Le pays des grottes sacrées
bouche, la mâchoire, la
joue, puis deux lignes vigoureuses pour la crinière et le dos d’un cheval. Il regarda
l’esquisse un moment, puis grava au-dessus du premier la tête d’un deuxième
cheval, tournée de l’autre côté. La roche était un peu plus dure à cet endroit
et la ligne du front ne fut pas aussi précise, mais il revint sur l’ouvrage et
traça les poils de la crinière à intervalles assez grands. Puis il se recula
pour contempler son œuvre.
— J’avais envie d’ajouter
quelque chose à cette grotte, mais je ne savais trop si je devais attendre que
la Première ait entonné le Chant de la Mère dans les profondeurs de la grotte,
expliqua le Zelandoni de la Dix-Neuvième Caverne des Zelandonii.
— Je t’ai dit que la Mère en
déciderait et que tu saurais, dit la Gardienne. Maintenant, je sais. C’était
opportun, remarqua-t-elle.
— C’est ce qu’il fallait
faire, confirma Ayla. Peut-être est-il temps que je cesse de t’appeler Jonokol
et que je commence à dire « Zelandoni de la Dix-Neuvième Caverne ».
— Devant tout le monde
peut-être, mais entre nous j’espère que je serai toujours Jonokol et toi Ayla.
— Je le souhaite aussi, dit
Ayla avant de se tourner vers la Gardienne. Dans mon esprit, tu es la
Gardienne, mais si ça ne te fait rien, j’aimerais connaître le nom que tu
portais à la naissance.
— On m’a appelée Dominica
et, pour moi, tu resteras toujours Ayla quoi qu’il arrive, même si tu deviens
la Première.
Ayla secoua la tête.
— C’est peu probable. Je
suis étrangère et j’ai un accent bizarre.
— Peu importe. Nous
reconnaissons la Première ou le Premier pour ce qu’ils sont, même si nous ne
les connaissons pas. Et j’aime bien ton accent. Il te rend distincte des
autres, comme doit l’être Celle Qui Est la Première, dit Dominica avant de les
conduire hors de la grotte.
Toute la soirée Ayla songea à
cette caverne extraordinaire. Il y avait tant à voir, à comprendre, qu’elle
aurait aimé y retourner. Ils parlaient de ce qu’il convenait de faire avec
Gahaynar, alors qu’elle ne cessait de revenir à la grotte par la pensée.
Gahaynar paraissait se remettre des coups reçus. Il allait en conserver des
cicatrices le restant de ses jours, mais ne semblait pas en vouloir à ceux qui
l’avaient rossé. Il semblait plutôt reconnaissant, non seulement d’être encore
en vie mais aussi du fait que les Zelandonia prenaient soin de lui.
Il connaissait ses forfaits, même
s’il était seul dans ce cas ; Balderan et les autres n’avaient pas fait
bien pire et ils étaient morts. Il ignorait pourquoi il avait été épargné, si
ce n’est que, tandis que Balderan projetait de tuer l’étrangère, il avait prié
dans son for intérieur la Mère de le sauver. Il savait qu’ils ne
s’échapperaient pas et ne voulait pas mourir.
— Il semble vouloir
sincèrement réparer ses torts, dit Zelandoni Première. Peut-être parce qu’il
sait maintenant qu’on peut lui faire payer ses actions, la Mère paraît décidée
à l’épargner.
— Quelqu’un sait-il dans
quelle Caverne il est né ? s’enquit la Première. A-t-il de la
famille ?
— Oui, il a sa mère,
répondit l’un des autres Zelandonia. Je ne lui connais pas d’autre parent. Je
crois qu’elle est très vieille et perd la mémoire.
— Voilà donc la solution, dit
la Première. Il faut le renvoyer dans sa Caverne pour qu’il s’occupe de sa
mère.
— Mais en quoi réparera-t-il
ainsi ses torts ? C’est sa mère, fit remarquer un autre Zelandoni.
— La tâche ne lui sera pas
nécessairement facile si l’état de sa mère continue de se détériorer. Cela
épargnera à sa Caverne de prendre soin d’elle et donnera à Gahaynar quelque
chose à faire de louable. Il n’y a sans doute jamais songé au côté de Balderan,
en prenant ce qu’il voulait sans avoir à travailler. Il faut l’obliger à travailler,
à chasser pour son compte ou du moins à participer aux chasses communautaires
de sa Caverne, et à subvenir lui-même aux besoins de sa mère.
— J’imagine que s’occuper
d’une vieille femme, même si c’est sa mère, n’est pas le genre de choses qu’un
homme aime faire, dit l’autre Zelandoni.
Ayla n’avait écouté qu’à moitié,
mais elle avait saisi l’essentiel et trouva l’idée bonne. Elle se remit ensuite
à penser au Site Sacré le Plus Ancien. Elle décida finalement de retourner dans
la
Weitere Kostenlose Bücher