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Le Lys Et La Pourpre

Le Lys Et La Pourpre

Titel: Le Lys Et La Pourpre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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département. Là-dessus, fort impressionnés
par la gravité de ma mine, ils acquiescèrent, et je demandai à Franz de leur
montrer leurs chambres où ils pourraient à leur choix demeurer ou nous
rejoindre dans la librairie.
    Mon père fit passer par Franz le même ordre de confinement à
tout le domestique, et pour plus de sûreté, fit verrouiller côté cour la porte
cochère et la porte piétonne qui donnait sur la rue du Champ Fleuri et, côté
jardin, il verrouilla aussi la petite porte basse au fond du potager. Puis il
commanda à Franz de faire allumer le feu dans la cheminée de ma chambre,
puisque je devais y coucher le soir. Soit hasard, soit parce qu’il y mit un
brin de malice, Franz chargea de ce soin Jeannette, que je croisai dans
l’escalier assez obscur de l’hôtel, soufflant fort à porter les bûches, mais me
lançant au passage un sourire et une œillade qui illuminèrent les murs sombres
et qui me ramenturent que ce monde tracasseux que je craignais de quitter le lendemain
dans la fureur des armes comptait aussi quelques émerveillables antidotes à
l’angoisse du moment.
    Comme j’avais donné à La Barge et à Charpentier la liberté
d’user de la librairie, mon père ordonna qu’on amenât Hörner, le chef des
Suisses, dans sa chambre où lui-même et La Surie viendraient me rejoindre,
Mariette nous apportant incontinent un flacon, quatre gobelets et quelques
grignotis pour nous faire prendre patience, onze heures étant déjà passées,
tant est que nous ne pourrions prendre notre dîner qu’à midi. Le chef des
Suisses, ou comme ses frères d’armes l’appelaient, « le capitaine »,
était une montagne d’homme, haut de plus de six pieds, large comme une armoire,
et lourd à faire craquer toutes les marches de notre escalier. Mais il parlait d’une
voix basse et polie qui rendait son entretien agréable.
    — Monsieur le Comte, dit-il après m’avoir ouï, si je
vous entends bien, pour vous rendre à Fleury en Bière, vous voudriez porter votre
escorte de douze à vingt-quatre soldats. C’est donc que vous craignez plus
d’embûches sur ce chemin-là que sur celui qui mène à Montfort l’Amaury.
    — Pour ne rien vous celer, oui.
    — Et sans vouloir me montrer trop inquisitif,
pourriez-vous me dire, Monsieur le Comte, à qui nous pourrions avoir
affaire ?
    J’interrogeai mon père et La Surie de l’œil.
    — Mon fils, dit mon père, désirez-vous que je réponde
pour vous ? Si ma réponse est indiscrète, on ne pourra vous reprocher de
l’avoir faite.
    — Plaise à vous, Monsieur mon père, dis-je avec un
sourire.
    — Capitaine, dit le marquis de Siorac, le comte
d’Orbieu pourrait avoir affaire à des gentilshommes et même à des soldats, mais
ceux-là ne seront pas des soldats de Sa Majesté. Je dirais même qu’à supposer
que nous tombions dans une embûche, les soldats du roi, passant à proximité, ne
pourraient que nous secourir.
    — Un grand merci, Monsieur le Marquis, dit Hörner avec
un salut de tout son torse. Votre réponse m’a fort soulagé. Jouissant céans de
l’hospitalité du roi de France, je ne porterai les armes en aucun lieu et en
aucun cas contre les siens.
    — Ce serment, Capitaine, dis-je, est grandement à votre
honneur. Pensez-vous réunir pour demain à l’aube vingt-quatre de vos
Suisses ?
    — Je pourrai en réunir trente, dit Hörner, et je me
permets, Monsieur le Comte, dit-il en se tournant vers moi, de vous conseiller
d’aller jusqu’à ce chiffre.
    — Pourquoi ?
    — Vos adversaires savent-ils que vous voyagez à
l’accoutumée avec une escorte de douze soldats ?
    — C’est fort probable.
    — Dans ce cas, ils voudront tripler le nombre de leurs
hommes afin d’avoir sur vous, dès le contact, une supériorité écrasante.
    — C’est bien raisonné, Capitaine, dit mon père.
    — Je louerai donc trente de vos hommes, Capitaine, au
prix que vous voudrez bien fixer.
    — Mon prix pour douze Suisses étant celui que vous
savez, Monsieur le Comte, celui que je vous demanderai pour l’escorte de demain
sera le double.
    — Capitaine, vous vous volez. Vous ne comptez pas les
six Suisses supplémentaires pour aller jusqu’à trente.
    — C’est qu’il y a une autre clause à notre traité,
Monsieur le Comte. Nous sommes, comme vous le savez, des Suisses catholiques
et, s’il y a des morts parmi nous, je voudrais que vous payiez pour eux
l’ouverture de la terre chrétienne.
    — Je le

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