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Le jour des reines

Le jour des reines

Titel: Le jour des reines Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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des manigances du roi, Lionel me trahit pour hâter sa fortune… Cette nuit, je serai des vôtres… à moins que je ne me sente trop épiée… auquel cas, je m’enfuirai après-demain.
    Les joues de Tancrède s’étaient empourprées. Ogier saisit sa main. Elle tremblait. Cette frayeur entra en lui comme un poignard.
    — Il faut que nous partions, cousine, cette nuit.
    — Que je vous rejoigne ou non cette nuit, je te promets d’être parmi vous à Sandwich…
    — Nous serons pris : nous n’avons ni sauf-conduit ni logis où t’attendre.
    — Gagnez Sandwich à franc étrier. Allez chez John Maidland : il est tonnelier, près de l’église. C’est lui qui fournit Dartford en barriques et futailles… Il a épousé Mary, une servante du château. Lionel s’opposait fermement à ce mariage ; j’ai plaidé la cause de la petite. John me doit gratitude et vous protégera…
    Ils gravirent la berge du ruisseau. Sitôt qu’ils eurent fait quelques pas, Ogier scruta les arbres et les fourrés du côté de la maison forestière.
    — Ils doivent être au lit, maintenant, dit Tancrède.
    — Connais-tu cette femme ?
    — Je ne tiens pas à la connaître, mais j’enrage, cousin, que tu ne puisses affronter ce garnement [215] pour l’occire.
    — Si j’y parvenais, comment serais-je récompensé ?
    Tancrède baissa le front. Ogier conçut qu’elle refusait de s’engager hors des limites de la simple parenté. Elle ne devait pas craindre, cependant, les exigences du dévouement auquel, moqueur, il faisait allusion.
    — Selon tes vœux, dit-elle enfin, très lentement.
     
    *
     
    Ils s’étaient enfoncés au plus profond des arbres, entraînant les chevaux sur le faîte d’une colline d’où l’on distinguait la forteresse d’Ashby, le toit de la maison forestière, la lice où les archers rivalisaient d’adresse.
    — Crois-tu qu’ils nous trouveront ici ?
    — Non, Jack. Et s’ils flairent notre présence, nous les verrons venir et descendrons vers cette plaine, là-bas… Une forêt moutonne un peu plus loin…
    Ogier n’osa confier à son compagnon que, pour lui, cette journée bien entamée serait d’une longueur exténuante.
    — Quand la nuit viendra, Jack, tu emmèneras notre cavalerie à proximité des portes du château. Tancrède t’y rejoindra avec son Bucéphale. Je gagnerai pendant ce temps le val aux prisonniers. Une fois libres, je guiderai mon oncle et l’autre chevalier.
    — Qui, déjà ?
    — Étienne de Barbeyrac… un nom qui fleure la langue d’oc.
    — Dire que sans la trahison d’Élisabeth, nous ne serions pas inquisités [216]  !
    Ogier restait debout, regardant fixement ce château dont la massiveté abritait toutes sortes d’agitations dans ses chambres obscures.
    — Oublie cette femme… et ne prends pas cet air empêtré.
    — Comment ?… Si je l’aperçois, je la perce d’une sagette. En attendant, il me plairait que Ferris la reprenne… s’il est présent… Et si j’ai l’air empêtré, c’est par regret de ne pouvoir bouger.
    Shirton n’irait plus errer parmi les tentes et le long des barrières. Il en avait gros sur le cœur : Lisbeth avait changé l’anachorète en cénobite. Bientôt, peut-être, l’archer se referait ermite.
    — Crois-tu en notre réussite ?
    — Maigrement, Ogier, mais j’y crois tout de même. Dieu nous assistera.
    — Nous réussirons, l’ami, tu verras ! Aussi vrai que mon nom est Ogier d’Argouges.
    Peu après qu’il se fut séparé de Tancrède, les cloches d’Ashby avaient sonné longtemps, et les gens avaient cherché dans le ciel quelques fumées incendiaires. Ils se méprenaient. Soudain, des hérauts à cheval s’étaient répandus aux abords de la forteresse, dans les campements et jusqu’au village, sans doute, afin de publier dans les deux langues que des malandrins – un archer, Aster, et un Franklin évadé du château de Winslow – devaient être appréhendés et conduits au roi, lequel guerdonnerait [217] tous ceux qui auraient permis leur capture.
    — Mes compères et adversaires savent que je suis venu, dit Shirton tout en suçaillant un brin d’herbe. Si l’un d’eux me trahit, j’en serai informé. J’en ferai un nouveau saint Sébastien.
    — Nul ne sait où nous sommes, Jack, pas même Tancrède. Aucun manant, aucun prud’homme ne quittera la lice ou son pavillon pour partir à notre recherche.
    Ogier s’approcha de la cage de Tom. Il l’avait

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