Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le Pont de Buena Vista

Le Pont de Buena Vista

Titel: Le Pont de Buena Vista Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
Vom Netzwerk:
semaines, lady Lamia m'a dit – pour plaisanter, je suppose, et éluder les questions – que vos puisatiers cherchent le Saint-Graal. Avouez qu'il y a de quoi exciter la curiosité d'un chrétien, et même d'un parpaillot !
     
    Le major approuva d'un sourire suave.
     
    – Mes amis, je vais m'efforcer de satisfaire cette curiosité dans la mesure de mes connaissances. D'abord, tout le monde sait aujourd'hui que le récipient nommé Graal, qui aurait été apporté en Grande-Bretagne par le fils de Joseph d'Arimathie, l'ensevelisseur du Christ, n'était pas un vase d'or couvert d'émeraudes, comme une légende l'a propagé. Ce devait être une simple écuelle de bois, le Christ et les apôtres n'usant pas de vaisselle précieuse, mais, plus probablement, de celle du peuple dont ils étaient proches. Cependant, cette coupe, si modeste fût-elle, aurait, si on la retrouvait, une immense valeur, à la fois historique et mystique, pour les croyants. Mais soyez assuré, cher Charles, qu'elle ne se trouve pas à Soledad. Lady Lamia s'est amusée à vos dépens, car c'est tout autre chose que cherche lord Simon.
     
    – Tu en as trop dit et tu n'en dis pas assez, Eddy ! Tu peux tout de même nous faire confiance. S'il s'agit d'un secret, nous saurons le garder, dit le docteur Kermor, parlant avec l'autorité du plus vieil ami du major.
     
    – Je compte donc sur vous trois pour ne pas ébruiter ce que je vais raconter, jusqu'à ce que Simon Leonard libère vos langues. Ai-je vos promesses ?
     
    Charles, tout comme Tilloy et le médecin, s'engagea sans hésitation. Le major Carver se cala dans son fauteuil, but une gorgée de gin allongé d'eau, posa les mains sur les accoudoirs de son fauteuil et jouit un instant de l'impatience mal contenue de ses visiteurs.
     
    – Les anciens de Soledad, dont Uncle Dave fait partie comme moi, dit-il, savent qu'un moine espagnol, connu sous le nom de don Pascual, construisit de ses mains, à la fin du XVII e  siècle ou au commencement du XVIII e , l'ermitage du mont de la Chèvre. Or, l'an dernier, lors de la réception donnée comme chaque année à Nassau par le gouverneur, sir John Gregory, à l'occasion de l'anniversaire de la reine Victoria, un invité demanda à lord Simon s'il était exact que des pèlerins venaient encore, de toutes les îles de l'archipel, se recueillir au mont de la Chèvre sur la tombe du moine mort en 1720. Cette évocation fit sourire le gouverneur et provoqua une étonnante révélation. « Savez-vous que votre ermite, considéré par certains comme un saint homme, était en réalité un religieux dévoyé, un pirate repenti ? » dit le gouverneur. Lord Simon et moi-même récusâmes cette accusation, jugée sans fondement. Sir John Gregory, qui tenait à prouver son dire, nous invita à revenir le lendemain au palais du gouvernement. Il nous fit conduire aux archives où un fonctionnaire nous présenta les rapports concernant ce moine. Ils ont été établis il y a plus d'un siècle par le secrétaire de Woodes Rogers, premier gouverneur royal des Bahamas.
     
    – Autre ancien pirate ! précisa Kermor.
     
    – Plutôt corsaire que pirate, rectifia Carver. C'est pourquoi, en 1717, Woodes Rogers reçut mission du roi George I er de chasser pirates et flibustiers de l'île New Providence et de sa capitale Nassau, devenue, depuis le début du siècle, une véritable république de forbans. Notre ami français ignore peut-être – ajouta le major en se tournant vers Charles – que, depuis le début du siècle, près de mille cinq cents pirates vivaient là, à l'aise, dans la plus abjecte débauche, faisant ripaille, tirant en toute impunité de bons bénéfices du butin enlevé de vive force sur les navires espagnols, hollandais ou français dont ils massacraient équipages et passagers. Et cela, avec l'assentiment de Nicolas Trott, représentant patenté des lords propriétaires. Lesquels, j'ai le regret de le dire, s'accommodaient et parfois tiraient profit de la présence des pirates. Quand l'archipel devint colonie de la Couronne, à la demande de la Chambre des lords, nous savons comment Woodes Rogers débarrassa Nassau des canailles en se donnant pour règle de conduite : Expulsis Piratis. Restitute Commercie !
     
    – Nous connaissons tous ici ces vieilles histoires, coupa le docteur Kermor.
     
    – M. Desteyrac est peut-être en droit de les apprendre, répliqua sèchement le major.
     
    – Très bien ! S'il

Weitere Kostenlose Bücher