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Le Roi de l'hiver

Le Roi de l'hiver

Titel: Le Roi de l'hiver Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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attendrai pour banqueter avec vous
dans l’Au-Delà. » Il cria à ses hommes de monter en selle et s’en fut dans
le nord.
    Et nous, nous
attendîmes le commencement de la vraie bataille.
     
    *
     
    L’armure
d’écailles était effroyablement lourde et pesait sur mes épaules comme les
seilles d’eau que les femmes portent chaque matin à leur maison. J’avais du mal
à lever le bras, même si la chose devint plus facile lorsque je sanglai mon
ceinturon autour des écailles de fer de manière à décharger mes épaules du
poids de la partie inférieure de l’armure.
    Son charme de
dissimulation achevé, Nimue me coupa les cheveux au couteau et les brûla de
crainte que l’ennemi ne me jette un sort puis, me servant du bouclier d’Arthur
comme d’un miroir, je me taillai la barbe assez court pour qu’elle disparût
sous les joues du casque. Puis je bataillai avec la doublure de cuir pour la
passer sur mon crâne, tirant avec la dernière énergie jusqu’à ce que le casque
enfermât ma tête comme une coquille. Ma voix semblait étouffée, malgré les
trous percés dans le métal rutilant au-dessus des oreilles. Puis je soulevai le
bouclier, laissant Nimue m’attacher autour des épaules le manteau blanc crotté,
et j’essayai de me faire au poids de l’armure. Je demandai à Issa de me servir
de partenaire avec une hampe de lance en guise de canne et me trouvai plus lent
que d’ordinaire. « La peur te rendra plus rapide, Seigneur », me
dit-il quand il eut trompé ma garde pour la dixième fois et m’eut assené un
coup sonore sur la tête.
    « Ne fais
pas tomber les plumes ! » À part moi, je me disais que je n’aurais
jamais dû accepter l’armure. C’était un accoutrement de cavalier, destiné à
rendre plus lourd et plus effrayant celui qui devait enfoncer les rangs
ennemis, alors que nous autres, les lanciers, quand nous n’étions pas épaule
contre épaule dans un mur de boucliers, nous avions surtout besoin d’agilité et
de vélocité.
    « C’est
que tu es superbe ! fit Issa, admiratif.
    — Je
ferai un superbe cadavre si tu ne gardes mon flanc ! On se croirait à
l’intérieur d’un seau. » Je retirai le casque, soulageant mon crâne de son
carcan. « La première fois que j’ai vu cette armure, confiai-je à Issa,
j’en ai eu envie plus que de toute autre chose au monde. Aujourd’hui, je la
céderais volontiers pour un simple plastron de cuir.
    — Tout se
passera très bien, Seigneur », dit-il avec un large sourire.
    Nous avions à
faire. Il nous fallut d’abord refouler dans le sud les femmes et les enfants
abandonnés par les hommes défaits de Valerin, puis préparer des défenses à
proximité des restes de la barricade. Sagramor redoutait que nous ne fussions
submergés par la marée ennemie avant que les cavaliers d’Arthur ne pussent
voler à notre secours, et il fit de son mieux pour préparer le terrain. Mes
hommes avaient besoin de dormir, mais il nous fallut plutôt creuser un petit
fossé en travers de la vallée. Il n’était nulle part assez profond pour arrêter
un homme, mais il obligerait les lanciers à sauter au risque de trébucher pour
approcher de nous. Les arbres abattus se trouvaient juste derrière le fossé et
marquaient la limite sud vers laquelle nous pouvions nous replier et l’endroit
que nous devions défendre jusqu’à la mort. Sagramor fixa les troncs à l’aide
des lances abandonnées par Valerin, créant une sorte de haie hérissée de
pointes au milieu des branchages. Nous laissâmes la brèche ouverte au centre de
la palissade de manière à pouvoir nous replier devant la fragile barrière avant
de la défendre.
    Ce qui me
préoccupait, c’était le flanc de colline raide et exposé que mes hommes avaient
assailli à l’aube. Les guerriers de Gorfyddyd attaqueraient sans doute par la
vallée, mais les requis seraient probablement envoyés sur les hauteurs pour
menacer notre flanc gauche. Or Sagramor ne pouvait se permettre de placer des
hommes là-haut, mais Nimue affirma que ce n’était pas nécessaire. Elle prit dix
lances ennemies puis, se faisant aider d’une demi-douzaine de mes hommes,
trancha la tête de dix lanciers morts de Valerin et porta le tout au sommet de
la colline. Là, elle fit planter les lances dans la terre, puis piqua les têtes
sanguinolentes sur les pointes et les coiffa de hideuses perruques d’herbes nouées.
À chaque nœud correspondait un maléfice. Pour finir, elle éparpilla

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