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Le règne des lions

Le règne des lions

Titel: Le règne des lions Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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d’intérêt. Le silence était plus épais que le brouillard de Londres. Il sourit, satisfait.
    — Bien évidemment, il me les offrit. Ainsi, je passai un bon mois après la mort de mon fils Guillaume, retranché dans leur déchiffrage…
    Un regard, cette fois vers Aliénor. Elle hocha discrètement la tête pour le remercier de lever ainsi le voile sur son étrange disparition. Déjà, Henri poursuivait :
    –… Leur lecture dissipa mes derniers doutes et me fit galoper jusqu’à Tintagel, lieu de naissance du roi Arthur, où je rencontrai Renaud de Cornwall qui avait aidé le sire de Monmouth dans ses recherches. Plantées en avant d’une côte abrupte, à la lande rase, les ruines de l’ancien castel défient encore les embruns. Elles me ramenèrent à la paix, si bien que je confiai le soin à Renaud de Cornwall de les redresser et de rendre au castel sa bannière et ses couleurs.
    L’annonce fit son effet. Depuis que le sire de Monmouth avait écrit cet ouvrage reprenant les récits du barde Breri sur la Bretagne, faisant des émules, la cour ne vivait plus que pour la légende du roi Arthur et celle de son guide, mon ancêtre Merlin. Les dames portèrent leurs mains aux lèvres. Les Normands s’émurent avec retenue, se contentant de hocher la tête ou de lisser les pans de leur barbe. Les barons aquitains accueillirent la nouvelle avec plus de réserve. Jaufré me couvrit d’un œil sceptique. Je haussai les épaules. Henri, soudain, s’appropriait l’Histoire. Je n’avais pas besoin de preuves, quant à moi, pour connaître la mienne et celle de ma lignée. Une simple visite au gigantesque cercle de pierres levées de la région de Salisbury m’avait suffi pour retrouver en Angleterre, comme à Brocéliande, le souffle de magie de Merlin.
    Le valet, appelé par Henri, entra dans la pièce, portant sur ses avant-bras une pièce longue de quatre pieds, enveloppée d’un tissu en fil d’ortie.
    Faisant taire les murmures qui s’étaient levés, Henri récupéra l’objet. Ses traits, presque extatiques soudain, m’inquiétèrent sans que je puisse l’expliquer. Il se tourna pourtant vers moi et me sourit.
    — Vous imaginez, mes amis, que je ne pouvais en rester là. Un des manuscrits affirmait que le roi Arthur avait été enseveli auprès de son épouse Guenièvre, près de l’abbaye de Glastonbury. J’y fis mener des fouilles et…
    S’avançant, il vint me présenter sa découverte.
    — Ouvrez-le, je vous prie, dame Loanna.
    Je défis les lacets de cuir, écartai les pans de toile, agacée de l’excitation d’Aliénor qui battait des mains à mes côtés. Une lame parut, le silence se fit. Ravi de mon trouble, Henri la prit par son pommeau, puis la brandit des deux mains au-dessus de sa tête.
    — Voici Calibumus, mes amis… L’épée mythique. Retrouvée aux côtés d’Arthur de Bretagne en sa sépulture.
    Je serrai les poings. Aliénor s’était dressée pour la voir, les vassaux faisaient cercle, même les troubadours, posant leurs instruments, s’approchaient dans une clameur qui peu à peu grossissait le plaisir d’Henri. Une main se posa sur mon épaule. Je levai les yeux vers Jaufré qui la voulait apaisante.
    À l’inverse de tous, aveuglés comme Henri par l’improbable pièce, son visage reflétait la gravité du mien. Les cloches s’envolèrent, noyant dans leur appel le rire de mon roi. Je me levai à mon tour, prête, comme les autres, à rejoindre l’église pour la messe de minuit. Ce faisant, mon regard navré accrocha celui d’Henri. Je lus dans le sien une incompréhension profonde. Avait-il imaginé me plaire ? me ramener à lui avec cette trouvaille ? Je refusai de le croire.
    — Demain. Vous la verrez mieux demain, promit-il avant de remettre l’épée à celui qui l’avait apportée.
    Tournant le dos à la foule caquetante, il nous rejoignit.
    — En voilà mine sombre…
    Jaufré s’éloigna discrètement vers la porte, qu’Aliénor avait passée déjà, entraînée par une de nos amies. Je tendis vers mon roi des traits douloureux.
    — On ne viole pas une sépulture, Henri. Et celle-ci moins qu’une autre. Avez-vous oublié tout ce que je vous ai enseigné ?
    Il haussa les épaules.
    — Allons, ce n’était qu’histoire pour me troubler l’enfance…
    — Non, mon roi. Caledfwlch, ou Caliburnus comme la nomme Monmouth, n’est pas une épée comme les autres. Elle n’a qu’un maître. Celui qu’elle choisit dans un

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