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Le piège de Dante

Le piège de Dante

Titel: Le piège de Dante Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arnaud Delalande
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avons découverts. Nous vous attendions.
    Pietro leva le regard vers la façade de la Libreria en ajustant son chapeau. Quelques gouttes de pluie tombèrent dans ses yeux. Il lui sembla que le ciel pleurait, au moment où lui-même n’était plus que colère et désir de vengeance. Il prit les pistolets à ses flancs et fit signe aux soldats, armés eux aussi de pistolets, de piques, d’épées et d’armes de jet, de le suivre à l’intérieur de la maison. En retrait derrière eux, Landretto était revenu signifier à son maître qu’Anna Santamaria s’était mise au secret dans un endroit sûr chez l’une de ses anciennes amies, dans le sextier de Castello ; lui-même s’apprêtait à y retourner pour assurer sa protection. Sans en avoir reçu l’autorisation, il emboîta le pas à l’Orchidée Noire et à son escouade.
    Tous entrèrent par la porte principale de la villa.
    Ils franchirent le vestibule, contournant la petite fontaine d’eau bruissante, avant de pénétrer dans la loggia du rez-de-chaussée. Pietro laissa quelques hommes en faction auprès du cortile donnant sur rue. Un coup d’oeil circulaire suffit à Pietro pour lui restituer toutes les sensations qu’il avait éprouvées le soir où Andreas Vicario avait donné son fameux bal. C'était également ici que Pietro avait discuté avec Luciana pour la dernière fois. Il regarda les cheminées, de part et d’autre de la pièce ; les tables dépouillées, que surveillaient les statues d’esclaves peintes. Il n’y avait que peu d’effort à faire pour se rappeler les lumières, les couples masqués tournoyant au milieu des cotillons et des pétales de fleurs, et ces buffets regorgeant de victuailles. Mais cette nuit, la loggia avait un tout autre aspect : plongée dans la pénombre, débarrassée de tout falbala, elle était rendue à la poussière et à la terne obscurité d’une maison ayant abrité un assassin et un parjure. Plus personne ne dansait, les orchestres s’étaient tus – et dans ce patio cerné de fauteuils et de divans profonds, où s’engageait maintenant Viravolta, il n’y avait plus de femmes troussées gémissant de plaisir, de loups gisant sur le sol, de mains abandonnées à l’angle des sofas. Pietro monta bientôt l’escalier, retrouva le couloir, la porte même derrière laquelle il avait surpris l’Oiseau de feu en larva et voile noir, qui venait de pendre Luciana. Les soldats qui l’accompagnaient ouvraient les portes des chambres les unes après les autres, se dispersaient dans toute la villa. Viravolta s’aventura jusqu’au fond du couloir : là se trouvait la porte qui communiquait avec la Libreria , dans l’autre aile de la demeure. Un instant, Pietro se pencha et y colla son oreille. Rien. Plissant les yeux, il joua de la main sur la poignée.
    Lentement, la porte s’ouvrit.
    La Libreria était encore illuminée. Une dizaine de rayonnages s’alignaient devant Pietro ; il demeura quelques secondes sans bouger à l’orée de ce labyrinthe... puis il reprit sa marche. Ses pas étaient étouffés par les longs tapis verts qui garnissaient les couloirs. Il tourna à un angle, puis un autre, un autre encore. Finalement, il rattrapa l’allée centrale. Une quinzaine de mètres le séparaient encore du fond de la première salle de la bibliothèque. Au bout de cette longue perspective, Pietro saisit des mouvements furtifs, ombres courbées sur une autre forme indistincte. Des halètements parvinrent jusqu’à lui. Pietro se trouvait au centre de la vaste pièce; un dispositif en étoile faisait de lui le point de convergence des différents rayons de l’endroit qui, après un double coude en angle brisé, retrouvait un plan plus rectiligne et plus classique. Pietro s’était encore avancé de quelques pas. La vue de la scène au fond de la salle se précisa : il comprit alors qu’il avait dérangé un bien troublant festin.
    Au moment même où il se faisait cette réflexion, des différents couloirs devant lui, jaillirent les monstres. Ils se précipitaient sur lui, masses noires, affamées et hurlantes.
    Mais qu’est-ce que...
    Pietro poussa un cri et recula d’un pas. Le pistolet au bout de son bras tendu, il visa l’un des chiens qui, l’écume pleuvant de ses babines, aboyait sauvagement en continuant sa course. La détonation retentit, dans un nuage et une odeur de poudre. Le chien reçut le projectile en pleine face et, stoppé net, se ramassa sur lui-même dans un couinement,

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