Le pays des grottes sacrées
disait, il n’était pas sûr non plus d’y croire
tout à fait. On avait peut-être simplement aperçu un loup à proximité de la
Réunion et, pour une raison ou une autre, on avait cru qu’il la suivait,
avait-il pensé. Mais il devait maintenant reconnaître que ce n’était pas une
bête rôdant autour d’un groupe. Il y avait de la communication, de la
confiance, entre ce loup et cette femme. Jamais le Zelandoni de la
Vingt-Sixième Caverne n’avait vu une chose pareille et cela avait stimulé son
intérêt pour Ayla. Jeune mère ou pas, elle avait sa place dans la Zelandonia.
La matinée était avancée lorsque
le petit groupe s’approcha de la grotte apparemment quelconque s’enfonçant dans
une paroi calcaire basse. Ils étaient quatre : le Zelandoni de la
Vingt-Sixième Caverne, son acolyte, un jeune homme taciturne nommé Falithan,
Jonokol, l’artiste talentueux qui avait été l’acolyte de la Première un an plus
tôt, et Ayla.
Pendant le trajet, elle avait
pris plaisir à bavarder avec Jonokol et avait constaté qu’il avait beaucoup
changé. Lorsqu’elle avait fait sa connaissance, il était plus artiste
qu’acolyte et était entré dans la Zelandonia parce que cela lui permettait
d’exercer librement son talent. Il ne tenait pas absolument à devenir
Zelandoni, il était satisfait de son rang d’acolyte. Cela avait changé. Elle le
trouvait maintenant plus sérieux. Il voulait peindre dans la Grotte Blanche
qu’elle – ou plutôt que Loup – avait découverte l’été
précédent, mais pas uniquement pour le plaisir d’exercer son art. Il savait que
c’était un lieu saint, un refuge sacré créé par la Mère et dont les parois de
calcite blanche constituaient une extraordinaire invitation à en faire un
endroit où communier avec le Monde des Esprits. Il voulait connaître cette
grotte en tant que doniate afin de rendre justice à son caractère sacré en
peignant des images du Monde d’Après qui lui parleraient. Jonokol abandonnerait
bientôt son nom pour devenir Zelandoni de la Dix-Neuvième Caverne.
L’entrée de la grotte était à
peine assez large pour laisser passer une seule personne et Ayla eut l’impression
qu’elle se rétrécissait encore à mesure qu’on avançait. Pourquoi vouloir
pénétrer dans une grotte aussi exiguë ? pensa-t-elle. Elle entendit alors
un bruit qui fit se hérisser les poils de sa nuque et lui donna la chair de
poule. C’était une sorte de ululement haut perché, une plainte qui parut emplir
toute la grotte. En se retournant, elle vit que c’était Falithan qui
l’émettait. Un étrange écho assourdi semblant né des profondeurs de la roche
leur parvint. Le Zelandoni de la Vingt-Sixième souriait.
— Un son remarquable,
non ? dit-il.
— En effet, répondit Ayla.
Mais pourquoi ton acolyte fait-il cela ?
— C’est une façon d’évaluer
la grotte. Lorsque quelqu’un chante ou joue de la flûte ou émet un son comme
Falithan dans une grotte, si elle répond par un son distinct et net, cela
signifie que la Mère nous entend, qu’elle nous dit qu’on peut pénétrer dans le
Monde des Esprits par cet endroit. Nous savons alors qu’il est sacré.
— Est-ce que toutes les
grottes sacrées répondent ?
— Pas toutes mais la plupart,
et parfois seulement dans certains endroits, mais les lieux sacrés ont tous
quelque chose de spécial.
— Je suis sûre que la
Première aimerait évaluer une telle grotte, elle a une voix belle et pure, dit
Ayla.
Aussitôt, elle fronça les
sourcils et poursuivit :
— Mais comment faire quand
on ne sait pas chanter ni jouer de la flûte, ni émettre un son comme
Falithan ? Je ne sais rien faire de tout cela.
— Tu sais sûrement chanter
un peu…
— Non, intervint Jonokol.
Elle ne sait que prononcer d’une voix monocorde les mots du Chant de la Mère.
— Il faut pouvoir évaluer un
lieu sacré par le son, souligna le doniate de la Vingt-Sixième Caverne. C’est
une partie importante de la fonction de Zelandoni. Et il faut que ce soit un
son particulier, pas simplement un cri.
L’homme semblait préoccupé et
Ayla abattue.
— Et si je n’y arrive
pas ? demanda-t-elle, prenant conscience en cet instant qu’elle voulait
vraiment devenir un jour Zelandoni.
Jonokol paraissait aussi dépité
qu’elle. Il aimait beaucoup cette étrangère que Jondalar avait ramenée de son
Voyage et estimait avoir une dette envers elle. Non seulement elle
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