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Le Peuple et le Roi

Le Peuple et le Roi

Titel: Le Peuple et le Roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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parler au club des Jacobins avec le bonnet
rouge enfoncé jusqu’aux oreilles, et les Jacobins l’acclament et coiffent à
leur tour le bonnet.
    Et il faut que Robespierre s’exclame : « C’est
dégrader le peuple que de croire qu’il est sensible à ces marques extérieures »
pour qu’ils enfouissent leur bonnet rouge dans leur poche !
     
    Que les Jacobins s’étripent entre eux ! Et que Le
Père Duchesne et L’Ami du peuple jugent compromis ceux qui ont
accepté d’être ministres de Monsieur Veto !
    La division sert la couronne, affaiblit l’Assemblée ! Et
l’honnête Roland de la Platière n’y peut rien.
    Et Manon Roland son épouse peut bien tenir, au 5 de la rue
Guénégaud, un salon où journalistes patriotes, ministres, se réunissent, préparent
en fait les décisions que l’Assemblée votera et qu’ils comptent imposer au roi,
une fracture s’approfondit, entre les brissotins ministres, qu’on appelle Girondins,
et le peuple des sans-culottes, pour qui ces bourgeois et même ce général
Dumouriez ne sont que des « Jacobins, des patriotes, des révolutionnaires
simulés ! ».
    Pétion, le maire de Paris, écrit : « Le peuple s’irrite
contre la bourgeoisie, il s’indigne de son ingratitude, et se rappelle les
services qu’il lui a rendus, il se rappelle qu’ils étaient tous frères dans les
beaux jours de la liberté. Les privilégiés fomentent doucement cette guerre qui
nous conduit insensiblement à la ruine. La bourgeoisie et le peuple réunis ont
fait la Révolution ; leur réunion seule peut la conserver. »
     
    Mais la guerre étrangère, l’anarchie, vont élargir ces
failles entre « patriotes ».
    Louis apprend que « le parti de Robespierre dans les
Jacobins est contre le ministère, et ce qu’on appelle la Montagne dans l’Assemblée
suit la même ligne ».
    Jacobins robespierristes et Montagnards se méfient des
généraux Rochambeau, Luckner, La Fayette, auxquels Dumouriez, « Jacobin
simulé », a donné le commandement des trois armées qui protègent les
frontières du Nord et de l’Est.
     
    Dans les campagnes, les troubles paysans se multiplient.
    Le Quercy, le Gard, l’Ardèche, l’Hérault sont touchés. Les
gardes nationaux incendient eux-mêmes les châteaux des émigrés dans le Cantal, le
Lot, la Dordogne. On démolit les « pigeonniers seigneuriaux ».
    On prélève des « contributions forcées » sur les « aristocrates ».
Personne n’est en sûreté !
    Alors il faut pousser le pays dans la guerre, prendre de
vitesse Marat et Robespierre qui mettent en évidence les dangers du conflit :
Marat annonce les défaites, les intrigues des généraux, et Robespierre craint
que l’un d’eux ne s’empare du pouvoir.
     
    Alors la guerre, vite.
    Le 20 avril 1792, Louis XVI se présente à l’Assemblée
nationale législative et annonce devant les députés enthousiastes que « la
France déclare la guerre au roi de Hongrie et de Bohême ». Car François II
n’a pas encore été couronné empereur et on veut essayer de laisser l’Allemagne
et la Prusse en dehors du conflit.
    Seuls sept députés – fidèles aux Lameth et aux Montagnards –
refusent de voter le décret. « Le peuple veut la guerre », a lancé un
député « girondin » et un autre s’est écrié : « Il faut
déclarer la guerre aux rois et la paix aux peuples. »
    Dans les tribunes de l’Assemblée, dans les rues voisines de
la salle du Manège, la foule acclame les députés. Louis entend les cris de joie.
    Cette déclaration de guerre est pourtant pleine d’arrière-pensées.
    Les brissotins veulent, avec la guerre, briser la monarchie.
    Et la guerre peut permettre de relancer la Révolution.
    Et la guerre peut permettre au roi de retrouver tous ses
pouvoirs.
     
    L’enjeu est pour chaque camp immense.
    Louis y pense sans cesse : c’est une question de vie ou
de mort.
    Il se doute que la reine informe les souverains étrangers de
la situation française et même des mouvements des troupes. Louis l’accepte.
    Trahison ? Ce mot n’a pas grand sens pour elle, pour
lui.
    Ils sont fidèles à la monarchie.
    « Voici ce que la reine vient de me faire parvenir, en
chiffre, écrit Mercy-Argenteau au chancelier d’Autriche Kaunitz. Monsieur
Dumouriez a le projet de commencer le premier par une attaque en Savoie et une
autre par le pays de Liège. C’est l’armée de Monsieur de La Fayette qui doit
servir à cette dernière attaque.

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