Le Japon
ce soit de plus en plus difficile à mesure que les navires prennent de la gîte, s’enflamment ou chavirent. Repérer le gros de la flotte japonaise, ce serait mieux, mais comment y parvenir dans la confusion générale ?
Les Japonais disposent de moyens considérables. Entourés par 2 cuirassés, 2 croiseurs lourds, 11 croiseurs légers, 11 destroyers, 3 sous-marins, 8 navires ravitailleurs, les 6 porte-avions de l’amiral Nagumo sont parvenus à moins de 400 km de la pointe nord d’Oahu. C’est de là que vers 6 h s’envole la première vague : 49 bombardiers chargés du bombardement horizontal, 40 avions lance-torpilles, 51 bombardiers en piqué, 43 chasseurs, soit 183 appareils. Une heure plus tard, envol de la deuxième vague : 168 appareils. Le commandement américain ignore tout, bien évidemment, de ces statistiques et des intentions des Japonais. « Je ne savais pas, admet Short, quel degré de gravité revêtirait l’attaque. S’ils prenaient un tel risque, ils pourraient aussi bien risquer un débarquement. » Le commentaire qui revient le plus souvent, dès la première surprise passée, tient en une phrase : « Ils nous ont surpris dans notre sommeil. » Short est « dans un état de confusion animée ». Kimmel est désemparé. En un mot, Pearl Harbor, c’est le k.o. au premier round.
Après un raid d’une heure et demie, les Japonais font demi-tour. Ils renoncent à obtenir davantage. Mission achevée, conclut Nagumo. Il est vrai que les pilotes s’apprêtaient à décoller une deuxième fois pour raser la base. L’amiral refuse de céder à l’enthousiasme. Certes, parmi les navires américains qui ont été frappés ne figurent pas les porte-avions de la flotte du Pacifique. Le hasard a voulu qu’ils ne se trouvent pas à Pearl Harbor ce jour-là. Les Japonais sont déçus. Mais Nagumo ne veut pas perdre de temps, attirer les représailles américaines et gaspiller les ressources de la Marine japonaise. Ne doit-elle pas, dans le même temps, lancer des offensivessur la Malaisie, l’Indochine, la Thaïlande, Singapour, Wake, Guam et Hong Kong ? Le gouvernement impérial attend d’elle des miracles. À quoi bon s’attarder dans les eaux hawaïennes, alors que le Japon a décidé de mener la guerre sur des milliers de kilomètres carrés ?
De leur côté, les Américains de Pearl Harbor s’efforcent de riposter. L’aviation fait porter ses recherches sur le sud, puis sur le nord. Trop tard. La coordination entre la Marine et l’Armée n’est pas excellente. De plus, on s’attend à une nouvelle attaque japonaise. Les deux ou trois sous-marins aperçus au large donnent à penser qu’une opération amphibie se prépare. Alors que les militaires éteignent les incendies, soignent les blessés, dégagent les morts, la panique gagne la population civile. De fausses nouvelles circulent : on aurait vu des parachutistes, des sous-marins, des avions de reconnaissance, des commandos. Ici et là, des sentinelles tirent à tort et à travers. La pagaille… Ce qui n’empêche pas des actes individuels d’héroïsme qui témoignent du sang-froid de quelques-uns. À la fin d’une journée qui ressemble à un cauchemar, l’heure du bilan a sonné. Morts immédiatement ou à la suite de leurs blessures : 2 403, y compris les disparus. Blessés : 1 178. La flotte a perdu 8 cuirassés, 3 croiseurs légers, 3 destroyers, 4 navires auxiliaires. Sur ces 18 bâtiments, 80 % seront remis en état ; la plupart, en outre, dataient de la Première Guerre mondiale, alors que la flotte commençait à se doter de bâtiments ultra-modernes comme les porte-avions. L’Aéronavale est privée de 13 chasseurs, 67 bombardiers, 3 avions de transport. L’aviation de l’Armée de Terre a perdu 4 forteresses volantes, 12 B18, 2 A20, 32 P40, 20 P36, 4 P26, 2 OA9. De plus, près de 150 appareils, des aérodromes et des installations diverses ont été endommagés. Du côté japonais, 29 appareils abattus, 1 sous-marin et 5 sous-marins de poche coulés. De quoi provoquer l’enthousiasme de l’état-major qui ne manque pas de proclamer sa satisfaction. Pearl Harbor, c’est l’heure de gloire de la Marine japonaise.
Il faut reconnaître que ce succès, les marins japonais l’ont préparé longuement et minutieusement. L’idée d’un raid sur Pearl Harbor revient à l’amiral Isoroku Yamamoto, le chef suprême de la flotte. Une idée folle, compte tenu
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