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Le Pré-aux-Clercs

Titel: Le Pré-aux-Clercs Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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suis un ancien truand, le fait est là, le comte le sait, vous le savez, tout le monde le sait…
    – Chevalier, interrompit Ferrière avec gravité, vous voulez m’éprouver…, et ce n’est pas bien de douter ainsi de mon amitié. Si tout autre que vous disait devant moi ce que vous venez de dire de vous-même, je lui rentrerais les mots dans la gorge à coups de dague. Quelle mouche vous pique donc ? Ceux qui vous connaissent savent qu’il n’y a pas de gentilhomme plus accompli que vous. Et moi je me tiens pour très honoré de me dire votre ami. Est-ce, par hasard, que vous voulez me faire dire cela ? Ainsi, c’est votre conviction ?
    – Absolue. Mais si vous doutez, vous, il est un moyen bien simple de vous tirer d’embarras : c’est de le lui demander à lui-même.
    – Ainsi ferai-je dès la première fois que je le verrai », répondit Ferrière.

XVII – ESCARMOUCHE
    Ce fut vers sept heures du soir, environ une demi-heure avant le coucher du soleil, qu’ils se décidèrent à lever le siège.
    Pour sortir de la salle, il leur fallait passer devant une table placée devant une fenêtre ouverte. Cette table était occupée par quatre clients entrés depuis peu, sans qu’ils y eussent pris garde. Ces quatre clients, c’était Malicorne, accompagné de trois soudards de son espèce.
    Cependant, Malicorne n’oubliait pas que le cardinal tenait à être débarrassé de Beaurevers. Et comme, somme toute, il reconnaissait qu’il pouvait être battu, il s’était fait accompagner par une quinzaine de soldats qui, au cas où il lui arriverait malheur, devaient tomber sur le dos de Beaurevers, de manière qu’il pût profiter de sa victoire, et que l’ordre de son Éminence se trouvât dûment exécuté.
    Le hasard ayant amené Malicorne à l’auberge du Pré et lui ayant fait découvrir Beaurevers dans le coin où il s’entretenait avec Ferrière, le digne capitaine avait posté ses quinze soldats dans le jardin et était venu s’attabler, avec trois compagnons, non loin des deux jeunes gens. Ceci fait, le soudard attendit l’occasion de lancer sa provocation.
    Cette occasion finit par se présenter au moment où les deux jeunes gens passèrent à portée de la table où se tenaient Malicorne et ses amis. Et comme leur attente ne s’était pas faite sans entonner force rasades, les quatre compagnons étaient convenablement excités au moment où cette occasion se présenta.
    Courtoisement, Beaurevers avait cédé le pas à Ferrière. Le vicomte passa sans difficulté, en s’excusant poliment. Mais lorsque Beaurevers s’engagea dans l’étroit espace qui séparait les deux tables, Malicorne lança sa provocation qu’il devait avoir longuement préparée.
    S’adressant à ses amis comme s’il poursuivait une conversation déjà engagée, d’une voix de stentor qui fut entendue aux quatre coins de la salle :
    « Çà, que me disiez-vous donc que cette auberge est la mieux fréquentée de tout Paris et de ses environs !… J’y vois, quant à moi, de vrais suppôts de potence, piliers de pilori, qu’on ne devrait pas voir dans une honnête auberge. Tenez, regardez-moi ce grand faquin avec sa moustache au vent et sa hure insolente ! Dieu me damne ! Le drôle va nous marcher sur les pieds ! Mais je le reconnais, c’est un truand de basse truanderie, un flambard de petite flambe ! Holà ! Drôle, coquin, je vais t’apprendre à te frotter à d’honnêtes soldats comme nous !… »
    Ferrière s’était retourné vivement. Les quatre s’étaient avancés précipitamment, roulant des yeux terribles.
    Quant à Beaurevers, il était livide. Non pas tant de l’inqualifiable sortie, mais de la violence qu’il se faisait pour demeurer calme. D’un coup d’œil il contint Ferrière qui allait intervenir. De la main, il imposa silence aux quatre braves qui allaient répliquer. Et la voix blanche, un sourire terrible aux lèvres, il railla :
    « Il est certain que l’honnête soldat Malicorne n’est pas, lui, un pauvre truand de la basse truanderie. Peste non ! Capitaine d’une compagnie de routiers, honnêtes détrousseurs de grands chemins, c’est un truand de grande envergure. Aussi, comme il serait tout à fait indigne de lui de se commettre en aussi piètre compagnie, je lui conseille de filer vivement. »
    Malicorne se leva lourdement, il se carra devant Beaurevers, impassible, qu’il dominait de toute la tête, et il ricana :
    « C’est toi, petit flambard

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