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Le Roman d'Alexandre le Grand

Le Roman d'Alexandre le Grand

Titel: Le Roman d'Alexandre le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Valerio Manfredi
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des rames pendant près de deux
jours.
    Ils atteignirent leur destination le
cinquième jour et pénétrèrent dans la grande rade occidentale, où ils
attendirent que le temps s’améliore. Memnon ordonna qu’on effectue les
réparations nécessaires et envoya ses officiers recruter des mercenaires. Puis
il visita l’île, qui était enchanteresse, et voulut qu’on lui montrât la
demeure de la poétesse Sapho et celle du poète Alcée, tous deux natifs de
Lesbos.
    Devant la maison qu’on disait avoir
appartenu à Sapho, des écrivains ambulants recopiaient des poèmes sur des
tablettes de bois ou sur des rouleaux de papyrus, plus coûteux, pour qui le
désirait.
    « Saurais-tu m’en écrire un en
perse ? demanda-t-il à un homme à l’aspect oriental.
    — Bien sûr, puissant seigneur.
    — Alors, écris celui qui
commence ainsi :
    Celui-là me paraît être l’égal des
dieux, l’homme assis en face de toi, tout près, écouta ta voix si douce.
    Et ce rire enchanteur, qui, je le
jure, a fait fondre mon cœur dans ma poitrine. [3]
    — Je le connais, seigneur, dit
l’écrivain public en plongeant sa plume dans l’encrier. C’est un chant de
jalousie.
    — Oui », acquiesça Memnon
sur un ton apparemment impassible.
    Il s’assit sur un muret, où il
attendit que l’homme achève sa traduction.
    Il avait appris que Barsine était
tombée dans les griffes d’Alexandre, ce qui, de temps à autre, le remplissait
d’effroi.
     

34
    Après avoir quitté Halicarnasse, Alexandre longea la côte vers l’ouest,
à la tête de son armée, en dépit des tentatives de son entourage pour l’en
dissuader. Il y avait, en effet, un passage en Lycie qu’on jugeait impraticable
par mauvais temps : un sentier suspendu entre la falaise et la mer
ponctuée d’écueils, exposé au vent d’ouest porteur d’orages.
    En se brisant sur les rochers, les
vagues éclataient en globes d’écume, bouillonnaient rageusement avant de
refluer pour prendre leur élan et se jeter à nouveau contre le promontoire
désolé, battu par les rafales de vent.
    Héphestion, qui avait poussé
jusque-là, avait été impressionné. « C’est terrifiant, raconta-t-il à
Alexandre. Imagine une montagne plus haute que le mont Athos et plus vaste que
le mont Pangée, qui tombe à pic dans la mer, une montagne aussi lisse et noire
que du fer poli ; les éclairs jaillissent au-dessus du sommet et
s’abattent parfois sur les flots dans une lumière aveuglante. Le sentier est un
vieux passage que les Lyciens ont creusé dans le rocher, mais les lames qui s’y
brisent et les algues qui s’y reproduisent au cours de la mauvaise saison le rendent
glissant. Il est impossible de s’en tirer si l’on tombe à l’eau : les
vagues vous écrasent sur les récifs coupants qui forment une couronne autour de
ce roc escarpé.
    — As-tu pu passer ?
demanda Alexandre.
    — Oui.
    — Et comment ?
    — Avec l’aide des Agrianes. Ils
ont planté des pieux dans les fissures de la roche et y ont attaché des cordes
auxquelles nous pouvions nous accrocher lorsque les vagues fondaient sur nous.
    — Cela me semble une excellente
idée, dit le roi. Nous passerons, nous aussi.
    — Mais nous étions cinquante,
objecta Héphestion. Ton armée comporte vingt-cinq mille hommes et cinq mille
chevaux. Comment feras-tu passer les chevaux ? »
    Alexandre observa un moment de
silence pour rassembler ses pensées, puis il dit : « Nous n’avons pas
le choix. Il nous faut emprunter ce sentier et nous emparer des ports de la
Lycie. Ainsi, la flotte perse n’aura plus accès à notre mer. Si cela est
nécessaire, je laisserai la cavalerie, mais j’irai de l’avant.
    — Comme tu le veux. Nous, nous
n’avons peur de rien. Mais j’ai quand même voulu que tu connaisses les risques
qui nous attendent. »
    Ils partirent le lendemain. Bientôt,
ils atteignirent la ville de Xanthos, qui se dressait sur un rocher dominant le
fleuve Xanthe. Tout autour, on pouvait admirer des dizaines de tombes
monumentales en forme de palais ou de temples à colonnes, creusées dans la
roche. L’une d’elles, disait-on, renfermait le corps du héros lycien Sarpédon,
tombé sous les coups de Patrocle pendant la guerre de Troie.
    Alexandre voulut qu’on lui la montrât.
Il se recueillit devant ce vénérable tombeau, usé par le temps et par les
intempéries, sur lequel on distinguait à peine les signes d’une ancienne
inscription, totalement illisible.

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