Le poursuivant d'amour
présent.
Tristan s’éloigna. Rien de glorieux, songea-t-il. Et, prenant son écuyer par le bras :
– Retournons aux chevaux.
Des cris, des supplications encore. Et des rires. Et même un chant, en langue bretonne.
– Après la liesse de Tortisambert, la saturnale du Pas-du-Beuil.
L’obscurité plus lourde, mais dépourvue de l’odeur de mort. Craquements de branchettes après les craquements d’os. Tristan se sentait les bras engourdis, les jambes molles. S’était-il tant battu ?
– Il me semble avoir rêvé cette embûche.
– Pas moi !… Qu’allons-nous faire ?
– Ne veux-tu pas demeurer auprès d’eux ?
Paindorge cracha :
– Je n’aime pas ces rustiques… pourtant, ils font la guerre comme nous, mais d’une façon que je réprouve.
– Les Goddons parfois se comportent ainsi. Nous n’avons pas à juger.
Tristan n’ajouta rien. Avait-il dissimulé sa pensée ? Il s’était senti inférieur à lui-même. Certes, il avait aidé Guesclin mais son geste lui avait échappé. À vouloir prouver qu’il avait un cerveau solide et un regard prompt, il s’était montré aussi près de l’animalité que les Charlots. N’importe : il avait prouvé à ces gens que, grâce à son habileté et à sa constitution, il pouvait se conduire comme un preux.
– Nous y sommes…
Quelques hommes marchèrent à leur rencontre.
– Alors ? demanda l’un d’eux, on a gagné.
– Oui.
L’homme se frotta les mains :
– Guesclin va vouloir fêter ça.
Il était tout à coup gonflé de vanité.
Tristan marcha vers Malaquin et le libéra de son arbre.
…… Prends ton cheval, Paindorge, et le sommier.
– Vous partez ? s’étonna le Charlot.
– Oui… Y vois-tu un inconvénient ?
– Mais… Bertrand ne sera pas content !… On ne quitte pas comme ça un chevalier de son espèce !
– Chevalier de mon cul, dit Tristan, apaisé. Nous partons. Sache-le : je lui ai sauvé la vie. Que lui faudrait-il de plus ? Je l’abandonne à sa jubilation et à son « Notre-Dame » de merde (544) !
Et à Paindorge :
– Allons, monte à cheval… Nous allons chevaucher. Dans une lieue, nous nous dégagerons de ce fer.
Le vent soufflait un peu. Un vent triste dépourvu de la moindre vertu sédative. Devant, au-delà du Pas-du-Breuil, c’était le noir, rien que le noir froid et inexorable…
ANNEXE I
GUY DE CHAULIAC
Guy de Chauliac naquit au commencement du XIVe siècle à Chauliac, petite cité du diocèse de Mende. Il fit ses études à Paris, Bologne et Montpellier où il reçut le titre de docteur en médecine.
Clerc du Chapitre lyonnais de Saint-Just en 1325, puis chanoine en cette église, il participa, à ce titre, le 13 mai 1344, suivant l’usage, au partage des revenus de son prédécesseur, Jean de Châtelard, mort deux jours auparavant. En 1348, lors de l’épidémie de peste, il se dévoua tant et si bien qu’il faillit succomber à la contagion. Sitôt remis, il commença à rédiger La grande chirurgie, ouvrage qui fut publié en 1363 et fit de son auteur une célébrité.
Le 18 août 1359, il rendit hommage, comme chanoine et prévôt du Chapitre, à Guillerme (Guillaume de Thury ouThurey), archevêque et comte de Lyon, en son château de Pierre-Scize. Parmi les témoins figurait Guichard de Vauzelle, chanoine. Il réitéra cet acte solennel auprès des nouveaux évêques, Charles d’Alençon et Renaud de Thurey… et recommença le 16 janvier 1368.
En 1366, il avait ouvert Le Livre de justice du canonicat. L’année suivante, sous l’archevêché de Jean de Talaru, il fut désigné comme hostelier, c’est-à-dire docteur du Petit Hôpital que le Chapitre de Saint-Just entretenait pour ses malades. Lors du partage des terres et seigneuries placées sous sa dépendance, on trouva Dardilly, Grézieux, Sainte-Foy et Brignais qui appartenait au Chapitre de Saint-Just depuis 1250. Quelques mois avant la bataille où l’armée française fut si terriblement anéan tie par les routiers (6 avril 1362), le Chapitre avait décidé de consolider le château puisque Guy de Chauliac ne s’en souciait pas. En même temps, Lyon se fortifiait aussi, ce qui n’était pas du goût de ses habitants puisqu’ils étaient frappés d’un nouvel impôt Jean Quartier, procureur de Chauliac, fut parmi les protestataires.
Les héritiers de Guy de Chauliac (ses frères Guillot et Bernard ainsi que son neveu, Etienne, dit Cabasset) durent
Weitere Kostenlose Bücher