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Le Roman d'Alexandre le Grand

Le Roman d'Alexandre le Grand

Titel: Le Roman d'Alexandre le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Valerio Manfredi
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m’est permis de te le demander ?
    — Ainsi que je te l’ai
expliqué, je suis la reine de Carie, fille de Mausole, l’homme qui est enseveli
dans le grand monument d’Halicarnasse. Mon frère Pixodaros a usurpé mon trône
et il gouverne la ville après s’être allié avec le satrape Orontobatès, dont il
a épousé la fille. J’ai été dépouillée non seulement de mon pouvoir, mais aussi
de mes apanages, de mes rentes et de la plupart de mes demeures.
    « Tout cela réclame justice. Je
suis donc venue te voir, toi, le jeune roi des Macédoniens, pour t’offrir la
forteresse et la ville d’Alinda, qui te permettront de contrôler l’intérieur du
pays, sans lequel Halicarnasse ne peut survivre. »
    Elle prononça ces mots avec un très
grand naturel, comme si elle parlait d’un jeu de société. Alexandre l’examina
d’un air surpris : il avait de la peine à en croire ses oreilles.
    La reine Ada ordonna à un de ses
domestiques de tendre au roi un plateau de gâteaux. « Un autre biscuit,
mon garçon ? », demanda-t-elle.
     

21
    Alexandre annonça tout bas à Eumène qu’il désirait s’entretenir en tête
à tête avec son invitée. L’un après l’autre, ses compagnons prirent
respectueusement congé en prétextant des occupations diverses. C’est alors que
se présenta Péritas, attiré par le parfum des friandises dont il raffolait.
    « Noble dame, commença
Alexandre, je ne suis pas sûr d’avoir bien compris : tu veux m’offrir la forteresse
et la ville d’Alinda sans rien exiger en échange ?
    — Pas tout à fait, répliqua la
reine. Il y a quelque chose que je désire en échange.
    — Parle, et je comblerai tes
souhaits si c’est en mon pouvoir. Que veux-tu ?
    — Un enfant », répondit
Ada d’une voix très naturelle.
    Alexandre la contempla un instant,
bouche bée. Mais Péritas le tira de sa stupeur en lui réclamant, avec force, le
biscuit qu’il avait à la main.
    « Noble dame, je ne pense pas
pouvoir… »
    Ada sourit. « Je crois que tu
n’as pas bien saisi, mon garçon. Vois-tu, la vie ne m’a pas offert le réconfort
d’un enfant, et il en a peut-être été mieux ainsi, puisque les usages et les
exigences dynastiques m’ont contrainte à épouser mes frères. C’est pourquoi
j’ai tant souffert dans mes veuvages.
    « Mais si le destin m’avait
donné un enfant né d’un mari normal, j’aurais voulu qu’il te ressemble :
qu’il soit aussi beau, noble et aimable que toi, qu’il ait des manières
raffinées mais un caractère décidé, courageux et audacieux, tout en étant affable
et affectueux ainsi qu’on murmure que tu l’es. En d’autres termes, je te
demande de devenir mon fils. »
    Incapable d’articuler le moindre
mot, Alexandre se laissa caresser par les yeux ambrés, doux et mélancoliques de
la reine.
    « Alors, quelle est ta réponse,
mon garçon ?
    — Je… je ne sais pas comment
cela pourrait se produire…
    — Très simplement, par une
adoption.
    — Et comment
adviendrait-elle ?
    — Je suis reine. Si tu es
d’accord, il me suffit de prononcer la formule rituelle et tu seras mon fils à
part entière. »
    Alexandre l’examinait d’un air de
plus en plus déconcerté.
    « Je demande peut-être
trop ? dit Ada, brusquement inquiète.
    — Non, mais…
    — Quoi ?
    — Je ne m’attendais pas à une
telle requête. J’en suis extrêmement flatté, et par conséquent… » Ada se
pencha en avant comme pour s’assurer qu’elle entendrait bien la suite.
« Par conséquent, je suis heureux et honoré d’accepter ton offre. »
    La reine versa quelques larmes
d’émotion. « Tu acceptes vraiment ? demanda-t-elle.
    — Oui.
    — Je t’avertis, j’exigerai
aussi que tu m’appelles « maman ».
    — Je n’y manquerai pas…
maman. »
    Ada s’essuya les yeux avec un
mouchoir brodé. Elle redressa la tête, se racla la gorge, puis déclara :
« Moi, Ada, fille de Mausole, reine de Carie, je t’adopte, toi, Alexandre,
roi des Macédoniens, en qualité de fils, et je te nomme seul héritier de tous
mes biens. » Elle tendit la main à Alexandre, qui y déposa un baiser.
    « Je t’attendrai demain à
Alinda, mon fils. Et maintenant, embrasse-moi. »
    Alexandre se leva et l’embrassa sur
les joues. Il fut charmé par son parfum oriental de santal et de rose sauvage.
C’est alors que Péritas s’approcha en frétillant et en gémissant, dans l’espoir
que l’invitée de son maître

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