préparions à dîner.
    — Dans ce cas, mange le plus vite possible et rends-toi chez Romeu. Raquel aura certainement besoin d’aide. Si tu apprends quoi que ce soit, préviens-moi aussitôt.
    — Je ne comprends pas pourquoi Raquel doit rester auprès de maîtresse Regina, remarqua Judith. Comment peut-elle être à nouveau malade ?
    — Il le faut, c’est tout. À présent, parlons de choses plus agréables, dit-il quand Jacinta déposa devant lui une assiette de poisson et du pain. Comment va mon fils ? Il dormait encore ce matin et je n’ai pas eu le plaisir de le voir.
    — Il est merveilleux ! affirma joyeusement Judith. Il a faim comme un ours et, tel un grand seigneur, dès qu’il a eu son content, il s’endort sur la table.
    — Il pleure tout le temps, remarqua Miriam.
    — Seulement quand il a faim, répondit sa mère. Tu faisais la même chose.
    — Je savais pas qu’il serait aussi bruyant. Les bébés sont tous comme ça ?
    — Ton petit frère a une voix particulièrement puissante, expliqua Isaac. Avec le temps, il apprendra à la modérer.
    Le médecin devisa ainsi pendant tout le dîner, s’efforçant de se consacrer à sa femme et à ses enfants, mangeant un peu et pensant sans cesse au comportement de maître Lucà.
    — Nathan a pas été à l’école ce matin, lança Miriam.
    — C’est pas vrai, répondit son jumeau.
    — Si, même que je t’ai pas vu dans la classe.
    — J’ai pas fait ça, protesta-t-il.
    — Alors qu’est-ce que tu faisais ?
    — Je… ça te regarde pas ce que je faisais. J’ai pas quitté l’école.
    — Pourquoi ne rien nous dire, Nathan ? demanda Isaac. Pourquoi les gens ne se défendent-ils pas quand on leur en donne l’occasion ?
    — Parce que personne me croirait et que maman dirait que je raconte des mensonges.
    — C’est parce que son ami Mossé se ferait punir s’il racontait ce qu’il a fait, oui, insista Miriam.
    — C’est parce qu’il est trop têtu, dit Judith qui posa sur son fils aîné un regard où l’affection se mêlait à l’exaspération.
    — Ces raisons me semblent toutes également valables, conclut Isaac. Quelle est la bonne, Nathan ?
    — Si tout le monde sait ce que je fais, pourquoi je le raconterais ? cria l’enfant qui sauta à bas de sa chaise et quitta la pièce en courant.
    Isaac finit de manger et se rendit dans son cabinet. Assis dans son fauteuil ouvragé, les mains sur les genoux, il tenta de chasser de son esprit toute pensée inopportune. Comment se faisait-il que les gens se comportent d’une manière apparemment si extraordinaire et

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