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Le sac du palais d'ete

Le sac du palais d'ete

Titel: Le sac du palais d'ete Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jose Frèches
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l’habitude de traiter avec condescendance les préfets et les gouverneurs de province, était dans ses petits souliers. Pareil comportement, devant un fonctionnaire de rang somme toute très subalterne, en disait long sur les difficultés que rencontrait le vieux castrat. Il faisait de surcroît une chaleur accablante qui finissait par peser sur son moral, à l’image du pessimisme auquel il était en proie. Enfin, pour ne rien arranger, le policier avait fait asseoir celui que l’empereur avait chargé de lui ramener La Pierre de Lune sur une simple chaise en bois des plus inconfortables… et peu propice aux postérieurs affectés, comme c’était son cas, d’hémorroïdes…
    —  Je ne sais toujours pas ce que je dois écrire à l’empereur au sujet de l’enfant, murmura d’une petite voix l’eunuque impérial, comme un élève demande conseil à son professeur.
    Depuis son arrivée à Canton, le vieux castrat avait perdu de sa superbe. Ce matin-là, en l’absence de maquillage, il n’était plus qu’un vieil homme accablé par le poids des ans auquel incombait une mission qui n’était vraiment plus de son âge.
    Le Second Secrétaire de Daoguang était arrivé à Canton depuis bientôt deux mois et il ne s’était pas passé de jour qui ne fût entièrement consacré à la mission dont il avait été chargé par le Fils du Ciel. Tous les matins, les enquêteurs de la police impériale lui rendaient compte de leurs recherches de la veille. Hélas ! celles-ci demeuraient vaines. Une série de cartes, aux trois quarts griffonnées, s’étalaient devant lui sur la table. C’étaient les quartiers de Canton qui avaient déjà été explorés par la police sans qu’il ait été possible d’obtenir la moindre information sur La Pierre de Lune. Il n’y avait donc pas de quoi pavoiser.
    Face à Toujours Là, le chef Liang mastiquait ses lupins en le regardant d’un air de commisération sous lequel perçait un soupçon de dégoût.
    Il faut dire que le petit policier, qui détestait les eunuques et les homosexuels, ne l’avait pas accueilli à bras ouverts lorsqu’il avait débarqué dans son bureau, muni de son ordre de réquisition signé par Daoguang en personne. Comme la plupart des fonctionnaires, Liang avait pour adage : Vivons heureux, vivons planqués ! C’était donc par pure obligation, conscient qu’en cas d’échec il risquait fort de porter le chapeau avec Toujours Là, que, la mort dans l’âme, il avait consenti à mettre ses meilleurs limiers à sa disposition. Autant dire que cette traque qui s’éternisait ne lui disait rien qui vaille.
    —  Je serais à votre place, je n’écrirais rien du tout tant que je n’ai pas de bonnes nouvelles à lui annoncer ! pesta-t-il.
    —  Mais le Fils du Ciel va s’impatienter. Et je ne parle pas de la Sibérienne… Une femme redoutable. Oui, redoutable ! Et qui a de la suite dans les idées… Si elle n’a pas de nouvelles de son fils, elle est parfaitement capable de débarquer ici !
    —  Si tel devait être le cas, je souhaite à cette dame bien du plaisir ! s’écria le flic en faisant la grimace.
    La perspective de rendre des comptes à la dernière foucade amoureuse de Daoguang n’avait rien pour réjouir le chef Liang. Comme tous les fonctionnaires de police d’un certain rang, il avait entendu parler du retour à Pékin de cette femme redoutable dont chacun, à la Cour, se gaussait tout en la craignant comme la peste.
    —  Je suis déçu. Cette fouille des auberges qui n’a rien donné, c’est assez désespérant ! gémit l’eunuque.
    Il faisait allusion au passage au peigne fin, sans succès jusque-là, de toutes les auberges de la ville. Le petit flic prit des airs de conspirateur.
    —  À ceci près que la moisson d’hier n’a pas été complètement mauvaise, à croire que mes hommes, pour une fois, n’avaient pas les yeux plus hauts que les sourcils {8}   !
    —  Vraiment   ? souffla Toujours Là, soudain fou d’espoir.
    Liang, plutôt content de son effet, poursuivit sur un ton théâtral :
    —  Vous allez voir. Elle m’a permis de mettre la main sur l’un de nos meilleurs indicateurs qui avait disparu de la circulation. Il a sûrement des choses intéressantes à nous dire. Faites donc entrer M. Wang !
    Lorsqu’il fut poussé par deux policiers dans le bureau de Liang, Wang le Chanceux était en pleine crise de manque, gris comme un morceau de feutre, suant à grosses gouttes et les

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