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Le nazisme en questions

Le nazisme en questions

Titel: Le nazisme en questions Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Collectif
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sous le III e  Reich, je conclus que l’antisémitisme est latent, plutôt qu’actif, au sens où il n’est pas l’élément premier d’adhésion de l’électeur au nazisme. Somme toute, il y a ce que j’appelle une « haine statique » du Juif fortement teintée d’antijudaïsme chrétien. Cette structure stable et traditionnelle de l’identité nationale discrimine ceux qui ne sont pas de bons Allemands et, de fait, conduit les Allemands à accepter la politique antisémite du régime, et les Églises de toutes confessions à ne jamais la dénoncer.Mais, il faut y insister, les attentes populaires qui portent Hitler au pouvoir sont des attentes de retour à l’ordre et à la stabilité politique, économique, sociale ; elles ne sont pas prioritairement celles d’une communauté nationale débarrassée de tous ses ennemis raciaux.
    Cette latence de l’antisémitisme permet donc de comprendre à la fois que jamais le régime nazi ne put embrigader – au-delà du grand cercle des membres du parti – la « haine statique » du Juif répandue dans l’opinion populaire pour la transformer en une « haine dynamique » qui aurait vu chacun se livrer au pogrom : en novembre 1938, après la « Nuit de cristal », des Bavarois marquèrent leur dégoût, leur colère, voire pour un très petit nombre leur sympathie à l’égard de Juifs, amis ou anonymes.
    Mais elle explique tout autant que les Allemands, ne faisant pas de la « Solution finale de la question juive » une priorité, laissèrent, par indifférence, le régime nazi se lancer dans cette entreprise essentielle pour lui. Le résultat fut que tout un peuple en guerre collabora, au niveau bureaucratique de chacun, à l’extermination des Juifs.
    L’H. : L’opinion allemande s’est-elle détachée de Hitler au fur et à mesure que se profilaient sa défaite et l’anéantissement du pays ?
    I. K. : Vous comprenez bien que la nature totalitaire du régime ne permet plus, avec la suppression de toute possibilité d’expression politique libre à l’été 1933, de parler d’« opinion publique ». Demeure une opinion populaire dont on devine, par les rapports secrets de nombreux observateurs comme par les rapports de police et de la Gestapo, que, jusque vers le milieu de la guerre, elle demeure très attachée à Hitler, qu’elle crédite duredressement économique, de l’éradication du « marxisme », de la reconstruction d’une Allemagne forte…
    Deux rapports doivent toutefois retenir l’attention. Le premier est établi en mai 1942 par Wilhelm Knöchel, membre du comité central du Parti communiste allemand séjournant clandestinement à Berlin : « Confronté à la perspective terrifiante d’une défaite militaire, la grande majorité des Allemands souhaiteraient le départ aussi rapide que possible du gouvernement de Hitler. Néanmoins, Hitler leur apparaît comme un moindre mal… »
    Deux ans après, le mémorandum d’Adam von Trott, destiné aux officiers conservateurs impliqués dans l’attentat de juillet 1944 contre Hitler, fait état d’une immense passivité de la classe ouvrière, et conclut qu’il n’y a aucun espoir qu’à la suite de la liquidation du Führer « une révolution d’en bas » vienne appuyer et légitimer la « révolution d’en haut ». En juillet 1944, lorsqu’éclate la bombe au quartier général de Hitler, les Allemands, dans leur écrasante majorité, souhaitent la fin de la guerre, voire la chute du régime. Mais la guerre elle-même, l’exigence des Alliés d’une reddition sans conditions et la peur qu’inspire l’Union soviétique sont autant d’éléments qui, jusqu’au bout, ont continué à tisser entre le régime et la société des liens par défaut.
    Notes
    8 . Jürgen Falter, Hitlers Wälher , Munich, 1991.
    9 . Pour comprendre les enjeux de ce débat, voir Ian Kershaw, Qu’est-ce que le nazisme ? Problèmes et perspectives d’interprétation , Gallimard, « Folio-Histoire », 1992, rééd., 1997, ch. IV, « Hitler : “maître du Reich” ou “dictateur faible ?” ».

II
    LA PROPAGANDE EXPLIQUE-T-ELLE LE SUCCÈS DU NAZISME ?

La mise en scène d’une idéologie
    L’arrivée d’Adolf Hitler au pouvoir, le 30 janvier 1933, est célébrée par les nazis comme l’aurore d’une ère nouvelle et révolutionnaire. L’appareil de propagande transforme le pays au point de tromper nombre de contemporains sur la nature véritable du

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