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Le lever du soleil

Le lever du soleil

Titel: Le lever du soleil Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Dufreigne
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n'aimait pas être roi comme cela, voilà ; il n'aimait pas que Maman s'incline en entrant dans sa chambre, il n'aimait rien, ni les mots ni l'état, il n'aimait pas cet éloignement mental qui les séparait désormais, bien qu'il sentît toujours l'affection présente, et qu'ils prissent leur bain ensemble. Mais déjà, sans Féfé, le turbulent, l'éclabousseur, comme autrefois. S'il savait lire sans ‚non-ner et écrire avec moins de maladresse, Louis appelait encore Philippe Féfé, comme il avait traduit en babil de bambin, naguère, le mot frère.
    Seul par la faute d'un siège vide en ce Parlement, que devait-il dire à ces étranges personnages recouverts de rouge et d'hermine et qu'il détestait déjà ? Car, il le sentait, ces gens se permettaient de le jauger. De quel droit ? Il allait grandir, alors ils verraient !
    Sa mère d'un léger mouvement du dos lui enjoignait de se tenir droit, il se raidit. Un piquet harnaché de violet et de lilas.
    Mais qu'ai-je donc à faire ici ? Du thé‚tre, peut-être.
    Ecouter que ces messieurs acceptent de proclamer Maman régente jusqu'à sa majorité et sur sa propre proposition, au nom du feu Roi son père, proposition qu'il avait déclamée haut et clair.
    Bon. Et que le Parlement brise le testament de Papa, auquel il ne comprenait goutte mais qui disait-on - un enfant entend tout -
    partageait les pouvoirs qui ne devaient appartenir qu'à un seul, f˚t-il une... Mais qu'importe... Si cela était pour Maman, il l'ac-complirait fièrement.
    Il n'eut que quatre mots à dire en plus, et il le fit sans hésitation, regardant du haut de son trône surélevé de trois marches o˘ l'installèrent, non sa mère, car on n'était plus en famille mais en représentation royale, le duc de Joyeuse, grand chambellan, et le duc de Charost, capitaine des gardes du corps, un honneur plus qu'un commandement. La voix claire mais émue, Louis ne lança que cette phrase : " Messieurs, je vous suis venu voir pour vous témoigner mes affections ; Monsieur le Chancelier vous dira le reste. "
    M. Séguier dit donc le reste ; en son nom. Au nom du jeune Roi, ce hyacinthe violet en son pot qui était aussi un trône.
    La Reine souriait. L'‚me damnée du Cardinal, ce chancelier qui avait osé fouiller en son corsage, mais à qui elle avait su pardonner sans oublier, lut tout ce qui était contraire à la volonté de feu Richelieu dictée à la main du feu Roi. La Régente rendait le droit de remontrance au Parlement, quitte à s'en ficher plus tard, et en échange ces messieurs cramoisis et rehaussés d'hermine anéanti-rent les dernières volontés de Louis XILI et accordèrent, séance tenante, séance tenue, " l'administration libre, absolue et entière des affaires du royaume " à la Reine Régente Anne de France.
    Gaston ne dit rien, ni Henri, prince de Condé. Le premier était lieutenant général du Royaume, le second ajoutait, à son gouvernement de Bourgogne, celui d'Auvergne ôté à sa famille après la conspiration du pauvre étourneau de Cinq-Mars. Anne d'Autriche avait appris de Richelieu que ce qu'on ne pouvait convaincre on pouvait l'acheter. La Régente avait fait son marché.
    Louis, quittant peu sa mère sinon pour certaines leçons, avait été le témoin silencieux de maintes tractations. Ils les avaient vus défiler devant la Régente, avec ou sans Mazarin, ceux qui aujourd'hui en ce dimanche de mai formaient le plus prestigieux des parterres de lilas et violettes de France. Ils réclamaient. Le regard vert de la Régente leur fit comprendre, sensation non raisonnée de l'enfant qu'il était, qu'il leur valait mieux, sinon quémander, du moins solliciter.
    Louis se tenait coi en ces moments-là. Emportés par leur rapacité, ils oubliaient être en présence de leur Roi. Lui se promettait de ne l'oublier jamais, et leurs hautes figures, leurs grands noms se gravaient en sa mémoire d'enfant.
    L'oncle Gaston, aux yeux doux et sombres, le fils que Grand-Mère, la reine Marie, avait préféré à Louis XILI, et qui de cet amour n'avait su tirer que la trahison de ses amis. Sa fille Mademoiselle, qui n'épouserait jamais qu'une tête couronnée, clairon-nait déjà et regardait, avec un appétit de pie-grièche devant un étourneau rondelet, ce cousin enfant roi, qui lui siérait. Elle a seize ans, mais qu'importe l'‚ge dans le mariage. A côté de son père Gaston, cette Mademoiselle fait figure, par son maintien, l'arrogance de son chapeau, de chef de famille. Et

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