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Le jour des reines

Le jour des reines

Titel: Le jour des reines Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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poursuivre, messire ! hurla Cobham invisible derrière la croupe de l’animal.
    Le cheval fit un bond. Ogier se sentit heurté au plastron. Trois coups, sans doute, dont la rafale l’ébranla. Les capitaines applaudirent. Il s’ensuivit une brassée de taillants forcenés, tous détournés, repoussés par l’un et par l’autre, vols de lames obstinés comme ceux des guêpes au-dessus des fruits et des fleurs. Des heurts d’acier jeteurs de frissons détestables, mais incapables d’aboutir à la moindre blessure. Russell Chalk hurla : « Ho ! » sans doute avec malignité car Cobham gisait à terre nullement à cause d’une estocade, mais parce qu’il avait glissé.
    — Relevez-vous, messire, et rendez grâce à Dieu !… Voilà, en vérité, un Ho d’excellente convenance !
    Le capitaine Offrey demanda de pouvoir relever son ami. Sans avoir reçu l’approbation du maréchal de lice, mais se fiant à celle de ses voisins, il se glissa sous la barrière et releva Cobham. Non content d’avoir dérogé à toutes les règles en vigueur lors de ces sortes d’affaires, il s’approcha de Chalk, prit son cheval au frein et d’une voix fleurant le commandement demanda si l’appelant pouvait changer le haut de son armure. Ce fut Ogier qui prit le parti de répondre alors que Barbeyrac lui tendait son poignard :
    — Non, messire… À Sangatte, nul fer ne me couvrait le corps. Votre compère s’est acharné sur moi. Vous me voyez déjà plein de mansuétude à son égard. Trop c’est trop !… Qu’il tire son poignard et continue, puisqu’il a déterminé dans son défi – si la mémoire ne me fait point défaut – : sans changer de harnois.
    Offrey dit quelques mots à l’intention de Cobham tandis que le maréchal de lice guidait son destrier le long de la barrière. L’Anglais revint parmi ses pairs, et profitant de tous ces mouvements, Cobham se précipita.
    Ogier, méfiant, avait dégainé son arme ; il en jeta le fourreau à la face de l’Anglais qui arrivait sur lui, dague basse.
    — Holà ! prenez garde à la chute !… Feriez mieux d’ôter votre coiffe : vous y verriez autant que moi !
    Exaspéré, Cobham manqua son coup : Ogier sentit l’acier riper sa tassette gauche et se reculant, saisit l’homme par son colletin. Cobham se débattit, se dégagea et reçut sur son bras une taillade qui le fit hurler moins de douleur que de rage. Dès lors, saisissant le bras armé de son adversaire, et bien que le fer lui interdît une bonne prise, Ogier n’eut de cesse de jeter l’Anglais au sol. Il se débattit bien. S’il se raffermissait sur ses jambes, il devait peu à peu étouffer sous son heaume. Bientôt, il fléchirait des jarrets.
    — Tu ne m’auras pas, truand de France !
    — C’est ce qu’on verra.
    Ogier voulait et pouvait désarmer cet Anglais !… Un brouillard de rage obscurcissait ses yeux et son sang lui heurtait les tempes. Soudain, il sentit venir le croc-en-jambe et ne put éviter de choir en arrière. Un immense hurlement salua la prouesse.
    « Le désavantage est pour moi ! »
    Sueurs froides, bourdonnements d’oreilles ; le cœur qui grossit, grossit ; les jambes qui patouillent, mais rester sur le dos, défier l’adversaire : à l’épée, il eût vécu ses derniers moments ; à la dague non : pour le frapper Cobham devait se courber.
    D’un ciseau des jambes, Ogier fit choir son rival si lourdement de côté que sa dextre se trouva coincée sous son armure. Non : il ne s’était pas donné une entorse au poignet ! Il s’agenouillait ! Ogier le reçut sur son corps, s’en dégagea d’un tour de reins et fut sur lui. Dès lors, en s’étreignant autant qu’ils le pouvaient, ils roulèrent l’un sur l’autre, fournissant alternativement des coups dont aucun ne portait.
    Leur faim de mort était sauvage, frénétique. Leurs armures parfois s’accrochaient par les cubitières ou les oreillons de leurs genouillères. Ils se tordaient, frappaient, s’acharnaient à frapper. Cobham, libérant sa senestre, rabattit la ventaille du bassinet d’Ogier, le plongeant dans l’ombre et l’indécision. La sueur, la terre humide avaient fait de la prise de son arme une chose glissante et comme spongieuse. Il sentit une pointe froide, irrésistible, pénétrer sous son aisselle, appuyer, appuyer.
    Il était touché !
    Un coup de reins le débarrassa de Cobham. Ce fut à ce moment qu’un « Ho ! » retentit. Le public trop

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