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Le piège de Dante

Le piège de Dante

Titel: Le piège de Dante Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arnaud Delalande
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perruque poudrée. Le talon de son mocassin à boucle luisant frappait régulièrement le sol, ponctuant le fil de ses réflexions comme le battement d’un métronome.
    — Oui, jusque-là, tout se tient. Luciana est donc une clé. Je dois la revoir, il est possible qu’elle me cache encore quelque chose. Oui, j’arrive, ma chère! Et vous allez entendre parler du pays. Bon, après cela, le prêtre Caffelli, terrorisé, n’ose faire le moindre geste. Il est repéré lui aussi. Peut-être Marcello a-t-il livré son nom, sous la torture ? Caffelli est ligoté au sommet de San Giorgio. De ce côté, les Oiseaux sont satisfaits. Mais voilà : les débris de verre retrouvés au San Luca nous amènent jusqu’à Federico Spadetti, membre de la Guilde, et au mystérieux Minos. Spadetti est assassiné à son tour, nous ne savons rien de Minos, si ce n’est sa commande de lentilles de verre. Des lentilles de verre, Santa Madonna – pour quoi faire ?
    Pietro soupira et se frotta les yeux.
    — Par-dessus tout, Virgile et Campioni conduisent mes pas, l’un vers Dante et les Forces du Mal, l’autre vers ces mêmes Oiseaux de feu, à la villa Mora... Nous sommes manipulés. Il Diavolo a-t-il décelé ma présence dans le caveau de la Mora – ou était-il prévenu avant que je me rendrais sur place ? Dans ce cas, pourquoi m’avoir épargné? A tout moment, il pouvait se saisir de moi... Aurais-je, moi aussi, un autre rôle à jouer dans cette affaire? Non, je crois... je crois que tout cela n’est qu’un leurre... Une vaste digression...
    Il hocha la tête.
    Tout à coup, il entendit une voix à côté de lui.
    — Minos est allé à l’Arsenal.
    La main de Pietro resta suspendue. Il se tourna vers Tazzio.
    — Comment ?
    — Minos est allé à l’Arsenal.
    Il se pencha de nouveau vers le garçon.
    — Tu le connais ! Tu sais qui il est, n’est-ce pas ?
    — Non. Mais je sais qu’il est allé à l’Arsenal. J’ai entendu mon père discuter avec l’un de ses hommes, il y a six mois.
    — Cet homme, qui était-il ?
    — Je ne sais pas.
    Il continuait de frotter la robe de cristal, il y voyait son visage, multiplié en mille reflets translucides et mouvants.
    — Minos est allé à l’Arsenal, répétait-il.

    L'Arsenal, dans le sextier de Castello, avait tout d’une forteresse extraordinaire. Elle occupait à elle seule une large part de la superficie totale de Venise. Ici se jouait depuis des siècles la puissance économique et militaire vénitienne. L'Arsenal abritait deux mille artificiers, charpentiers, radoubeurs, fabricants de voiles, tresseurs de cordages et autres corps de métiers; c’était un monde à lui seul, flanqué de tours et de sentinelles qui veillaient sur les bassins d’amarrage, les hangars et ateliers couverts, les forges, les centres de construction des navires, les fonderies. D’ici étaient sortis les cinq galères et les huit galions qui gardaient en permanence le golfe Adriatique ; les galliasses et galiotes qui croisaient de Zante à Corfou ; les frégates et vaisseaux de quarante, cinquante ou quatre-vingt-dix pièces de canons sillonnant les flots de Gibraltar à Constantinople ; les mude et les « navires subtils » luttant contre la piraterie en mer.
    Sitôt que Pietro avait appris de Tazzio que Minos était allé à l’Arsenal – dans des circonstances et un but qui restaient à déterminer –, il en avisa Emilio Vindicati avant de se rendre lui-même sur place, à la tête d’une escouade de vingt agents auxquels s’ajoutaient les inquisiteurs dépêchés par les Dix. Un soir, Tazzio avait surpris une conversation entre son père et un homme dont il n’avait pu voir le visage, mais qui s’était réclamé d’un certain Minos; Tazzio n’avait compris que quelques bribes de cette conversation : le Minos en question était en relation avec certains constructeurs de l’Arsenal, auxquels il avait passé secrètement une commande privée, comme il l’avait fait auprès du verrier pour obtenir ses fameuses lentilles. Voilà qui confortait Pietro dans l’idée que ce Minos, bien qu’il dissimulât son identité, avait pignon sur rue.
    L'arrivée de l’Orchidée Noire et des sbires des Ténébreux fit l’effet d’un coup de tonnerre. Ils marchaient, Viravolta en tête, les aiguillant d’un geste de la main ou d’un signe de tête pour qu’ils se dispersent de toutes parts; leurs pas résonnaient au milieu des artisans et ouvriers des chantiers navals. Les agents

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