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Le sac du palais d'ete

Le sac du palais d'ete

Titel: Le sac du palais d'ete Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jose Frèches
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autoritaire, dit à Meadows :
    —  Il est temps que vous y alliez !
    —  C’est avec plaisir que je vous rendrai compte de tout ce que je verrai, sir George   ! ajouta quant à lui le dessinateur qui brûlait de voir à quoi pouvait ressembler le Céleste Royaume où aucun journaliste occidental ne s’était encore rendu.
    —  J’ai toute confiance ! Et n’oubliez pas de vous assurer des intentions de ce roi fou ! lança le gouverneur à Bowles au moment où celui-ci descendait à terre.
    Sur le quai, un détachement de l’armée des gueux attendait de pied ferme la délégation britannique. Des soldats hirsutes et en haillons, armées les uns de tromblons hors d’âge pris aux troupes impériales et les autres d’arcs et de flèches, étaient alignés en un garde-à-vous impeccable, comme si les Taiping voulaient démontrer à l’Angleterre que leurs troupes étaient tout aussi capables de parader que les siennes.
    À présent, John comprenait mieux pourquoi ces hommes, qui par défi au pouvoir mandchou refusaient l’obligation de se raser le crâne, ne répugnaient pas à ce qu’on les surnommât « longs cheveux ». Ils avaient tous le tif conquérant. Leurs tignasses hirsutes, jamais coupées, plaquées sur le front par un large bandeau rouge, retombaient sur leurs épaules comme des capes. N’était leur armement dérisoire, Bowles se fut sincèrement cru débarquant dans un campement d’hommes préhistoriques. Devant un bataillon de soldats qui ressemblait à une troupe de clochards se tenait fièrement le général Luo Dagang. Juste à côté, perché sur une petite estrade, Yang Xiuqing, le Prince de l’Orient, que le Tianwan avait chargé d’accueillir l’ambassade anglaise, attendait également l’arrivée des illustres visiteurs anglais.
    Pour les Taiping, la mission de sir George Bonham valait reconnaissance de la légitimité de leur mouvement et de leur action.
    Comme il semblait loin le temps où une poignée d’entre eux, conduits par Hong Xiuquan et ses principaux acolytes, avait entamé la longue marche qui les avait menés de Jintiancun jusqu’à cette fière capitale impériale qui était tombée entre leurs mains comme un fruit mûr.
    Que de pertes en vies humaines ils avaient dû essuyer au cours de batailles où les soldats de leur armée de la Misère tombaient comme des mouches. Hong y avait perdu son plus proche camarade de combat Feng Yunshan, ce fin stratège qui savait pondérer ses pulsions et dont il avait fait le Prince du Midi. Sous les murailles de Changsha qui crachaient du feu, sa propre sœur Xuanjiao, l’amie de Laura Clearstone, n’avait pas hésité à remplacer au pied levé son mari Xiao Chaogui, le Prince de l’Occident, qui venait d’être mortellement touché. Cette femme hors normes avait alors brandi un étendard sur lequel elle avait écrit « Vengeance pour mon époux ». Vénérée pour son courage en raison de ce fait d’armes, Xuanjiao avait atteint le statut d’une icône sacrée aux yeux de tous ses membres.
    Sous le regard légèrement anxieux de Bonham, Bowles et Meadows s’engagèrent avec précaution sur la passerelle étroite qu’un matelot venait d’installer. Au pied de celle-ci se tenait un petit Taiping aux yeux injectés de sang et profondément enfoncés dans les orbites. La petite vérole avait grêlé son visage que barrait une drôle de moustache clairsemée et jaunasse qui faisait penser à la touffe d’un épi de maïs. L’homme en question les accueillit de façon tonitruante :
    —  Mon nom est Yang, je suis le Prince de l’Est et il arrive à l’Esprit saint de parler par ma bouche !
    —  Bonjour… firent en chœur les deux Anglais avant de décliner leur identité.
    —  Si vous voulez bien me suivre, le Prince du Septentrion et le Prince Coadjuteur nous attendent. Après quoi, nous irons manger ! se contenta de leur annoncer, raide comme un piquet, le Taiping vérolé auquel les deux visiteurs étrangers emboîtèrent le pas.
    Non loin de là, une créature indéfinissable faisait le salut militaire devant une armée de femmes et d’enfants hirsutes. Lorsqu’il passa à côté d’elle, le dessinateur de presse constata que la créature en question était elle-même de sexe féminin. Il savait que chez les Taiping, les hommes et les femmes pouvaient occuper des fonctions similaires. Le Tianwan utilisait aussi des enfants soldats reconnaissables à leur petite taille et à leur crâne

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