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Le lacrima Christi

Le lacrima Christi

Titel: Le lacrima Christi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: C.L. Grace
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répondit-il avec aigreur, pas de ce que font les grands !
    L'apothicaire gagna la grande salle aux solides poutres drapées de bannières arborant les armes d'Angleterre et de France, ainsi que celles des Maltravers et des Redvers.
    Des peintures, des icônes et des crucifix ornaient aussi les murs chaulés de cette longue salle propre et voûtée. Elle s'enorgueillissait d'une estrade à un bout, d'une galerie pour les musiciens et d'un lourd pupitre de chêne d'où poètes et chanteurs ambulants pouvaient distraire la maisonnée. Les hautes fenêtres étaient garnies de verre, le sol dallé lavé et récuré. Des valets disposaient des tables sur tréteaux et des bancs tout en chassant les chiens excités par des effluves de viandes tout juste rôties, d'épices et de sauces qui s'échappaient des cuisines proches. L'ordre régnait malgré les aboiements des bêtes et le cliquetis des plats. Les serviteurs regardèrent Kathryn de travers et elle allait sortir quand l'un d'entre eux la tira par la manche.
    — Êtes-vous médecin, Maîtresse ? Je suis Hockley.
    Un sourire édenté fendit son visage buriné.
    — J'ai ouï dire que vous étiez un mire, une apothicaire, n'est-ce pas ?
    — Certains le prétendent, répondit Kathryn en souriant.
    Pourquoi, êtes-vous malade ?
    — Nous avons nos misères, Maîtresse, observa Hockley en se dandinant. Lady Elizabeth nous a ordonné de ne pas quitter le château. Et il se peut que frère Ralph, l'infirmier, ne revienne pas, après ce qui est arrivé à Sir Walter. Nous avons pensé...
    La voix lui manqua.
    — Écoutez, suggéra Kathryn, vous connaissez le petit réfectoire où se tient le guet de nuit ?
    L'homme acquiesça.
    — Et disposez-vous d'un coffre d'apothicaire ?

    Kathryn fut entraînée dans le couloir et conduite avec tous les honneurs dus à une reine jusqu'à la pièce où elle s'était entretenue avec Gurnell la veille. On apporta sur- le-champ un coffret d'orme. Elle souleva le couvercle et constata qu'il était bien pourvu.
    — J'aurai besoin d'un peu de vin, de celui dont vous vous servez pour la cuisine, déclara-t-elle, ainsi que de miel, de sel et d'une cuvette d'eau chaude. Oh, de linges et d'un couteau aussi !
    Elle se demandait si son projet agréerait à la châtelaine mais, après tout, ce serait une façon de remercier la maisonnée pour son hospitalité. Elle fut bientôt toute à sa tâche. Quelques valets s'étaient brûlés pendant l'incendie.
    Elle lava et désinfecta les plaies, amalgama miel, vin et sel, et banda avec douceur les blessures. Thurston surgit et la regarda faire quelques instants mais ne souleva pas d'objections. Une servante souffrait de catarrhe avec écoulement de mucus et inflammation de la gorge et du nez. Kathryn lui apprit à se gargariser avec un mélange d'eau salée et de chèvrefeuille. Elle appliqua de la tige de poireau sur un ulcère à la jambe et fabriqua une attelle improvisée pour maintenir un poignet foulé. La plupart des maux étaient bénins, des coliques par exemple, pour lesquels elle se contenta de donner des conseils sur ce qu'on pouvait manger et ce qu'on devait éviter. Elle recommanda à l'un des palefreniers qui se plaignait de violentes douleurs d'aller voir le père Cuthbert à l'hospice des Prêtres Indigents de Cantorbéry. Personne ne s'opposa à son travail et elle se demanda si ses patients n'avaient pas davantage envie de la rencontrer que de se faire soigner. Elle eut fini vers midi et pria Hockley, qui avait rempli le rôle d'assistant, de bien vouloir regarnir le coffre et de nettoyer la table. Quelques valets voulurent la payer, mais elle secoua la tête et les avertit qu'elle n'accepterait de paiement ni en argent ni en nature.
    La nouvelle se répandit sans tarder et quand enfin elle reprit son inspection du manoir, elle fut accueillie, malgré l'atmosphère funèbre grandissante, par de petits saluts et des sourires. La plupart des tableaux étaient à présent tendus de noir. Même les tables et les chaires avaient été ornées d'une fine batiste noire. Là où c'était possible, on avait éteint les chandelles et les lumignons et ouvert les fenêtres, vieille tradition destinée à permettre à l'âme du trépassé d'entreprendre plus facilement son retour à Dieu.
    Un jeûne funèbre avait été décrété : un seul repas par jour, à midi.
    Mais Kathryn n'avait pas faim et était bien décidée à continuer son enquête. Quelques chambres étaient fermées, en revanche

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