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Le Roman d'Alexandre le Grand

Le Roman d'Alexandre le Grand

Titel: Le Roman d'Alexandre le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Valerio Manfredi
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porte
latérale.
    « Chaque soir, après le coucher
du soleil, elle se baigne dans la mer, près de l’embouchure du
Scamandre », lui murmura-t-il à l’oreille.
    Le roi partit sans un mot. Il bondit
à cheval et regagna le camp installé au bord de la mer, aussi grouillant qu’une
gigantesque fourmilière.
    Alexandre la vit arriver dans
l’obscurité d’un pas rapide et assuré, longeant la rive gauche du fleuve. Elle
s’immobilisa à l’endroit où les eaux du Scamandre viennent se confondre avec la
mer.
    C’était une nuit tranquille et
calme, et la lune amorçait sa course dans le ciel, dessinant un long sillon
argenté depuis l’horizon jusqu’à la rive. La jeune fille ôta ses vêtements,
dénoua ses cheveux et pénétra dans l’eau. Son corps, caressé par les vagues,
brillait à la lumière de la lune, pareil à du marbre poli.
    « Tu es aussi belle qu’une
déesse, Daunia », chuchota Alexandre en sortant de l’ombre.
    La jeune fille s’enfonça dans l’eau
jusqu’au menton et recula. « Ne me fais pas de mal, dit-elle, je suis
consacrée.
    — Pour expier un viol
ancien ?
    — Pour expier le viol que les
femmes ont si souvent été obligées de subir. »
    Le souverain se déshabilla et la
rejoignit tandis qu’elle croisait les bras sur sa poitrine.
    « On dit que l’Aphrodite de
Cnide, qu’a sculptée le divin Praxitèle, se couvre les seins de cette manière.
Aphrodite aussi est pudique… N’aie pas peur. Viens. »
    La jeune fille s’approcha lentement
en marchant sur le fond sablonneux, et son corps divin apparut progressivement,
ruisselant d’eau, léché par la surface des flots qui s’abaissaient en lui
caressant d’abord les hanches, puis le ventre. « Conduis-moi en nageant
jusqu’au tombeau d’Achille. Je ne veux pas qu’on nous voie.
    — Suis-moi, dit Daunia.
J’espère que tu es un bon nageur. »
    Elle glissa sur les vagues comme une
néréide, une nymphe des abîmes. La côte formait une large crique, éclairée par
les feux du camp, et se terminait par un promontoire, à l’extrémité duquel se
dressait un tertre.
    « Je le suis », répondit
Alexandre en nageant à ses côtés.
    Daunia gagna le large en traversant
le golfe pour rejoindre le promontoire. Elle se déplaçait avec élégance et
légèreté, sans bruit, fendant les eaux comme une créature marine.
    « Tu es très douée »,
observa Alexandre en haletant.
    — Je suis née au bord de la
mer. Es-tu certain de vouloir aller jusqu’au promontoire de
Sigéion ? »
    Alexandre s’abstint de répondre et
continua de nager jusqu’à ce qu’il puisse apercevoir un ourlet d’écume se
former au clair de lune sur toute la longueur de la plage, et les vagues
s’étirer jusqu’à venir lécher la base du grand tertre. Ils sortirent de l’eau,
main dans la main. Le roi alla vers la masse sombre formée par le tombeau
d’Achille. Il sentait, ou croyait sentir, l’esprit du héros s’insinuer en lui.
Et quand il se tourna vers sa compagne, cherchant son regard dans la pénombre,
il eut l’impression de voir Briséis à la joue rosée.
    « Seuls les dieux peuvent jouir
de tels moments, murmura-t-il dans la brise tiède qui venait de la mer. Ici
s’est assis Achille pleurant la mort de Patrocle. Ici l’Océan maternel a déposé
ses armes, fabriquées par un dieu.
    — Ainsi, tu es croyant ?
demanda la jeune fille. Mais alors, pourquoi dans le temple…
    — Ici, c’est différent. Il fait
nuit et l’on peut encore entendre les voix lointaines qui se sont éteintes. Et
puis, tu resplendis sans voiles devant moi.
    — Tu es vraiment roi ?
    — Regarde-moi. Qui crois-tu que
je suis ?
    — Tu es le jeune homme qui
m’apparaissait parfois en songe tandis que je dormais avec mes compagnes dans
le sanctuaire de la déesse. Le jeune homme que j’aurais voulu aimer. »
    Elle posa sa tête sur la poitrine du
roi.
    « Demain, je partirai, dit-il.
Et dans quelques jours, il me faudra affronter une dure bataille. Peut-être
vaincrai-je, peut-être mourrai-je.
    — Alors, si tu le souhaites,
aime-moi, ici, sur ce sable encore tiède, et laisse-moi te serrer dans mes
bras, même si nous devons le regretter plus tard. » Elle l’embrassa
longuement en lui caressant les cheveux. « Seuls les dieux peuvent jouir
de tels moments. Et nous serons des dieux tant que durera la nuit. »
     

2
    Alexandre se déshabilla entièrement devant son armée rangée. Selon
l’ancienne coutume,

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