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Le prix de l'hérésie

Le prix de l'hérésie

Titel: Le prix de l'hérésie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: S.J. Parris
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qui vive de notre
rencontre, à part Sidney.
    — Votre Honneur, j’étais prêtre autrefois. Je peux
mentir aussi bien que n’importe qui. »
    Il sourit.
    « J’y compte bien. Vous ne vous seriez pas joué de
l’Inquisition depuis si longtemps sans un certain talent pour la
dissimulation. »
    Ainsi devins-je membre à part entière de ce qui formait, je
l’appris plus tard, un vaste et complexe réseau d’informateurs, s’étendant des
colonies du Nouveau Monde à la terre des Turcs à l’est. Tous nous revenions
vers Walsingham lui faire don des petits secrets que nous avions glanés, de
même que la colombe retourne à Noé porteuse d’un rameau d’olivier.
     
    Un soudain coup de tonnerre dans le ciel me tira de mes
souvenirs et me ramena à la réalité, dans la chambre du palais royal où j’étais
appuyé contre la fenêtre battue par la pluie, à regarder la cour illuminée par
les éclairs. En Angleterre, j’avais espéré vivre en paix et écrire les livres
qui, je voulais le croire, feraient vaciller la chrétienté sur ses fondations.
Mais j’étais ambitieux, pour mon malheur. L’ambition, quand on n’en a ni les
moyens ni la position, vous rend dépendant de l’appui d’hommes plus puissants.
Ou, dans mon cas, de femmes. Le lendemain, j’allais découvrir la grande cité
universitaire d’Oxford, où je devrais dénicher deux pépites : les secrets
des catholiques de la ville, que Walsingham voulait, et le livre que je pensais
enfoui dans l’une de ses bibliothèques.

 
DEUXIÈME PARTIE

Oxford, mai 1583

 
CHAPITRE 2
    Le lendemain matin, dès les premières lueurs du jour, nous
partîmes pour Oxford sur des chevaux que Sidney avait réussi à se procurer
auprès de l’intendant de Windsor, de belles montures aux somptueux harnais de
velours pourpre et or, parsemés de clous de cuivre qui tintaient joyeusement
tandis que nous avancions. Nous formions une compagnie bien plus solennelle que
la veille, lorsque nous nous étions engagés sur la Tamise au milieu de la
musique et des fanions colorés. L’orage avait cessé mais la pluie s’était
installée durablement, il n’y avait plus la moindre chaleur dans l’air et le
morne ciel gris semblait s’affaisser sur nous. Il aurait été impossible de
voyager par le fleuve sans être à demi noyé. Beaucoup moins disert au petit
déjeuner, le palatin s’était massé les tempes du bout des doigts, n’émettant
qu’un faible gémissement de temps à autre. Sidney m’avait murmuré que c’était
sa punition pour une soirée terminée tard et les prodigieuses quantités de
porto qu’il avait bues, et mon humeur s’en était trouvée améliorée. Comme ses
gains avaient enflé en proportion directe avec la boisson ingérée par le
palatin, Sidney était jovial. Néanmoins, la pluie avait douché notre bonne
humeur et nous accomplîmes la première partie du trajet en silence, seulement
rompu çà et là par les observations de Sidney sur les conditions de route ou
par les renvois du palatin, qui ne daignait pas s’en excuser.
    De chaque côté, le paysage d’un vert profond défilait,
toujours semblable, loqueteux sous la pluie, et l’on n’entendait que le
martèlement sourd des sabots sur la piste détrempée. Sidney chevauchait à ma
hauteur, en tête de troupe. À l’arrière, le palatin, le menton tombant sur la
poitrine, était flanqué de deux de ses gens dont les chevaux portaient les
sacoches contenant le linge de Laski et de Sidney pour notre séjour. Je n’avais
emporté qu’un sac en cuir, attaché à ma selle, rempli de livres et de quelques
affaires de rechange. Vers le milieu de l’après-midi, nous pénétrâmes dans la
forêt de Shotover, aux alentours d’Oxford. Au cœur de la forêt, la route était
mal entretenue et nous dûmes ralentir pour que les chevaux ne trébuchent pas
dans les flaques et les fondrières.
    « Alors, Bruno, m’aborda Sidney à voix basse quand nous
fûmes hors de portée du palatin et de ses domestiques. Dis-m’en plus sur ce
livre pour lequel tu as fait tout ce chemin depuis Paris.
    — Depuis un siècle, on le pense perdu, commençai-je,
mais je n’y ai jamais cru. Et partout sur le continent, j’ai rencontré des
colporteurs et des collectionneurs qui relaient des rumeurs et des histoires à
moitié oubliées sur l’endroit où il pourrait se trouver. Cependant, il m’a
fallu attendre d’arriver à Paris avant de dénicher la preuve que ce livre
existe

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