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Le Pont de Buena Vista

Le Pont de Buena Vista

Titel: Le Pont de Buena Vista Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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l'expédition du devis attendu.
     
    – Nous aurions dû commander votre pont à Leeds. Nous autres Anglais ne laissons pas traîner les affaires comme ces Américains qui veulent tout entreprendre à la fois. Je sais que les gens de Keystone Bridges Works ont accepté d'énormes demandes de rails pour le chemin de fer de l'Ouest, mais ce n'est pas raison suffisante pour négliger la commande d'un de leurs principaux actionnaires.
     
    Heureux de trouver un allié écouté de son oncle, Malcolm Murray obtint, avec l'aide de Charles, que le docteur Albert Weston Clarke partageât avec son confrère, David Kermor, la direction du futur hôpital. Ce dernier comprendrait une salle réservée aux insulaires blancs, sous l'autorité de Clarke ; une autre, confiée à Uncle Dave, accueillerait les marins de la flotte Cornfield et les indigènes qui, en dépit de cette ségrégation imposée par les mœurs coloniales, devraient bénéficier des mêmes soins que les Anglo-Saxons.
     
    – Et puis, si ça ne fonctionne pas bien, je ferai venir d'Angleterre un médecin en renom que me recommandera González et qui acceptera de s'exiler un an ou deux, si je le paie cher. Cela mettra nos deux médicastres d'accord ! conclut Simon Leonard, agacé par ces rivalités subalternes.
     
    Ces propos, commentés par Charles, Malcolm et Edward Carver lors d'une soirée au Loyalists Club, eurent un effet salutaire. Les deux médecins adoptèrent sans plus tergiverser les décisions prises sans leur avis à Cornfield Manor. David Kermor, informé par lady Lamia de l'engagement de Desteyrac au côté de l'architecte Murray, offrit à ses amis un dîner auquel le docteur Albert Weston Clarke et son épouse, ainsi que les Russell, acceptèrent de participer. Tous savaient que le maître de l'île entendait que chacun se tînt à la place par lui assignée.
     
    – Maintenant, je suis certain que nos praticiens, dont il ne faut pas totalement négliger les suggestions en matière de distribution des locaux de soins dans votre hôpital, se montreront plus conciliants, dit Charles à Malcolm.
     
    En peu de temps, depuis le duel de Pirates Tower et le soutien viril du Français, le jeune architecte avait mûri. Il mettait dans son travail autant de passion que d'application, et son amitié pour l'ingénieur s'était affirmée. Le neveu du lord avait renoncé à l'arrogance aristocratique qui avait si fort indisposé Charles à son égard lors de leurs premiers contacts.
     
    – Je vous dois, Charles, d'avoir retrouvé le goût de vivre et d'agir, l'envie d'être utile, de pratiquer mon art. Voyez-vous, j'en oublie ma boiterie, et je dirais même que je la domine de telle façon qu'elle peut passer inaperçue quand je rencontre la superbe Ounca Lou, que vous et Tilloy avez repêchée un jour de tempête.
     
    – Savez-vous que notre fringant lieutenant a emmené la belle à Nassau avec la bénédiction de sa marraine ? confia Charles, taquin.
     
    – Je sais Mark très entiché de cette demoiselle, mais je doute qu'il arrive à ses fins. Cette fille a du sang Cornfield et sa mère, descendante des premiers pionniers d'Eleuthera, lui a légué une volonté de fer. De plus, Ounca Lou est instruite et futée. À mon avis, elle n'ôtera sa chemise que la bague au doigt, car elle doit, étant de naissance illégitime, se faire une position. Très peu pour moi ! C'est pourquoi je laisse la place à notre cher Tilloy, qui a pour concurrent actif Michael Hocker, l'écrivain du Phoenix . Sous des dehors timides, ce garçon est un casse-cœur aussi redoutable que Lovelace, le héros de Richardson, dit Murray.
     
    – La compétition va donc devenir amusante, convint Charles.
     
    – Et stupide, car on a ici toutes les filles qu'on veut, si l'on sait s'y prendre, et les parents ne font jamais d'histoires. Il suffit de traiter gentiment ces petites, car elles sont sentimentales comme des juments. En revanche, il ne faut pas toucher aux femmes mariées. Le Christ ne viendra pas à Soledad sauver la femme adultère. On m'a raconté d'affreuses histoires d'épouses infidèles, exécutées par des maris trompés. Un gentleman, Charles, ne peut donc prendre le risque d'envoyer une femme, peut-être mère de famille, à la mort. Si vous le vouliez, je pourrais vous présenter des poulettes tout à fait désirables et sans manières, conclut Malcolm Murray, serviable.
     

    Trois jours plus tard, rentrant chez lui, Charles trouva, assise sur les

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