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Le roi d'août

Le roi d'août

Titel: Le roi d'août Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Pagel
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avez fort bien fait. Une leçon leur était nécessaire, vous la leur avez donnée, et je veux croire qu'elle leur sera profitable. À présent, cependant, l'heure doit être au pardon, sire. Sans cela, d'autres ne manqueront pas qui, faute d'opposition, prétendront eux aussi gouverner à votre place.
    Henri se tourna imperceptiblement vers le comte de Flandre et son beau-frère, mais le jeune roi n'avait nul besoin de cela pour saisir ses propos : le vieux maréchal Clément ne lui avait-il pas délivré la même mise en garde quelques mois plus tôt ?
    — Le souverain qui s'en rapporte à un seul conseiller, quel qu'il soit, n'est qu'un pantin indigne d'occuper le trône, dit encore le Plantagenêt.
    — C'est là une vérité dont je saurai me souvenir, repartit Philippe.
    Y compris en ce qui vous concerne, songea-t-il – mais puisqu'on ne cessait de vanter son jugement, il décida de l'exercer en gardant pour lui ce codicille.
    — Je crains cependant que ma mère et mes oncles ne soient guère disposés à oublier la querelle qui nous sépare, continua-t-il plutôt.
    — Ils y seront contraints. Sans mon appui – et j'entends leur signifier qu'ils ne l'auront pas –, vous faire la guerre serait pure folie. Croyez-moi : ils ne demanderont pas mieux que de reprendre leur place à la cour et, leur fierté dût-elle encore en souffrir, ils respecteront vos décisions.
    Philippe hocha la tête : s'il n'était pas aussi persuadé qu'Henri d'obtenir l'obéissance de ses turbulents parents, l'opération méritait d'être tentée. Un obstacle, cependant, se dressait sur sa route, et non des moindres : cette fois, ce fut lui qui ne put s'empêcher de jeter un coup d'œil au comte de Flandre.
    — Je devine ce que vous pensez, déclara son compagnon en suivant son regard, mais je crois détenir aussi la solution à ce problème. Naguère, je versais à monseigneur Philippe d'Alsace une rente de mille livres d'esterlins en échange du service de cinq cents chevaliers. Je ne sais trop pourquoi, cette habitude s'est perdue. Votre parrain sera trop heureux de retrouver ce surcroît de revenus pour critiquer trop fort les termes de notre accord.
    Une nouvelle fois, le jeune roi ne put masquer sa stupeur.
    — Vous prenez donc mes intérêts à cœur au point de les favoriser de vos deniers ?
    — Je me comporte tout simplement en fidèle vassal, répondit l'Angevin – avant d'ajouter, devant le scepticisme de son interlocuteur : Et je vous avouerai qu'en donnant ainsi l'exemple, je compte m'assurer la fidélité de mes propres vassaux, en particulier celle de certain duc d'Aquitaine qui oublie trop souvent ce qu'il me doit.
    Philippe bondit sur l'occasion offerte.
    — Puisque vous abordez le sujet, ne pensez-vous pas qu'il serait temps de célébrer enfin l'union de votre fils Richard et de ma sœur Adélaïde ? Voilà qui l'assagirait peut-être et qui renforcerait les liens entre nos deux familles.
    Un léger sourire, vite réprimé, étira les lèvres du roi d'Angleterre.
    — Mais bien entendu ! s'exclama-t-il. Dès que les affaires pressantes qui nous occupent seront réglées, nous procéderons aux préparatifs du mariage. (Il tendit le bras vers les murailles du château qui se dressaient au loin.) Ah, ma belle forteresse de Gisors ! Souhaitez-vous toujours que ses pierres se changent en diamants ?
    — Je vous demande pardon ?
    Le rapide changement de sujet n'avait pas échappé au garçon. Toutefois, la bonne volonté d'Henri lui était trop précieuse pour qu'il risquât de se l'aliéner à cause d'un problème somme toute secondaire, aussi n'insista-t-il pas. Déjà, d'ailleurs, son compagnon enchaînait :
    — Vous ne vous souvenez pas ? Il est vrai que vous étiez fort jeune, à l'époque. C'était à l'occasion d'une entrevue entre votre père et moi, ici même. Je vantais la puissance de ce château, que le roi Louis admirait, quand vous avez dit quelque chose comme : « Pourquoi vous extasier sur un tas de pierres ? Moi, je voudrais qu'elles soient d'argent, d'or ou de diamant. Ainsi, j'aurais bien plus de plaisir à les posséder lorsque je les aurais conquises. » (Il eut un rire enjoué.) C'est ce jour-là, je crois, que je me suis pris d'affection pour vous.
    Philippe sourit, lui aussi. L'anecdote lui était sortie de l'esprit, mais à présent qu'on la lui rappelait, il entendait à nouveau son père la raconter avec fierté durant les mois qui avaient

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