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Le règne des lions

Le règne des lions

Titel: Le règne des lions Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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peu au fond de la cavité, puis sur chacune des bandelettes dont je la remplis, jusqu’à les imbiber. Les dernières formèrent bandage. Ensuite, seulement, je tirai la cordelette, ramenant en la pièce le valet d’Henri.
    — Nettoie partout et soigneusement. Mais ne quitte jamais ton roi du regard. Le temps de me rafraîchir et je reviens. S’il s’éveille, me réclame ou s’évide des quelques couleurs qui lui restent, viens me quérir. En courant. Une dernière chose. Nul ne doit savoir. Si la nouvelle filtre, tu seras châtié en conséquence.
    Il acquiesça et je quittai enfin cette chambre dans la plus totale des incertitudes. Les jours à venir verraient le roi guérir ou trépasser.

50
     
     
    J aufré, avec cette indulgence coutumière qui lui faisait me pardonner même l’impardonnable, à savoir son inquiétude, m’assura de sa confiance. Elle était aveugle mais je l’acceptai comme telle. J’en avais besoin. Il m’avait cherchée pour m’avertir de l’arrivée de Breri le Gallois, dont j’appréciais depuis longtemps les chansons. N’avait-il pas été le premier à introduire sur le continent la matière de Bretagne ? Les enfants le cernaient déjà. Frottée du sang, du pus et de l’odeur de chair brûlée, je m’apprêtais pour une longue veille, le laissant retourner donner le change auprès d’Aliénor et du barde. Rien de mieux que le prétexte d’une migraine pour excuser l’absence.
     
    Henri reprit connaissance tard dans la nuit, par une succession de gémissements qui m’arracha du sommeil où je m’étais engluée. J’avais aidé le valet à le recoucher après qu’il l’eut nettoyé et changé, puis, dédaignant le fauteuil nettoyé, j’en avais approché un autre et m’y étais oubliée. Si le brave homme n’avait jugé bon de me rapporter un plateau chargé de victuailles, je n’aurais pas même mangé. De fait, le nez encombré des odeurs qui, malgré plusieurs minutes d’aération, persistaient, j’avais oscillé entre le besoin de me sustenter et la nausée, avant de sombrer d’un bloc dans ma propre obscurité.
    Éveillée dans la froidure de la pièce rendue à la pénombre, je dénouai mes membres engourdis par un étirement léger puis me levai pour regagner la cheminée. Des braises y rougissaient encore, que j’attisai d’un souffle. Le petit bois s’embrasa. J’attendis quelques secondes, savourant ces flammes vives, l’oreille surveillant les signes de vie du roi, puis rechargeai le foyer de bûches plus conséquentes. Quelques minutes plus tard, ayant allumé une lampe à huile, je la balayai au-dessus de ses traits immobiles pour jauger sa réaction. Elle ne se fit pas attendre. Gêné par la lumière, il détourna la tête. Rassurée, je me débarrassais de l’éclairage sur la table de chevet. La fièvre s’était atténuée.
    — Soif, grogna-t-il, la bouche pâteuse.
    Je lui relevai la nuque d’une main, rapprochai un gobelet tenu à proximité, de l’autre. Il le vida puis pesa dans ma paume, assez pour que je comprenne qu’il voulait retrouver le confort de l’oreiller. Durant un bon quart d’heure, il demeura silencieux, les yeux clos, le souffle régulier. J’avais repris mon assise avec la discrétion des gardiens. Il finit par rompre le silence :
    — Quelles sont mes chances ?
    — Je ne peux me prononcer encore, Henri, mais j’ai bon espoir, si vous vous accordez mieux à mes conseils qu’à ceux de votre barbier.
    Il tourna cette fois son visage vers moi, les yeux redevenus vifs.
    — Je ne parle pas de cette blessure-ci, Loanna de Grimwald.
    Toutes les pourritures n’étaient pas nettoyées. Je soupirai.
    — Je doute qu’une réconciliation soit encore possible entre la reine et vous. Quant à Rosamund Clifford, elle vous attend.
    Il s’en accommoda un temps puis sourit.
    — J’ai douté de toi, sais-tu ?
    Je ne répondis pas. Il referma les yeux.
    — J’ai, il est vrai, accumulé suffisamment d’erreurs pour te détourner de moi. Entends ce que tu veux, Canillette, mais je ne veux pas te perdre. Toi moins que toute autre.
    — Allons donc. Vous n’avez plus besoin de moi depuis longtemps.
    — Tu te trompes. Je t’aime toujours.
    Instinctivement, je me durcis. Il ricana.
    — Croyais-tu vraiment que Rosamund avait pu tuer mon attachement ? J’éprouve pour elle une attirance irraisonnée, une pulsion au-delà de toute mesure, je le confesse. Au point de ne pouvoir envisager ma vie

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