Le livre du cercle
groupe.
Il
pensa au sort de son père, que ces hommes avaient eu entre leurs mains, et aux
craintes d’Everard qu’il avait apaisées avec tant d’assurance. Il pensa aussi à
Elwen. Son visage occupait toutes ses pensées et il prit la décision de
survivre, quoi qu’il arrive cette nuit. Cependant, à mesure que la distance
entre la compagnie et la petite armée mamelouke dans la cathédrale se
réduisait, son esprit lui répétait que seul un idiot pouvait prêter un tel
serment.
Lorsque
les chevaliers approchèrent de la cathédrale, un groupe de sept Mamelouks vint
au galop à leur rencontre. À leur tête se trouvait un grand officier vêtu des
robes et de l’armure d’un homme de rang. Les Mamelouks s’arrêtèrent à quelque
distance et l’officier mit pied à terre. La troupe de Will fit halte à son tour
et il s’approcha d’eux en marchant.
— Nous
sommes pris au piège, dit l’un des Templiers en se retournant pour regarder la
ligne de Mamelouks qui leur coupait toute retraite à une quinzaine ou une
vingtaine de mètres à l’arrière.
Will
descendit de cheval et ouvrit la sacoche.
— As
salam alaykoum, (Que la paix soit avec toi.) lança Will à l’homme qui lui
faisait face, en espérant que ses années passées à traduire des traités arabes
rendaient son vocabulaire compréhensible. Mon nom est William Campbell, je suis
venu rencontrer le sultan Baybars de la part du prince Édouard d’Angleterre et
du gouvernement d’Acre.
L’homme
sourit en entendant l’étrange accent de Will, mais son amusement semblait
bienveillant plutôt que moqueur.
— Wa
alaykoum salam, (Avec toi également.) William Campbell, répondit-il en parlant
lentement pour que Will le comprenne. Je suis l’émir Kalawun. Avez-vous le
traité ?
Voyant
que Will ne comprenait pas, il répéta une deuxième fois.
— Je
l’ai, finit par répondre Will en l’observant avec attention.
— Venez
avec moi. Vos hommes peuvent rester ici.
— Que
dit-il ? demanda l’un des gardes d’Édouard.
Will
leur répéta les propos de Kalawun.
— Non,
fit Robert en secouant énergiquement la tête. Dis-lui que c’est inacceptable.
Nous devons venir avec toi.
Will
ne détournait pas les yeux de Kalawun. Bien que doté d’un physique
impressionnant, le commandant mamelouk respirait la modération et une
intelligence subtile émanait de ses yeux bruns. Un diplomate dans le corps d’un
guerrier, pensa Will. Le mélange lui parut intéressant.
— Tout
va bien, dit-il aux hommes. J’irai seul. Je ne crois pas que nous ayons le
choix.
Will
s’avança et Kalawun leva la main.
— Vous
devez déposer votre épée.
Will
hésita, puis il dénoua sa ceinture et posa le fauchon dans la poussière.
— Avancez
vers moi, ordonna Kalawun d’une voix calme. Levez les bras.
Il
passa les mains le long des côtes et des hanches de Will, à la recherche d’une
arme cachée.
— Vous
avez connu mon père, dit Will tandis que Kalawun fouillait une de ses manches.
James Campbell. Everard de Troyes m’a parlé de vous.
Kalawun
s’arrêta, les mains fermées autour du poignet de Will. Il jeta un regard aux
Bahrites derrière lui, mais ils étaient trop loin pour entendre.
— Je
ne peux pas prétendre l’avoir vraiment connu, dit-il en inspectant l’autre
manche. Nous ne nous sommes jamais rencontrés. Ç’aurait été trop dangereux pour
moi. Mais j’ai l’impression de savoir quel genre d’homme il était.
— Je
continue le travail de mon père, dit Will dans un souffle.
— Alors
peut-être nous reverrons-nous, William Campbell.
Il
allait se retourner mais il s’interrompit.
— Soyez
prudent, murmura-t-il. Le sultan Baybars ne porte pas votre peuple dans son
cœur, en particulier votre Ordre, et il se tient sur ses gardes à cause d’une
récente tentative de meurtre des Assassins. Un attentat dont il tient les
Francs pour responsables. Ne faites aucun geste brusque et ne parlez que s’il
vous adresse la parole. Ses gardes ont ordre de vous tuer s’ils vous
soupçonnent de quoi que ce soit.
Will
eut l’impression de sentir ses tripes bouillonner étrangement tandis qu’il
marchait avec Kalawun le long de l’avenue. Ils entrèrent dans le camp éclairé
par des torches, passant des nuées et des nuées d’hommes et de bannières
arborant des croissants de lune et des étoiles. La croix rouge flamboyante de
son manteau semblait commander à tous les yeux de se tourner vers lui, le
démarquant
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