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Le Prince Que Voilà

Le Prince Que Voilà

Titel: Le Prince Que Voilà Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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sans gêne aucune l’un après l’autre à la lumière du chandelier que
Miroul venait de poser sur la table, en renfort de ma chandelle et moi-même le
contr’envisageant fort curieusement et lui trouvant l’air beaucoup plus d’un
renard que d’une mouche, l’œil fendu, oblique, fureteur, épiant ; le nez
long, le museau fin, la moustache fauve et hérissée, l’oreille grande ; toute
la face comme tirée en avant par l’avidité à voir, entendre et surprendre, et
je ne sais quoi dans la façon dont il posait le pied qui trahissait une
aptitude à fuir au moindre péril, encore qu’il y eût en même temps en lui une
sorte d’impudence qui lui devait tenir lieu de courage dans les
occasions ; au reste, beaucoup d’esprit en sa physionomie rusée et
mobile ; la taille médiocre et la corpulence fluette, mais non sans
quelque réserve de force et d’agilité à ce que j’opinai, m’apensant que cette
mouche-là devait savoir à toute extrémité, piquer, et de l’épée, et de la
dague. Pour sa vêture, il était habillé de gris sombre et il eût eu la mine
d’un notaire sans les armes que j’ai dites.
    — Monsieur le Chevalier, dit
Mosca avec un de ses coutumiers petits saluts, peux-je quérir de vous si vous
avez vu de longtemps Dame Larissa de Montcalm (à ce nom, Giacomi tressaillit)
en Paris ?
    — Je l’ai vue en Paris vers la
fin janvier, je gage : j’entends il y a de cela trois bons mois.
    À quoi Mosca sourit, découvrant des
petites dents jaunes et acérées et dit :
    — Elle s’y encontre derechef
ces trois jours écoulés.
    — Et où cela ? cria
Giacomi.
    — Maestro, dit Mosca, je ne baille pas mes informations de gratis. Je les
vends contre clicailles trébuchantes.
    À cela, je ne faillis pas de voir
que Giacomi à mes côtés brûlait de verser tout de gob son escarcelle dans la
gueule de ce renard, aussi lui posai-je la main sur le bras et lui glissai à
l’oreille «  lasciatemi parlare [17]  »,
ayant fiance davantage en mon ménagement huguenot quand il s’agit de
barguigner.
    — Monsieur Mosca, dis-je, je ne
connais pas votre nom véritable. Peux-je au moins savoir votre état, étant fort
manifeste que la valeur de vos nouvelles y sera quelque peu liée.
    — Monsieur le Chevalier, dit
Mosca après avoir balancé un petit, bien me surnommé-je la mouche, pour ce que
je suis les yeux et les oreilles de celui qui m’emploie.
    — Mais qui vous emploie, Maître
Mouche ?
    — Celui que vous servez, dit
Mosca avec un petit salut.
    — Et à celui-là, dis-je,
vendez-vous aussi vos nouvelles ?
    — Assurément.
    — Adonc, vous lui avez déjà
vendu celles que nous barguignons.
    — Oui-dà.
    — En ce cas, mon maître
m’aimant fort, il me les baillera de gratis.
    — Que nenni. Ces nouvelles
touchent à des secrets d’État, et notre maître a là-dessus la bouche fort
cousue, et même à sa mère n’en dit mot.
    À cela je me réfléchis un petit, et
ne doutai pas en mon for que Mosca eût dit vrai, le Roi étant de force méfiant
et dissimulé, tant de traîtres l’environnant, et jusque sur les degrés du
trône.
    — Monsieur Mosca, dis-je,
vendriez-vous vos nouvelles aux ennemis du Roi ?
    — Il faudrait pour cela que je
leur avoue les avoir espionnés, ce qui n’irait pas pour moi sans péril.
    — Je me serais apensé, dis-je
avec un sourire, que vous ne voudriez point leur vendre leurs propres secrets
par affection pour notre maître.
    — Monsieur le Chevalier, dit
Mosca, je ne pimploche pas mon discours. J’aime fort celui que vous dites, mais
je suis surtout affectionné à moi-même, à mon col que j’entends préserver, et à
mon escarcelle.
    — Monsieur, dis-je gravement,
je commence à goûter votre compagnie : Vous n’êtes pas chattemite. Et
combien entendez-vous ce soir rajouter à votre escarcelle ?
    — Cela dépend : s’il n’est
question que du logement de Dame Larissa en Paris, vingt-cinq écus. S’il est
question de Samarcas, cent.
    — Holà ! dis-je, cent
écus !
    — C’est que Samarcas touche aux
secrets que j’ai dits.
    — Monsieur Mosca, dis-je,
voyons d’abord pour le logis. Nous verrons ensuite le jésuite. Eh bien ?
Qu’est cela ? Vous ne pipez ?
    — C’est qu’il vous faut de
prime ma langue délier.
    Et pour ce déliement, il ne fallut
pas moins que vider, et ma bourse, et celle de Giacomi. Sur quoi, tendant à
Miroul mon escarcelle, je lui commandai en oc à

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