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Le Japon

Le Japon

Titel: Le Japon Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Collectif
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la crainte de la défaite, l’empereur autorise la guerre, et, par la suite, il s’enthousiasme à l’annonce des victoires, ce qui ne permet pas de douter de la connaissance qu’il a des dossiers, et qui correspond d’ailleurs tout à fait au sens scrupuleux des affaires de l’État qu’il montre en toute occasion. Placé devant une décision unanime du gouvernement ? celle de bombarder Pearl Harbor par exemple ?, Hiro-Hito, qui pourrait user de son droit de veto en refusant d’apposer son sceau, ratifie…
    Les gouvernements japonais d’après-guerre, les historiens, les journalistes répéteront souvent, tout comme l’empereur lui-même, que les années de conflit ont représenté un cauchemar pour Hiro-Hito. C’est peut-être vrai, mais surtout à partir de 1944, lorsque, de place en place, s’amorce la lente reconquête par les Américains des îles du Pacifique, jusqu’à la prise d’Okinawa en avril 1945. Et quand, après les terribles bombardements américains sur Tokyo du 9 mars 1945, où sont déversées enune seule nuit 700 000 bombes, faisant 200 000 victimes, Hiro-Hito visite les quartiers dévastés de la capitale, il ne peut que se rendre compte que la guerre est perdue. En effet, le 6 août, le feu nucléaire atomise Hiroshima. Le 8, Staline déclare la guerre au Japon et, sans coup férir, envahit la Corée du Nord, la Sakhaline et les Kouriles. Le 9, une seconde bombe atomique tombe sur Nagasaki.
    Dans la nuit du 9 au 10 août, dans le bunker surchauffé du palais, se déroule une réunion dramatique entre Hiro-Hito, alors âgé de quarante-quatre ans, et ses ministres : certains sont prêts à accepter les conditions des Alliés et à arrêter les combats ; d’autres, craignant pour la survie de la dynastie impériale et la structure nationale, préfèrent poursuivre les opérations sur l’Archipel plutôt que de connaître pour la première fois le joug d’une présence étrangère.
    Finalement, à deux heures du matin, l’amiral Suzuki, Premier ministre octogénaire, s’approche de l’empereur, et, un genou à terre, le supplie de trancher entre les deux parties. Hiro-Hito annonce alors qu’il accepte la reddition sans condition, mettant ainsi fin à quatre ans de guerre. Malgré les sanglots de l’assistance, tout est dit. L’aventure impérialiste dans laquelle la nation s’est engagée depuis les années 1930 prend fin avec la décision impériale à laquelle tous se soumettent.
    Le 15 août, pour la première fois dans l’histoire, le « fils du ciel » s’adresse à ses sujets par le biais de la radio pour annoncer, d’une voix chevrotante et dans une langue archaïque, la reddition de l’empire. Akira Kurosawa, alors jeune cinéaste, note : « Jamais je n’oublierai les scènes que j’ai vues dans les rues ce jour-là. […] L’atmosphère était tendue, frôlait la panique. Certains commerçants avaient sorti leurs sabres de leur fourreau et lescontemplaient fixement 59 . » Quant à Robert Guillain, correspondant de l’agence Havas au Japon, il écrit : « Les gens se raidissaient et baissaient la tête. C’est l’attitude du respect en présence du souverain. Mais elle a ceci d’inattendu que l’objet de leur respect angoissé est le poste de radio lui-même. Un silence… Et puis voici la voix rauque, lente, trop posée. […] Le souverain parle l’extraordinaire et solennel langage réservé au seul fils du ciel. […] Quand le speaker vient ensuite expliquer ce que l’empereur veut dire, les sanglots éclatent, les rangs se rompent en désordre. Quelque chose d’énorme vient de casser : le rêve orgueilleux du Grand Japon 60 . »
    L’heure est venue, annonce en effet l’empereur, « d’accepter l’inacceptable, de supporter l’insupportable » ? mais, comme le note Robert Guillain, les mots « défaite » et « capitulation » ne sont jamais prononcés. Puis, après avoir déclaré qu’il se pliait aux termes de la déclaration conjointe des Alliés, Hiro-Hito ajoute : « L’ennemi a commencé à faire usage d’une bombe nouvelle et des plus cruelles, répandant sans cesse sur les populations innocentes les blessures et le massacre. Dans ces conditions, continuer la guerre serait non seulement amener l’anéantissement de notre nation, mais aussi la destruction de la civilisation humaine. »
    Au cours des heures qui suivent le discours du souverain à la nation, nombreux sont ceux qui viennent

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