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Le nazisme en questions

Le nazisme en questions

Titel: Le nazisme en questions Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Collectif
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production ; de plus, les prix de vente risquaient de s’effondrer une fois le réarmement terminé, en raison de la surproduction.
    Le système aboutit parfois à des aberrations : ainsi Krupp vendait à l’étranger des armes de qualité supérieure, car elles étaient fabriquées avec un meilleur minerai que celles qu’il fournissait à la Wehrmacht. L’IG Farben, elle, ne se lança qu’avec réticence dans la fabrication du caoutchouc synthétique ( Buna ), compte tenu des prix de revient élevés, en jouant des rivalités entre Schacht, très hostile à la politique d’autarcie et donc aux ersatz, et les nazis Göring, Keppler et Funk.
    Cette période fut donc marquée à la fois par la rupture de certains industriels et financiers avec la politique hitlérienne et par le renforcement des liens entre quelques grandes entreprises privilégiées et le nazisme, comme l’illustre le cas limite de l’IG Farben. Schacht abandonna ses responsabilités en matière d’économie de guerre en octobre 1936, et, à l’été 1937, démissionna du ministère de l’Économie. Göring prenait la tête de la pléthorique administration du plan de quatre ans, dont le rôle ne cessa de croître, et Funk fut nommé ministre de l’Économie. Thyssen, très aigri, accusa Hitler en 1939 de mener le pays au désastre avant de s’exiler.
    À ces défections volontaires s’ajoutait l’épuration des grands dirigeants d’origine juive. Ils furent écartés des responsabilités lors de l’« aryanisation » de l’économie allemande en 1937, à l’instar de Carl von Weinberg, vice-président du conseil des anciens de l’IG Farben,pourtant fervent partisan du national-socialisme, ou de certaines grandes figures, tel Paul Reusch, qui gravitèrent plus tard dans les cercles de l’opposition conservatrice. Cela étant, l’« aryanisation » fut, sous couvert d’idéologie et en dépit de certaines absurdités économiques, un moyen efficace de concentration et d’élimination de la concurrence, qui bénéficia à de grandes entreprises, telles la Dresdner Bank ou l’omniprésente IG Farben 7 .
    Cette évolution s’acheva au cours de la guerre. C’est essentiellement par le biais de l’exploitation des pays occupés que quelques secteurs, et surtout quelques entreprises, purent réellement tirer profit de leur complicité avec le III e  Reich. Krupp utilisa par exemple la main-d’œuvre d’une soixantaine de camps de concentration ou de prisonniers de guerre. Dans l’ensemble des usines de l’IG Farben, près de 46 % de la main-d’œuvre était d’origine étrangère en 1944 ; à la même date, le pourcentage s’élevait à 59 % dans les usines des Hermann Göring Werke.
    Sous le régime nazi, une partie des milieux d’affaires, par hostilité à la république et parce que certains pensaient pouvoir contrôler Hitler, faute d’une autre solution conservatrice, a suivi le mouvement.
    Mais la plupart l’ont fait après 1933, et une minorité d’entre eux seulement est devenue la complice active du III e  Reich après 1936-1937. Il n’est donc plus possible aujourd’hui de prétendre que c’est le système capitaliste qui a conduit l’Allemagne au nazisme. Parce qu’il reposait sur le principe intangible du primat du politique,parce qu’il imposait sa logique de destruction même aux élites qui l’avaient soutenu, le nazisme ne constitua pas l’Eldorado des capitalistes.
    Cela étant, parmi les couches sociales qui purent tirer avantage du système hitlérien, les industriels et les financiers qui choisirent l’alliance avec les nazis ne furent pas les derniers servis. Mais est-ce réellement une surprise ?
    Notes
    2 . Cf. le texte complet dans Martin Broszat, L’État hitlérien. L’origine et l’évolution des structures du Troisième Reich , Fayard, 1985, pp. 573-576.
    3 . Cf. l’ouvrage fondamental de Henry A. Turner, German Big Business and the Rise of Hitler , New York-Oxford, Oxford University Press, 1985.
    4 . Ayant rompu avec les nazis en 1939, réfugié en Suisse puis en France où il sera livré aux nazis par Vichy, il fera une confession publique publiée aux États-Unis ( I paid Hitler , New York, 1941), dans laquelle il prétendra avoir donné « 100 000 marks or » à Hitler, lors du putsch du 9 novembre 1923. H. A. Turner, preuves à l’appui, conteste cette allégation, de même qu’il conteste l’appui que Hugo Stinnes, un autre magnat de la Ruhr, aurait

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