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Le quatrième cavalier

Le quatrième cavalier

Titel: Le quatrième cavalier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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Dans la bataille, bien sûr, Svein
était comme tous les Danes, terrifiant ; mais il réfléchissait beaucoup
avant de se battre.
    Nous attendîmes une journée que Svein ait réglé ses affaires
avec Callyn, en profitant pour vendre peaux et étain aux marchands. Bien que
nous n’en ayons pas tiré beaucoup, c’était mieux de se charger d’argent que d’une
cargaison encombrante. Le Fyrdraca étincelait d’argent, désormais, et
les hommes, sachant qu’ils en toucheraient leur part, étaient heureux. Haesten
voulait partir avec Svein, mais je refusai.
    — Je t’ai sauvé la vie, lui rappelai-je, et tu dois me
servir encore pour m’en payer.
    Il accepta et fut content de recevoir un autre bracelet en
récompense pour les hommes qu’il avait tués à Dreyndynas.
    Le Cheval-Blanc était plus petit que le Fyrdraca. Sa
proue portait une tête de cheval, et sa poupe une tête de loup, tandis que le
mât s’ornait d’une girouette à tête de cheval. Je lui en demandai la raison ;
il éclata de rire.
    — Quand j’avais seize ans, dit-il, j’ai joué l’étalon
de mon père contre le cheval blanc de notre roi. J’ai dû battre le champion du
roi à la lutte et à l’épée. Mon père m’a battu pour avoir fait ce pari, mais j’ai
gagné ! Aussi le cheval blanc est-il mon porte-bonheur. Je n’en monte
point d’autres.
    — Nous restons avec lui ? demanda Leofric à notre
retour, intrigué de nous voir partir vers l’ouest plutôt que vers le Defnascir.
    — J’ai dans l’idée de voir où finit l’Anglie, dis-je.
    Je n’avais aucun désir de retrouver l’Uisc et Mildrith.
    Svein chargea les esclaves dans son bateau. Nous passâmes
une dernière nuit dans la baie où s’élevait la fumée des incendies, et partîmes
à l’aube. Alors que nous passions le cap ouest, vers le large, je vis un
guetteur sur une falaise. Il portait un froc noir : bien qu’il se trouvât
fort loin, il me sembla reconnaître Asser. Iseult le vit aussi, et siffla comme
un chat en brandissant le poing, ouvrant les doigts comme pour lui jeter un
sort.
    Puis je l’oubliai, parce que le Fyrdraca avait
retrouvé la mer et que nous allions au bout du monde. Et que j’avais une reine
de l’ombre pour compagne.

4
    J’aime la mer. J’ai grandi à côté d’elle, même si dans mes
souvenirs la mer de Bebbanburg est grise, souvent maussade et rarement baignée
de soleil. Elle n’est en rien comme les grandes vagues qui déferlent d’au-delà
des îles des Morts et s’abattent en grand fracas sur les rochers de l’ouest de
l’Anglie. Là-bas, la mer se soulève comme si les dieux de l’océan bandaient
leurs muscles, les oiseaux blancs crient sans cesse et le vent projette des
nuages d’embruns contre les falaises. Le Fyrdraca, filant dans ce vent, laissait
un sillon dans les flots. La rame du gouvernail me résistait, vibrant sous la
force de l’eau, les tressautements du navire et la joie du voyage. Iseult me
regardait, étonnée de mon bonheur, mais je lui confiai la rame et regardai son
frêle corps tressaillir sous la puissance de la mer. Comprenant alors la force
de cette rame qui pouvait gouverner le navire, elle éclata de rire.
    — Je voudrais vivre en mer, lui dis-je, bien qu’elle ne
me comprît pas.
    Je lui avais offert un bracelet pris dans le trésor de
Peredur, un anneau d’orteil en argent et un collier de dents de monstre, longues,
blanches et acérées, enfilées sur un fil d’argent.
    Je me retournai pour suivre du regard le Cheval-Blanc de
Svein qui fendait l’eau. Parfois, sa proue brisait une vague : alors, l’avant
de la coque, verdie par les algues, s’élevait vers le Ciel, la tête de cheval
défiant le soleil, avant de retomber dans une gerbe d’écume blanche. Ses rames,
comme les nôtres, étaient rentrées, et les écoutilles bouchées. Nous voguions l’un
et l’autre sous voile. Le Fyrdraca était plus rapide, non parce qu’il
était plus habilement construit mais en raison de sa coque plus longue.
    Il y a vif plaisir dans un bon navire, et plus grand encore
lorsque son ventre est plein de l’argent volé aux autres. Telle est la joie du
Viking, qui mène une proue couronnée d’une tête de dragon, dans une mer battue
par les vents, vers un avenir rempli de festins et de rires. Les Danes me l’avaient
enseigné et je les aimais pour cela, même s’ils étaient des porcs païens. Pour
l’heure, devançant le Cheval-Blanc, j’étais le plus heureux des hommes,

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