Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le Roi de l'hiver

Le Roi de l'hiver

Titel: Le Roi de l'hiver Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
Vom Netzwerk:
coup
d’œil à Nimue. Il se souvenait de la terrible malédiction qu’elle avait jetée
sur lui et ses hommes.
    « Bien
sûr que oui ! » J’appelai Nimue, qui toucha le front de Griffid et
celui de tous les autres survivants qui, ce jour-là à Lindinis, avaient menacé
ma vie. Ainsi sa malédiction se trouva-t-elle levée, et ils la remercièrent
d’un baiser sur la main. J’embrassai de nouveau Griffid, puis haussai la voix
afin que tout le monde pût m’entendre. « Aujourd’hui, nous allons donner
aux bardes assez de chants à chanter pour un millier d’années ! Et
aujourd’hui, nous serons de nouveau des hommes riches ! »
    Ils poussèrent
des vivats. L’émotion qui régnait dans cette ligne de boucliers était si
intense que certains hommes versèrent des larmes de bonheur. Je sais maintenant
qu’il n’est point de joie comparable à la joie de servir Jésus-Christ, mais
Dieu que la compagnie des guerriers me manque ! Il n’y avait aucune
barrière entre nous ce matin-là, rien qu’une grande vague d’affection mutuelle,
qui nous submergeait tous tandis que nous attendions l’ennemi. Nous étions
frères, nous étions invincibles et même le laconique Sagramor avait les larmes
aux yeux. Un lancier entonna le Chant de guerre de Beli Mawr, le grand chant de
bataille de la Bretagne, que reprirent toutes en chœur les voix mâles et
puissantes de la ligne. D’autres hommes dansèrent sur leur épée, cabriolant
gauchement dans leur armure de cuir en effectuant de savants entrechats
au-dessus de leurs lames. Nos chrétiens chantaient les bras tendus, un peu
comme si le chant était une prière païenne adressée à leur Dieu, d’autres
battaient la mesure en frappant de leur lance contre leur bouclier.
    Nous chantions
encore l’effusion du sang ennemi sur notre terre quand l’ennemi parut. Nous
continuâmes à chanter par défi tandis que les bandes de lanciers avançaient
l’une après l’autre et prenaient position au loin dans les champs, sous les
bannières royales qui paraissaient éclatantes sous le ciel nuageux. Un déluge
de chants pour défier Gorfyddyd, l’armée du père de la femme que j’étais
convaincu d’aimer. Voilà pourquoi je me battais : non pas pour le seul
Arthur, mais parce que seule la victoire me permettrait de retourner à Caer Sws
et de revoir Ceinwyn. Je n’avais aucune prétention sur elle, ni aucun espoir,
car j’étais né esclave et elle était princesse, mais ce jour-là je n’en avais
pas moins le sentiment que j’avais plus à perdre que je n’avais jamais possédé
de ma vie entière.
    Il fallut plus
d’une heure à cette horde pour se mettre en ligne de bataille. On ne pouvait
franchir la rivière qu’au gué : autrement dit, cela nous laisserait le
temps de battre en retraite le moment venu, mais, pour l’heure, l’ennemi avait
dû penser que nous comptions défendre le gué toute la journée, car il massa ses
meilleurs hommes au centre de la ligne. Gorfyddyd lui-même était là, avec son
étendard à l’aigle qui avait déteint sous la pluie, en sorte qu’on aurait pu le
croire déjà trempé dans notre sang. Les bannières d’Arthur, l’ours noir et le
dragon rouge, flottaient au centre de notre ligne, où j’étais posté face au
gué. Sagramor se tenait à côté de moi, comptant les bannières ennemies. Le
renard de Gundleus était là, ainsi que le cheval rouge d’Elmet et d’autres
encore, que nous ne connaissions pas. « Six cents hommes ? estima
Sagramor.
    — Et
d’autres encore à venir.
    — Probable ! »
Il cracha en direction du gué. « Et ils auront vu que le taureau de
Tewdric manque. » Il me gratifia de l’un de ses rares sourires. « Ce
sera une bataille mémorable, Seigneur Derfel.
    — Je suis
ravi de la partager avec toi, Seigneur », répondis-je avec flamme, et
c’était vrai. Il n’y avait pas de plus grand guerrier que Sagramor, pas d’homme
aussi redouté de ses ennemis. Même la présence d’Arthur n’inspirait pas le même
effroi que le visage impassible du Numide et sa terrible épée. C’était une
curieuse épée recourbée, de fabrication étrangère, et Sagramor la maniait avec
une agilité redoutable. Je demandai un jour à Sagramor pourquoi il avait à
l’origine prêté serment à Arthur : « Parce que, m’expliqua-t-il avec
courtoisie, quand je n’avais rien, Arthur m’a tout donné. »
    Nos lanciers
s’arrêtèrent enfin de chanter : deux druides se

Weitere Kostenlose Bücher