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Le prix de l'indépendance

Titel: Le prix de l'indépendance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Diana Gabaldon
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de temps à autre, le mugissement grave et surprenant d’un butor s’élevait au-dessus de l’eau. Il entendait également des bruits de pas furtifs et d’éclaboussures. Des rats musqués, peut-être ?
    Un gros plouf ! lui apprit qu’une tortue venait de se laisser tomber dans l’eau depuis un tronc couché. Il préférait ces sons-là car ils étaient identifiables. Les autres, les bruissements vagues, étaient plus inquiétants. Etait-ce un frottement de branches ? Il n’y avait pas un poil de vent. Un animal en train de chasser ? Il perçut un petit cri aigu subitement interrompu. Puis il y avait les craquements et les gémissements du marais lui-même.
    Dans les montagnes autour de Helwater, le domaine de ses grands-parents dans le Lake District, il avait entendu les rochers se parler dans le brouillard. Il n’en avait jamais parlé à personne.
    Il bougea légèrement et sentit quelque chose sous son menton. Il approcha sa main : une sangsue était accrochée dans son cou. Il l’arracha avec dégoût et la lança le plus loin possible, avant de se palper pour voir s’il y en avait d’autres. Puis il se recroquevilla à nouveau, essayant de repousser les souvenirs qui affluaient. Il avait également entendu sa mère, sa vraie mère. C’était la raison pour laquelle il s’était aventuré dans le brouillard. Ils étaient en train de pique-niquer dans la montagne, ses grands-parents, maman Isobel, quelques amis et des domestiques, quand le brouillard était subitement descendu comme cela arrivait souvent en altitude. Pendant que les adultes rassemblaient en hâte les affaires, il avait été laissé livré à lui-même, observant le grand mur blanc s’avancer silencieusement vers lui.
    Il avait alors entendu une femme chuchoter, trop bas pour qu’il distingue ses paroles mais d’une voix chargée de nostalgie. Il était certain qu’elle s’adressait à lui.
    Il était entré dans le brouillard. En un premier temps, il avait été fasciné par le mouvement de la vapeur d’eau près du sol, par la manière dont elle oscillait, chatoyait et semblait vivante. Puis le brouillard s’était épaissi et, quelques instants plus tard, il avait compris qu’il était perdu.
    Il avait appelé. D’abord la femme qu’il pensait être sa mère. Les morts descendent avec le brouillard . C’était à peu près tout ce qu’il savait d’elle… qu’elle était morte. Il avait vu trois portraits d’elle. On disait qu’il avait sa chevelure et son talent pour amadouer les chevaux.
    Elle lui avait répondu, il l’aurait juré. Mais d’une voix sans paroles. Il avait senti la caresse de doigts froids sur son visage et il avait continué d’avancer, captivé.
    Puis il était tombé, trébuchant contre des pierres et roulant dans une petite dépression. Il était resté étourdi et le souffle coupé quelques instants tandis que le brouillard l’enveloppait puis il avait entendu les rochers murmurer tout autour de lui. Il avait bondi sur ses pieds et s’était mis à courir à toutes jambes en hurlant. Il avait fait une nouvelle chute, s’était relevé, avait repris sa course, était retombé. Alors, incapable d’aller plus loin, il s’était roulé en boule, terrifié et aveuglé, cerné par le néant. Puis il avait entendu son nom, crié cette fois par des voix connues. Il avait tenté de répondre mais sa gorge irritée d’avoir tant crié ne produisait que des râles désespérés. Il s’était élancé dans la direction des voix. Hélas, dans le brouillard, les sons se déplacent et rien n’est jamais là où on l’attend.
    Encore, encore et encore, il avait couru dans une direction puis une autre, jusqu’à ce qu’il tombe à nouveau. Il avait dévalé une pente, rebondi sur des affleurements et s’était retrouvé cramponné au bord d’un escarpement, les voix à présent derrière lui, qui s’éloignaient, l’abandonnaient.
    C’était Mac qui l’avait trouvé. Une grande main avait surgi, l’avait hissé sur la terre ferme et, l’instant suivant, il se blottissait, contusionné, égratigné et en sang, contre la chemise rêche du palefrenier écossais, ses bras puissants le serrant comme s’ils ne devaient plus jamais le lâcher.
    Dans les années qui avaient suivi, le brouillard était souvent venu hanter ses rêves. Parfois, il se réveillait dans les bras deMac. Quand l’Ecossais n’était pas là, il émergeait de son cauchemar en nage, incapable de se rendormir de crainte

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