Le Maréchal Berthier
repartit le 21 pour Bayonne Napoléon qui allait lui aussi partir en Espagne « remonter la machine » lui demandait d'organiser le transfert à l'armée d'Espagne des deux corps d'armée de Lannes et de Soult venant d'Allemagne ainsi que de la garde. Cette fois il ne s'agissait plus de troupes comprenant une majorité de conscrits mais de vieux soldats durs à cuire que n'impressionnaient ni les Espagnols ni les Anglais.
Le voyage de Berthier ne se déroula pas aussi rapidement qu'il l'eût désiré. À Bordeaux, la poste manquait de chevaux. Des officiers en route pour l'Espagne se les étaient tous appropriés. Il fallut les remplacer par des boeufs. La vitesse n'était pas la même ! Arrivé à Bayonne, il fut effaré par le désordre qui régnait dans les services. Les instructions qu'il avait envoyées les mois précédents pour la constitution de stocks de vivres, d'armes et de munitions n'avaient pas été suivies. Joseph lui avait dépêché le général Belliard pour le mettre au courant. Frappé par la clarté des exposés de ce dernier, Berthier décida de le conserver près de lui au G.Q.G. et ce jusqu'au moment où il le fit nommer gouverneur de Madrid (4 décembre 1808). En même temps, sur place, il se constituait un nouvel état-major qui comprit rapidement neuf aides de camp et quatre généraux, plus une vingtaine de subalternes. Très vite, le service des renseignements fonctionna bien et, quand Napoléon arriva le 3 novembre, Berthier put lui annoncer que les Espagnols étaient articulés en quatre armées dont, du reste, les chefs ne s'entendaient pas mais qui représentaient 134 000 hommes sans compter les Anglais encore au Portugal.
L'armée française en alignait 173 000 mais ses corps étaient assez dispersés. Dès l'arrivée de l'empereur, celui-ci demanda au major général de les concentrer en vue d'une offensive immédiate en direction de Burgos. Sous la double poigne de Napoléon et d'Alexandre, les chefs de corps, qui obéissaient plus ou moins à Jourdan, comprirent que la période où ils manifestaient une certaine indépendance était close. Ils se hâtèrent de mettre leurs troupes en mouvement, attaquèrent d'eux-mêmes les Espagnols et les succès qu'ils remportèrent leur valurent des reproches de la part de Berthier ! On ne leur demandait pas de faire du zèle et, par leur précipitation, ils avaient empêché d'obtenir des victoires plus complètes. Ils n'étaient pas habitués à un tel langage, mais la correspondance de Berthier n'était que le reflet de l'irritation que les affaires d'Espagne provoquaient chez Napoléon. Tout concourait à alimenter cette mauvaise humeur, y compris le comportement de Joseph qui estimait que Berthier le reléguait au second plan, boudant et refusant d'entrer à Burgos aux côtés de son frère et de Berthier.
Devant la poussée des armées françaises, deux armées espagnoles furent balayées et plus aucun obstacle ne se dressait entre elles et les Anglais encore fort éloignés. Sur la route de Madrid il n'y avait plus que les forces retranchées dans la montée du col de Somo Sierra avec une assez forte artillerie. Une brillante charge des chevau-légers polonais les fit voler en éclats, y laissant, il est vrai, les deux tiers de leurs effectifs. Le 27 novembre, Berthier put écrire à sa femme que « l'armée avait battu 200 000 hommes et pris 150 canons ».
Après une résistance de façade, Madrid capitula au début de décembre et Napoléon y fit son entrée, le 8. Aussitôt, Berthier se remit au travail et, grâce à ses renseignements, il put annoncer, le 19, à Napoléon que l'armée anglaise de Sir John Moore, forte de 25 000 hommes, marchait sur Valladolid pour couper les communications avec le nord. Aussitôt, l'empereur décida d'aller à sa rencontre et Berthier constituait déjà un état-major volant lorsqu'il reçut la visite de Belliard, dégoûté d'un poste de gouverneur impossible à tenir. Il demanda au major général de le reprendre avec lui, ce que Berthier ne put faire car, alors, Joseph serait allé pleurer dans le giron de son frère pour qu'on le lui rendît. Napoléon n'avait pas besoin de cette complication.
Le 22 décembre, ayant avec lui la garde et le corps de Ney, l'empereur se mit en route par un temps épouvantable. La traversée de la sierra de Guadarrama fut une épreuve particulièrement pénible. Napoléon et Berthier furent contraints de mettre pied à terre et d'atteindre le sommet du col en
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