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Le Peuple et le Roi

Le Peuple et le Roi

Titel: Le Peuple et le Roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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d’un modéré, à Paris,
surtout si les sans-culottes présents lors du vote exigent des électeurs qu’ils
annoncent leur choix.
     
    Le 3 septembre, on apprend que Verdun est tombé, que plus
rien, aucune place forte ne défend Paris. Que le commandant de la garnison de
Verdun, Beaurepaire, qui refusait de capituler, aurait été mis en minorité par
la municipalité hostile à toute résistance. Certains affirment que Beaurepaire
s’est suicidé comme un héros antique, puis on assure qu’il a été assassiné, par
des traîtres.
    Mort aux traîtres !
     
    « Il faut purger quatre années de trahison », murmure
Manon Roland, en apprenant les massacres, et son mari le ministre de l’intérieur
dit qu’il faut « laisser un voile sur ces événements. Je sais que le
peuple terrible dans sa vengeance y porte encore une sorte de justice. »
    En effet, dans le vestibule des prisons, Maillard, un ancien
soldat qui fut de toutes les journées révolutionnaires, depuis le 14 juillet
1789 jusqu’au 10 août 1792, s’est installé derrière une table, et procède, en
quelques minutes, à l’interrogatoire des prisonniers. Le verdict tombe, « Vive
la nation ! », et le prisonnier sortant un chapeau sur la tête est
épargné par les massacreurs qui ont du sang sur les avant-bras et jusqu’aux
épaules.
     
    Si Maillard lance le nom d’une prison, alors le prisonnier
est poussé dehors tête nue, voué à la mort.
    On tue à coups de pique et à coups de sabre, et peu à peu, les
« bourreaux » prennent le temps de faire souffrir, jouissant de voir
ces hommes et ces femmes qui se traînent, ensanglantés, frappés d’abord du plat
du sabre avant d’être percés.
    Et parfois on enfonce son poing dans la poitrine du cadavre
et on en retire le cœur qu’on porte à ses lèvres, dans un simulacre de
dévoration cannibale.
    Et les prostituées sont violées avant d’être tuées.
     
    « Le peuple s’est levé, la fureur martiale qui a saisi
tous les Parisiens est un prodige, écrit à son mari, député de la Drôme, Madame
Julien. Je jette un voile sur les crimes qu’on a forcé le peuple à commettre
par tous ceux dont il est depuis deux ans la triste victime… Quand on veut la
fin il faut vouloir les moyens. Point d’humanité barbare ! »
     
    Mais ce « peuple » qui tue, dont on dit qu’il rend
la justice, n’est composé que de quelques centaines d’hommes – peut-être moins
de deux cents – qui vont de prison en prison, des Carmes à l’Abbaye, de Bicêtre
à la Grande Force.
    Ils sont déterminés, et le vin comme le sang versé les rend
ivres.
    « Triple nom de Dieu, s’écrie un fédéré marseillais, je
ne suis pas venu de cent quatre-vingts lieues pour ne pas foutre cent
quatre-vingts têtes au bout de ma pique. »
    Les députés que l’Assemblée envoie sur les lieux des
massacres pour tenter de les arrêter sont terrorisés, entourés d’hommes qui
tuent comme on élague, et disent d’un prisonnier qu’ils vont « l’élargir ».
    Ils s’approchent d’un député :
    « Si tu viens pour arrêter la justice du peuple, je
dois te dire que tu ferais de vains efforts. »
    Et la délégation de l’Assemblée se retire, préfère ne pas
savoir.
    « Les ténèbres ne nous ont pas permis de voir ce qui se
passait. »
    « Nulle puissance n’aurait pu les arrêter », dit
Danton.
     
    Et les assassins continuent. Ils terrorisent, favorisent les
Montagnards, les Cordeliers.
    « Nous sommes sous le couteau de Robespierre et de
Danton », dit Manon Roland.
    Brissot et Pétion, qui veulent être élus à la Convention, sont
contraints de quitter Paris, de se présenter en province.
    Louvet, un écrivain lié aux Girondins, qui a pris la parole
pour discuter la candidature de Marat à la Convention, est entouré à la sortie
de la salle d’« hommes à gros bâtons et à sabre, les gardes du corps de
Robespierre. Ils menacèrent. Ils me dirent en propres termes : “Avant peu
tu y passeras.” Ainsi l’on était libre dans cette assemblée où sous les
poignards on votait à haute voix ! ».
     
    Il faut approuver si l’on veut rester en vie.
    Billaud-Varenne, avocat, membre de la Commune
insurrectionnelle, substitut du procureur Manuel, fait le tour des prisons, assiste
aux massacres, et déclare : « Peuple tu immoles tes ennemis. Tu fais
ton devoir. »
    Et il attribue vingt-quatre livres aux tueurs, aux « tape-dur »
qui exécutent les verdicts de

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