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Le Prisonnier de Trafalgar

Le Prisonnier de Trafalgar

Titel: Le Prisonnier de Trafalgar Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Escarpit
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l’oisillon commençait à trouver le nid trop petit et rêvait du vaste monde à la fois avec terreur et fascination. Hazembat faisait partie de la fascination.  
    Il ressentait cette responsabilité comme un poids et comme une joie. La tendresse ambiguë qu’il éprouvait pour Jenny était celle d’un grand frère, mais, quand il laissait remonter en lui l’adolescent qu’il n’avait jamais eu le temps d’être, elle avait la fraîcheur des amours enfantines. Il devait se défendre contre la tentation de retrouver en Jenny la Pouriquète d’autrefois, craignant de s’enfermer, comme Lucy, dans un rêve funèbre et nostalgique. Il lui fallait tout son équilibre de Gascon bien enraciné dans la vie pour conjurer le mirage.  
    Avec les beaux jours, revinrent les promenades sur le Firth. Sir John voulait revoir les sites de son enfance : Burnt Island où avait vécu Marie Stuart, Kirkaldy où était né Adam Smith, Leven d’où l’on exportait le charbon du Forth. Il montra un tout petit village entre Leven et Anstruther :  
    — Tu vois, Hazy, ici, c’est Largo, le berceau de la famille d’un navigateur plus intrépide encore que toi. Il s’appelait Alexander Selkirk et Daniel De Fœ a écrit un roman sur ses aventures.  
    Jenny raconta l’histoire de Robinson Crusoé à Hazembat.  
    — Je suis sûr, Hazy, dit-elle, que votre Vendredi à vous aurait été une fille. Comment l’auriez-vous appelée ?  
    — Liberté, peut-être, Jenny.  
    C’est à la fin d’août, quelques jours après l’anniversaire de Jenny, que Sir John eut son attaque. Mac Leod pratiqua immédiatement des saignées aux bras, au cou et à la tête. Le vieil homme paraissait complètement paralysé. Jenny, Miss Rowan, Lorna et Mrs Drumclog se relayèrent pour lui maintenir sur le front des compresses d’eau fraîche. Le lendemain, il était encore en vie et paraissait respirer plus facilement.  
    — Il faut attendre pour savoir si c’est un simple coup de sang ou une apoplexie grave, dit Mac Leod. Tout dépendra de la rapidité avec laquelle les symptômes disparaîtront…, s’ils disparaissent.  
    Il suffit d’une semaine pour que la robuste constitution du vieux juge reprît le dessus. D’abord, il parvint à parler d’une voix épaisse, à peine intelligible. Ce fut pour réclamer du whisky. Mac Leod lui en permit un fond de verre, arguant qu’il avait vu l’ usquebaugh faire des miracles en pareils cas. Sir John eut du mal à l’avaler mais, trois jours plus tard, il demanda de la nourriture et Mrs Drumclog lui prépara un porridge au lait de brebis. Puis il arriva à remuer la main gauche et, peu à peu, à mesure que l’été avançait, il apparut que la paralysie se limiterait au côté droit.  
    Profondément choquée et inquiète, Jenny ne quittait pas son oncle. Parfois, quand le vieillard somnolait, elle allait se confier à Hazembat.  
    — S’il mourait, je n’aurais plus personne au monde que vous, Hazy.  
    — Mais je ne suis pas votre parent. Vous avez de la famille.  
    — Je veux dire quelqu’un avec qui je me sente en sécurité. Promettez-moi que vous ne me quitterez pas, Hazy.  
    A la fin de septembre, Sir John réussit à faire quelques pas avec une canne, appuyé sur le bras de Mac Leod. Il ne cessait de se disputer avec le médecin qui l’exhortait à la prudence.  
    — Vous avez bien supporté cette attaque, Sir John, mais il n’est pas certain que vous en supportiez une autre.  
    — Et alors ? Un Dalrymple n’a pas peur de la mort !  
    — Rentrez au moins à Edimbourg, vous y serez mieux soigné.  
    — Non, si je meurs, je préfère que ce soit ici. Ma mort ne m’inquiète que pour Jenny. Je ne sais pas ce que Hew est capable de faire. Il faudrait le prévenir.  
    — J’ai écrit à votre fils, à Portsmouth, mais qui sait où il se trouve en ce moment ?  
    Le major Dalrymple arriva à Bass Rock le 15 janvier 1810, à bord du cotre de Mac Tavish.  
    — Nous étions en manœuvres, expliqua-t-il. Le mois prochain, mon bataillon va rejoindre le général Wellesley… pardon, Lord Wellington qui est en difficulté au Portugal. A défaut de victoires, il a au moins remporté un titre de vicomte.  
    D’après ses renseignements, Sir Hew était à Cadix, assiégé par les Français, et Lady Dalrymple avait quitté Gibraltar pour l’Angleterre.  
    — Elle doit être en route. J’espère que nous aurons de ses nouvelles d’ici peu.

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