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Le Roman des Rois

Le Roman des Rois

Titel: Le Roman des Rois Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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4 juin, les bombardes de nos navires coulèrent trois galères égyptiennes, mettant en fuite la quatrième.
    Les chevaliers commencèrent aussitôt à débarquer en dépit des cavaliers arabes qui formaient, tout au long du rivage, une ligne noire sur le sable blanc, dans l’éclatante et brûlante chaleur égyptienne.

    J’étais aux côtés du roi à la proue du navire.
    Quand Louis entendit dire que l’oriflamme de Saint-Denis était à terre, il parcourut le pont de son vaisseau à grands pas, et, malgré le légat du pape, pour ne pas abandonner l’oriflamme, il sauta à la mer dont il eut de l’eau jusque sous les bras. Et il alla l’écu au col, le heaume sur la tête, le glaive en main, jusqu’à ces hommes qui étaient sur la rive.
    Quand il aperçut les Sarrasins, il demanda quels gens c’étaient, et on lui dit qui c’étaient ; alors, le glaive sous l’aisselle et l’écu devant lui, il eût couru à cette canaille si nous, qui étions autour de lui, ne l’en eussions empêché. Je l’ai laissé avec le légat et les chevaliers, les « prud’hommes » qui lui faisaient escorte.

    J’ai rejoint les chevaliers qui avaient mis pied à terre, planté le sabot de leur lance dans le sable, dressant ainsi une rangée de piques, une herse de fer face aux cavaliers musulmans qui venaient s’y briser. Les arbalétriers les déchiraient de leurs traits.
    Nous sommes remontés en selle et nous les avons poursuivis, et, me retournant, j’ai vu qu’on retenait le roi pour l’empêcher de charger à nos côtés.
    Nous entrâmes à la suite des fuyards dans Damiette, et le lendemain 6 juin 1249, Louis s’y installa en souverain.

    Nous embrassâmes les chrétiens retenus comme esclaves par les musulmans, dont nous venions de briser les chaînes. Ils rejoignirent aussitôt les rangs des croisés.
    Nous priâmes pour nos morts dans l’ancienne grande mosquée qui avait été consacrée cathédrale Notre-Dame.
    Louis s’agenouilla devant le corps d’Hugues de Lusignan, comte de la Marche, tombé parmi ses chevaliers.
    « Allons ensevelir ces martyrs, dit-il. Ils sont morts ; donc, nous qui sommes toujours vivants pouvons supporter cette tâche. Ne vous laissez pas écoeurer par ces corps, car ce sont des corps de martyrs qui ont souffert la mort pour Notre Seigneur et qui sont maintenant au Paradis. »

    Nous étions, nous, vivants, qui n’en savions rien encore, aux portes de l’Enfer, murmura mon père.

    La chaleur était notre souffrance, la maladie notre géhenne. Les eaux du Nil en crue charriaient les morts, se chargeaient de la pourriture des chairs. Nous buvions cette eau noirâtre. La peau de nos jambes, tachetée de noir, devenait couleur de terre ainsi qu’une vieille botte. Il venait de la chair pourrie aux gencives. Il fallait que les barbiers ôtassent cette chair pour donner moyen de mâcher les aliments et d’avaler. C’était grande pitié, car les hommes d’armes malades, auxquels on ôtait ces chairs, geignaient comme femmes en mal d’enfants. Quand le nez saignait, il fallait mourir.

    Mais il était aussi d’autres maladies.
    L’âme des hommes pourrissait avant même leur chair. On pillait, on banquetait, on partageait la couche des folles femmes venues tenir commerce de leur corps jusqu’à quelques pas de la tente du roi.
    On se querellait pour le partage du butin.
    On ne respectait plus les ordres du roi, qui avait interdit de sortir de la ville afin de ne pas être tué par les Sarrasins.
    Et les musulmans s’aventuraient jusque dans Damiette, profitant de la nuit, de l’ivresse, de la débauche, de la maladie, pour égorger des hommes qui succombaient dans un râle.

    J’ai entendu Robert d’Artois, le fougueux frère de Louis, marteler qu’il fallait marcher sur Le Caire sans attendre. Après avoir écouté tous les avis, le roi approuva son frère.

    Et l’armée se mit en marche, mais nous étions déjà le 20 novembre 1249 et nous ne parvînmes devant la forteresse de Mansourah qu’un mois plus tard.
    Elle était orgueilleuse de ses tours et de ses remparts, séparée de nous par un bras du Nil, le Bahr-al-Seghir.
    Nous nous arrêtâmes sur la rive. De l’autre côté du bras du Nil, l’armée du sultan nous faisait face. Sur le Bahr-al-Seghir croisaient des navires égyptiens.
    Il fallait construire une chaussée et un pont, et le roi, comme chacun de nous, se mit au travail sous une grêle de flèches tirées par les musulmans.
    On

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