Le maréchal Ney
Verviers, chez un riche manufacturier. Le travail n’étouffait pas ces jeunes gens et ils occupaient agréablement leur temps en montant les magnifiques chevaux de leur hôte. Ce fut à Verviers qu’ils apprirent l’exécution du pauvre Louis XVI, « avec des transports d’indignation et de rage ».
Michel Ney n’en montrait pas moins du zèle à accomplir sa tâche, car le 3 février 1793 il reçut son brevet d’aide de camp signé par Dumouriez. Celui-ci poursuivait son offensive, pénétrant même en Hollande. Mais le supplice du roi ayant coalisé toute l’Europe contre nous, il dut assez rapidement rétrograder avant d’être battu à la bataille de Neerwinden (18 mars 1793). Arraché aux délices de Verviers, l’état-major du général Lamarche était entré en campagne en plein hiver et ses officiers durent payer de leur personne. Ce même 5 mars, ayant constaté que la fuite d’un bataillon français avait mis à la portée de l’ennemi une batterie d’artillerie, Ney et ses camarades volèrent au secours de nos canonniers. Au cours de l’action, son cheval fut blessé et son shako percé d’une balle.
De ce jour, ils furent constamment sur la brèche. À Tirlemont, puis durant la retraite qui suivit, les hussards et l’état-major menèrent des actions retardatrices contre les troupes de l’archiduc Charles. Ayant reçu l’ordre de reprendre l’offensive pour libérer la place de Condé, le général Lamarche la prépara mal, n’y engagea qu’une partie de ses effectifs et elle échoua. Encore une leçon pour le jeune lieutenant. En attendant, à force de reculer, nos troupes avaient repassé la frontière française jusque sous les murs de Valenciennes. De là, il fallut encore rétrograder. Le général Dampierre, commandant de l’armée du Nord, ayant été tué par un boulet, ce fut Lamarche qui le remplaça à titre provisoire à la tête de l’armée. Mais il était incapable d’assumer la responsabilité d’un aussi important commandement.
Toutefois, il demeura à son poste jusqu’au 30 juillet 1793, continuant à reculer devant les Autrichiens en essayant de maintenir l’unité et la cohésion de ses troupes. Le Comité de salut public, qui depuis le 6 avril supervisait les opérations militaires, ayant tout de même eu l’attention attirée sur ses faiblesses, le releva de ses fonctions puis le mit aux arrêts. Lui succéda Custine, qui fut guillotiné quelques mois après. Son état-major ayant été dissous, le lieutenant Ney regagna son régiment de hussards qui ne portait plus le numéro cinq, mais quatre, par suite de la désertion de tout le premier, qui avait accompagné Dumouriez lorsqu’il était passé à l’ennemi (5 avril 1793).
Le jeune homme ne montra pas vraiment de regrets à l’idée de quitter ce chef qui l’avait formé et poussé. Jamais il ne s’attachera à aucun de ses supérieurs, au point de tout sacrifier et de se compromettre pour le suivre dans une disgrâce. Michel Ney avait montré qu’il était à la fois capable d’être un bon officier de troupes et en même temps d’état-major. À présent, à sa manière, il apprenait la guerre.
Le 4 e hussard ne se signala par aucune action particulière dans les mois qui suivirent. Il quitta l’armée du Nord pour aller renforcer celle de Sambre-et-Meuse. Il n’y fit guère parler de lui jusqu’à la fin de l’année. Ce ne fut qu’en avril 1794 que Ney vit sa carrière s’accélérer. La Révolution avait instauré la curieuse institution de l’élection des officiers par leurs pairs. Les résultats n’étaient souvent pas fameux. Jugé capable et bon camarade, Ney fut donc élu capitaine, le 12 de ce mois. Pris d’une sorte de frénésie des galons, trois mois plus tard, en juillet, devant Mayence, il postulait le grade de chef d’escadrons. Soit qu’ils l’aient estimé ayant trop peu d’ancienneté, soit qu’ils aient découvert son mauvais caractère, ses camarades lui préférèrent un autre capitaine. L’échec fut amer. Ney, furieux, désabusé, décida de tout planter là ! Même en pleine guerre et sur un coup de tête, il envisageait donc de quitter le service. Et pour quoi faire, du reste ? Il n’en savait rien. Ostensiblement, il se désintéressa de ses pelotons et de son travail. Il était mûr pour commettre quelque bêtise.
Ce fut alors que la chance tourna. Un nouveau général venait d’être nommé à la tête de l’armée de Sambre-et-Meuse. Il
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