Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le guérisseur et la mort

Le guérisseur et la mort

Titel: Le guérisseur et la mort Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Caroline Roe
Vom Netzwerk:
vous pouvez faire ça ? Vous ne voyez pas, hein ? J’en suis sûr, vous êtes aveugle.
    — En effet, je ne vois pas, mais je suis assez intelligent pour savoir combien de doigts je brandis. Si tu faisais de même et me posais cette question, je ne pourrais te répondre à moins que tu me permettes de toucher ta main. Vois-tu, la nuit dernière, j’ai palpé ta tête et j’ai pu dire, aussi bien que n’importe quel homme doté de ses yeux, ce qui t’était arrivé. En as-tu une idée ?
    — Je me suis cogné.
    — Sais-tu comment ?
    — Non. Je suis tombé. La dame m’a dit que mes vêtements étaient tout trempés et elle m’a donné une chemise propre.
    — Quelle dame ?
    — La brune.
    — C’est ma fille et elle s’appelle Raquel. L’autre dame est la fille de Romeu, et son nom est Regina. Tu es ici dans la maison de Romeu. Ne connais-tu personne en ville ?
    — J’ai rencontré Yusuf, je le connais.
    — Tout le monde connaît Yusuf, dit Raquel.
    — Qu’est-ce qu’il m’est arrivé ?
    — Quelqu’un t’a frappé sur le crâne, probablement avec un gourdin. Ensuite on t’a jeté dans la rivière.
    — Papa, fit Raquel, c’est trop cruel…
    — Pourquoi il a fait ça ? dit Tomás. Je le connais ?
    — Je ne crois pas, mais tu l’as vu une fois. C’était par une nuit très noire, très pluvieuse, sous le pont.
    — Le jour où je suis arrivé à Gérone, dit l’enfant avec une lassitude soudaine. Je cherchais mon oncle. Je me suis mis à l’abri même si c’était tout boueux. Il m’a frappé, il m’a injurié et puis il a sorti son couteau. Ensuite il s’est sauvé.
    — Comment, comme un enfant ?
    — Non, c’était un jeune… un peu plus vieux que moi, plus vieux même que Yusuf. En tout cas, ce n’était pas un homme.
    — Tu n’as pas vu par où il s’en allait ?
    — Oh si ! À cause des éclairs. Il est parti en courant sur la route de Figueres. Ça m’a paru bizarre parce que je venais justement d’arriver par cette route et qu’il n’y avait rien dans le coin…
    — Papa, il s’est assoupi, dit Raquel.
    — Pauvre petit, il a travaillé dur pour nous. Quelle âme courageuse !
    — Va-t-il aller mieux ?
    — Je l’ignore, mais il y a des chances. As-tu remarqué ses yeux ? Présentaient-ils quelque signe étrange ?
    — Une pupille est un peu plus dilatée que l’autre.
    — Assure-toi qu’on ne le dérange pas. La chambre est-elle obscure ?
    — Oui, papa.
    — Nous devons veiller sur lui. Même s’il ne peut rien nous dire de plus, il mérite notre secours.
    Isaac descendit prudemment l’escalier. Le rez-de-chaussée de la maison était en grande partie occupé par l’atelier de Romeu.
    — Maître Romeu, appela-t-il d’une voix douce, êtes-vous là ?
    Une question superflue puisqu’il n’avait cessé de l’entendre à l’œuvre tandis qu’il posait le pied sur les marches étroites.
    — Je suis là, maître Isaac, répondit le menuisier. Que puis-je pour vous ?
    — J’étais au chevet de notre blessé. Il a repris un instant conscience et nous a raconté des choses d’un grand intérêt.
    — Vraiment ? Quand Regina est descendue, elle m’a dit qu’il ne se souvenait de rien.
    — Elle n’a pas eu, comme moi, l’occasion de parler avec maîtresse Pons. Celle-ci m’a dit que, quand on veut trouver une personne dont seuls les actes permettent de postuler l’existence, il faut la traquer jusque dans son repaire, comme un chasseur avec sa proie.
    — Je ne suis pas chasseur moi-même, mais j’avoue, en toute modestie, qu’enfant j’ai pris au piège quelques lapins. Je comprends sa méthode. Mais quel rapport y a-t-il avec nos problèmes ?
    — Le petit malade – il s’appelle Tomás – a vu le jeune messager s’en aller en courant sur la route de Figueres. Je pense qu’il a un endroit où se cacher, vivre même, dans une maison ou une ferme située non loin de là.
    — Il l’a vu après avoir reçu son coup sur la tête ?
    — Non, il l’a vu par cette nuit pluvieuse où maître Mordecai a pris le nouveau médicament qui aurait dû le tuer.
    — Et vous voulez que je le retrouve ?
    — Quelqu’un doit s’en charger.
    — Si je quitte ma maison, maître Isaac, je laisserai l’enfant et ma fille seuls, sans protection aucune. Je ne puis faire ça. J’hésite aussi à sortir par une telle chaleur.
    — Yusuf et ma fille seront également présents, mais il me vient une

Weitere Kostenlose Bücher