Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le Pont de Buena Vista

Le Pont de Buena Vista

Titel: Le Pont de Buena Vista Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
Vom Netzwerk:
deux San Salvador. Peut-être en discuterait-on encore si, vers 1680, un pirate, George Watling, homme très pieux, paraît-il, n'avait débarqué sur Guanahani-San Salvador avec ses troupes. Il s'y installa, construisit un château dont on voit encore les ruines, et donna son nom à l'île, sans tenir compte du passé légendaire. C'est d'ailleurs le nom de Watling Island que les cartographes anglais ont retenu : il figure, ainsi que vous le voyez, sur notre carte, dit Tilloy.
     
    Comme Desteyrac se taisait, l'officier reprit :
     
    – Sachez qu'une demi-douzaine d'îles de l'archipel, dont Samana Cay, et surtout, depuis 1846, Grand Turk, dont le propriétaire, M. George Gibbs, est soutenu par un érudit espagnol, Martín Fernandez de Navarrete, revendiquent l'honneur d'avoir accueilli le génial navigateur génois 3 . Enfin, n'oublions pas que Soledad même est sur les rangs ! acheva Tilloy, riant franchement.
     
    – Soledad aussi ?
     
    – Lord Simon assure que son grand-père, qui avait étudié des documents anciens et beaucoup conversé avec les pirates, navigateurs plus expérimentés que les historiens, affirmait que l'île autrefois découverte par Colomb était la sienne, dont le nom Soledad dit assez, d'après lui, la déconvenue des Espagnols débarqués sur une île alors déserte. Déçus et affamés, ils se seraient alors, guidés par des indigènes, reportés plus au sud sur Guanahani, riante et peuplée. Colomb aurait baptisé San Salvador cette petite île qui compte vingt-huit lacs. De tout l'archipel connu, c'est elle qui offre le plus d'eau douce. On conçoit donc que Colomb et ses marins assoiffés lui ait donné le nom du Sauveur.
     
    – Soledad aurait donc été la première escale, sinon la première résidence, observa Desteyrac.
     
    – Cette thèse a le don de faire sourire M. Colson et le major Carver. Mais je suis certain que Cornfield tentera de vous en convaincre. Peut-être vous montrera-t-il ce qui, à ses yeux, accrédite le bien-fondé de ses déductions : des doublons datés de 1491 et des débris de vaisselle du XV e  siècle, trouvés sur Soledad lors de travaux de construction.
     
    – Voilà un vrai mystère archéologique ! plaisanta Charles.
     
    – Il en existe bien d'autres sur nos îles, monsieur. C'est ce qui fait à la fois leur charme et leur danger, dit le lieutenant, soudain sérieux.
     
    – Parlez-moi encore, sinon de ses mystères, du moins du physique de Soledad, insista Charles.
     
    Penché sur la carte de l'archipel, Charles constata à haute voix que l'île affectait la forme d'une botte à chaudron comme en portaient, sous Louis XIII, les mousquetaires.
     
    – Disons plutôt qu'elle ressemble à un gros têtard cambré, plaisanta Tilloy.
     
    Assez large au nord, l'île s'étrécissait jusqu'au pied de la botte, dont la pointe allongée regardait vers l'ouest et Cat Island. Le talon de la botte, séparé de la jambe par un espace étroit, portait le nom de Buena Vista. Avide de précisions, Charles voulut en savoir davantage sur la topographie de l'île.
     
    – Vingt-deux miles 4 de long, au moins quatre miles au nord dans sa plus grande largeur. Nous nommons Cornfieldshire la vallée qui occupe le chaudron de la botte ou la tête du têtard, à votre choix. C'est là qu'ont été construits Cornfield Manor, la résidence de lord Simon, les habitations du major Carver, du capitaine Colson et de ses officiers, ainsi que les communs, qui abritent le personnel du manoir. C'est là sans doute que vous habiterez aussi. La jambe de la botte, dans sa partie la plus étroite, ne mesure qu'un petit mile de large. De là, on a vue sur l'océan des deux côtés de l'île. Au sud, le pied de la botte, puisque vous semblez attaché à cette comparaison, chausse cinq miles de long et trois quarts de mile d'épaisseur. Quant à l'îlot de Buena Vista, il s'inscrit, comme vous le voyez, dans un quadrilatère irrégulier de deux miles sur trois. Il est séparé de l'île principale par un pertuis de quarante pieds 5 de profondeur et de cinquante ou soixante pieds de largeur. Les géologues disent que les deux îles, la grande et la petite, n'en faisaient qu'une et que la continuité du socle rocheux, assez élevé à cet endroit, se rompit lors du bouleversement géologique consécutif à la fonte des glaces, après l'ère glaciaire, il y a cinquante mille ans. Les Arawak, superstitieux, nomment cette faille naturelle, aux parois abruptes,

Weitere Kostenlose Bücher