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Le lever du soleil

Le lever du soleil

Titel: Le lever du soleil Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Dufreigne
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régner !
    Guénaud va voir Vallot et Vautier. Ils discutent, sont sérieux, il n'est qu'une audace, un risque à prendre, il peut tuer le Roi mais le Roi déjà se meurt. On mêle trois onces de vin, de l'antimoine et une tisane laxative. On l'administre au malade.
    Il crie. Il souffre. Il vomit vingt-deux fois, soutenu par dame Perrette et la marquise de Sénecey, chacune tenant un bras du malade couvert de sueur. Une matière séreuse et verd‚tre sort du corps meurtri et amaigri. Enfin il repose.
    Le lendemain, après une nuit o˘ il dort sans r‚ler, nouveaux vomissements.
    - L'antimoine est un poison, confie Guénaud encore inquiet, mais ce poison fait sortir le mal quand il est bien dosé.
    Il tait qu'il espère que les trois mesures étaient la bonne mesure.
    Le Roi vomit, devant sa mère et les deux femmes qui éclairèrent son enfance, une grande quantité de bile jaune comme du miel mêlée de filaments glaireux qui semblent pourries.
    Il s'écroule sur les oreillers, saisit une main qui touche son front, pense que c'est celle de sa mère, la baise, ouvre les yeux pour rencontrer le regard de Mme de Sénecey :
    - Veillerez-vous donc, Madame, toujours à ma sauvegarde ?
    - Oui, Sire.
    Le Roi s'endort, il est guéri. Le lendemain il veut savoir ce qui s'est passé dedans Paris pendant qu'il se mourait :
    - qui a souri, qui a conspiré, qui a pleuré ?
    Dame Perrette se tait, la Reine détourne la tête. Mme de Sénecey s'avance :
    - Mlle Marie Mancini, la cadette, a pleuré chaque jour quand souffrait Votre Majesté.
    - Marie?
    - Oui, Sire, Marie Mancini.
    - Merci, Madame. Et mon frère ?
    La Reine s'avance et, bonne mère, le prend dans ses bras et lui conseille de reposer, le berce et le dorlote, fredonne un air castil-

    lan. Louis ne dit rien. Il se laisse aller dans ces bras de velours noir. Il y est bien. Il sait aussi que Marie l'aime vraiment. C'était la nouvelle à le remettre sur pied. Le frère ? quelle importance puisque le voilà guéri. Doit-on se venger quand on le peut si facilement qu'il suffît d'ordonner ? Le Roi oublie Philippe et son Guiche et ses perruches. Il regarde ces trois femmes près de lui, qui depuis sa naissance n'ont cessé selon leurs talents de veiller sur lui. A-t-il été ingrat envers elles ? oui. Le sera-t-il encore ?
    certainement. Lui pardonneront-elles ? la belle question, qu'elles ne songent pas à se poser... Il demande aux trois de l'embrasser ; Mme de Sénecey le fait sur sa bouche, qu'il sait puer le vomi.
    Il a un saut du cúur en sa poitrine, c'est elle, cette gouvernante d'autrefois, elle qui a osé prononcer le nom tant chéri de Marie, elle qui savait ce que le Roi attendait, le Roi ou le jeune homme épris ? Elle au visage si fin, trop fin, et dont la beauté se fane avec gr‚ce, elle a tout compris. Et il chuchote, ses lèvres à un doigt des siennes :
    - Je sais aujourd'hui que je vous aime toujours, Madame.
    - Moi aussi... Louis.
    Le prénom tout simple, de simple homme, fut, par une folle audace que seule peut permettre la passion, abandonné dans un souffle. Il lui a semblé l'entendre prononcé par Marie. Il lui demandera de le dire ainsi.
    - Merci de votre amour, Marie... Catherine.
    La marquise frissonne sous la plus tendre des espiègleries.
    On se retrouva à Compiègne. La Reine annonça que durant la maladie de son fils elle avait fait vúu devant le saint sacrement de consacrer désormais toutes ses forces à la Paix. La maladie du Roi aux armées était pour la fervente Espagnole un signe de Dieu.
    Mieux valait qu'il danse plutôt qu'il combatte ! qu'il danse donc ses ballets avec la petite " Manchine " ; décidément les Français ne voudront jamais prononcer convenablement un nom étranger.
    Voici la Manchine après le Bouquinquant !
    Louis dansa sur son thé‚tre qu'il aimait tant. Louis subit Nico-mède de Corneille, b‚illa quand Marie s'enthousiasmait et débitait des vers à mi-voix. Mais alors, à la fin de la tragédie, fort bien jouée au demeurant, le chef de troupe s'avança et déclara :
    - Nous prions Vos Majestés de nous accorder un moment. En l'honneur de la santé du Roi qui a vaincu la maladie autant qu'il a vaincu l'ennemi, qu'on nous permette céans de présenter quelque acte de comédie, Le Docteur amoureux, qui amusa de fort honnêtes personnes en province.
    Le Roi fit signe qu'il acceptait.
    Dix minutes après le Roi et la Cour, et Marie qui était maintenant le baromètre des plaisirs de Sa Majesté, riaient aux

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