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Le Roi amoureux

Le Roi amoureux

Titel: Le Roi amoureux Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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morceau jusqu’à ce que tu tombes mort, après quoi je ferai jeter à la Seine ta vilaine carcasse.
    Brisard demeura étourdi : lui aussi avait reçu son coup de massue. Quant au comte de Loraydan, il s’élança au-dehors et, rassuré, content de sa besogne, dans une bouffée de joyeuse haine, il se cria :
    « Et maintenant, à la rue de la Hache ! »

XXI
 
LA FIANCÉE DE CLOTHER DE PONTHUS
    C’était vers six heures du matin, après la quatrième attaque. Les feux que les gardes avaient allumés pour se réchauffer pendant le repos, mêlant leurs rouges lueurs aux lueurs livides du petit jour, formaient une lumière sinistre dans laquelle apparaissait le double hérissement des gens d’armes occupant les deux tronçons de la rue de la Hache, et, entre ces deux masses sombres parmi quoi éclataient en rapides éclairs les reflets des aciers, un court espace vide devant la taverne du Porc-qui-pique, sa porte éventrée, son enseigne jetée bas, ses fenêtres du rez-de-chaussée disloquées, et sur la chaussée, un amas de débris, éclats de bois, tables brisées, fers tordus, vitraux pulvérisés, quelques dagues, deux ou trois hallebardes et des flaques d’on ne savait quoi de brun qui pouvait être du sang figé.
    Onze gardes tués, quatre blessés : bilan des quatre attaques de la nuit.
    Quant aux gens de l’auberge, on ne savait pas.
    Le sire de Ponthus était-il encore vivant ? On ignorait.
    Le grand prévôt n’avait pas une égratignure. Et pourtant, à chaque attaque, il avait marché en avant, pénétrant le premier dans le repaire, donnant ses ordres de sa même voix terriblement calme, gardant au fourreau son épée dédaigneuse.
    Lorsque, après la quatrième mêlée dans la salle ravagée, les gardes, une fois encore, eurent reflué dans la rue, en une violente rumeur d’imprécations et de cris de mort, le Fossoyeur tira Joli-Frisé à part, et versa quelques larmes, ce qui était chez lui l’indice d’une intense jubilation.
    – Le noble comte de Loraydan, soupira-t-il alors, se trouve fort ému. C’est curieux : l’odeur du sang lui délie la langue, comme à moi l’odeur du vin. Sur mon âme, il est ivre…
    – Et après ? interrompit sèchement Joli-Frisé, méfiant.
    – Après ? Rien. Rien que ceci : l’ivresse rend bavard. Par pièces et morceaux, il a, cette nuit, raconté à ses trois nobles amis des choses… des choses que j’ai entendues. Et j’ai surpris aussi quelques mots échappés à notre seigneur monseigneur le seigneur de Croixmart. Dieu le garde !
    – Qu’as-tu entendu ?
    – Malheureusement pour moi, il faut être deux. Et qui sait ? Trois, peut-être…
    – Jamais ! cria Joli-Frisé indigné. Deux, c’est encore trop. Cher ami, qu’as-tu entendu ?
    – De la somme totale, je veux cinq bonnes mille livres hors part.
    – La peste t’étouffe, scélérat, ruffian !
    – Je veux bien. Adieu donc, Joli-Frisé.
    – Arrête, noble camarade ! Cinq mille livres hors part. C’est juré. Maintenant, ne fais pas le veau, cesse de pleurer, et dis-moi ce que tu as entendu.
    – Inutile, sanglota le Fossoyeur. Mais voici le fait, en raccourci : que si le sire de Ponthus est tué dans l’algarade, ce qu’à Dieu ne plaise, ne parlons plus de rien, l’aubaine nous échappe. Mais s’il s’en tire, puisse le ciel le lui accorder, car c’est un bien digne gentilhomme, il nous faut le prendre, je dis bien : le prendre vivant.
    – Et comment ? Et où ? Ne pleure donc pas, imbécile !
    – Comment ? dit le Fossoyeur. Je suis trop bête pour te l’expliquer, mais tu verras bien. Où ? Là où il faut qu’il vienne se faire prendre. Là où il viendra, ne lui restât-il qu’un souffle de vie, dût-il se traîner sur les genoux pour venir s’y faire prendre ! Suis-moi !
     
    À l’hôtel d’Arronces, quelques heures plus tard :
    À peine revenue au sentiment de la vie, Léonor d’Ulloa est rentrée à l’hôtel et a gagné sa chambre. Elle semble fort calme, et même son visage, animé, paraît tout rose, et ses yeux brillent ; toute sa vaillance est à fleur de peau, son cœur est broyé par l’angoisse, et les projets se succèdent dans sa tête avec cette fantastique rapidité que donne le désespoir, et il n’y en a qu’un qui lui apparaisse réalisable : elle va le mettre à exécution.
    Elle se fait habiller en hâte, mais sans oublier un seul des détails du costume de cérémonie qu’elle revêt, et qu’en

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